La révolte gronde dans les vallées vosgiennes. Depuis plusieurs mois certains paysans n'arrivent plus à écouler leur lait. Le camion de la laiterie ne passe plus car les petits volumes sont considérés comme non-rentables.
Bruno Veckman vient de reprendre la ferme du père Durand, à Ban-Sur-Meurthe (88), elle compte seize vaches laitières en tout et pour tout. Un camion passe récupérer son lait deux fois par semaine. A partir du 1er janvier, il devra absolument fournir à la laiterie deux cents litres par tournée sinon il n'y aura plus de collecte et le lait partira dans la fosse à purin. Pour le moment, Bruno parvient à répondre à la demande et fournit la quantité demandée mais le mois de janvier s'annonce compliqué. C'est la période du vêlage et les veaux qui vont naître auront besoin de s'alimenter avec le lait de leurs mères. Que fera t-il de sa production si le camion de Lactalis ne vient plus sous prétexte qu'il manque quelques litres ?
Des veaux nourris avec du lait, des petites productions, des variations saisonnières, tout cela ne colle pas au modèle industriel. Rassemblés par la Confédération paysanne, les éleveurs des deux versants des Vosges racontent la même détresse. L'impression qu'on ne veut plus d'eux. Claude Maire, éleveur à Orbey, raconte que dans le temps, la limite fixée par l'industriel était de cinquante litres. Lorsqu'elle est passée à deux cents litres, certains ont pu suivre mais d'autres ont été "rayés de la carte". Pour Romain Balandier de la Confédération Paysanne Vosges, "on est plus dans une relation de proximité avec sa laiterie mais on est petits éleveurs face au géants agro-industriels".