Francis Cabrel, de retour lundi sur les ondes avec le premier extrait d'un nouvel album annoncé pour avril, dit aborder, à 61 ans, les "derniers lacets" de sa riche carrière avec l'envie de "dire exactement ce (qu'il) ressent, sans vouloir toujours accrocher un public d'une quinzaine d'années".
"Dans une carrière, il y a une entrée et une sortie. L'entrée, on ne décide pas forcément quand elle arrive, mais la sortie, je pense qu'il faut la préparer, là je suis en train de faire ça", explique Francis Cabrel.
Le chanteur a plus de 35 ans de tubes depuis "Petite Marie" (1977) ou "Je l'aime à mourir" (1979).
Annoncé pour le 27 avril, "In Extremis" (Smart/Sony Music) sera le premier album de Francis Cabrel avec des chansons originales depuis "Des roses et des orties" (2008) écoulé à plus de 900.000 exemplaires.
Ce 13e album studio, l'un des événements de l'année musicale en France, sera-t-il le dernier? "Pas forcément... Mais c'est la pente qui y mène", dit-il, regard clair et réponses courtes.
Le temps qui passe, thème déjà abordé par Francis Cabrel dans les années 1980 avec des chansons comme "Le temps s'en allait", revient hanter le chanteur dans son nouveau single, "Partis pour rester". Sur fond de guitares blues-rock et choeurs féminins, il invite à "viser l'éternité/On est tellement bien ici/On va faire comme si/On était partis pour rester".
"J'arrive à un stade de ma vie où les choses deviennent urgentes, on arrive dans le final, les derniers lacets. Après 60 ans, ce n'est pas le moment d'avoir des projets pour dans 30 ou 35 ans", explique le chanteur.
Francis Cabrel a comme d'habitude enregistré ce nouvel album chez lui, à Astaffort (Lot-et-Garonne).
Il aborde les choses de front, à l'image de la photo, assez inhabituelle pour lui, retenue pour la pochette de l'album : habitué du clair-obscur ou des ambiances un peu nuageuses, il s'affiche cette fois en gros plan, de face, regardant le spectateur droit dans les yeux.
Parenthèse Bob Dylan
"A l'âge que j'ai, la volonté, c'est de dire exactement ce que je ressens, assumer le temps qui a passé, sans vouloir toujours accrocher un public d'une quinzaine d'années", ajoute-t-il au sujet d'un disque toujours très blues où les chansons parlent évidemment d'amour mais aussi de thèmes moins attendus, comme le chemin de croix du Christ, la vie en prison de Mandela, la disparition de la langue occitane ou la bataille d'Azincourt.Le chanteur avait confessé une panne d'inspiration il y a quelques années et s'était octroyé une petite parenthèse Bob Dylan en adaptant les titres du chanteur américain ("Vise le ciel", en 2012). Puis il a fait comme d'habitude : prendre son temps, "s'asseoir à une table pour réfléchir" pour "provoquer" le retour des idées.
"Il faut soigner l'écriture. Même s'il faut cinq ans pour faire une chanson, ce n'est pas grave" : voilà les conseils que le chanteur donne aux jeunes auteurs-compositeurs qui viennent chaque année depuis 20 ans en stage à Astaffort, conseils qu'il distille aussi à sa fille, Aurélie Cabrel, qui a publié l'an dernier son premier album.
A l'ère du numérique et d'une industrie musicale en crise, Francis Cabrel et ses quelque 21 millions de disques vendus (selon son label) reste l'un des très rares à pouvoir toujours imposer son rythme et ses conditions.
Comme Jean-Jacques Goldman et une poignée d'autres, il peut par exemple refuser que ses albums soient disponibles sur les plateformes d'écoute en streaming. "Je considère que mes chansons m'appartiennent et que je peux les mettre sur le support que je choisis", dit simplement celui qui repartira sur les routes à partir de septembre avec près d'une cinquantaine de dates annoncées en France, Suisse et Belgique.