A 87 ans, le Docteur Pierre-Henri Brousse reste fidèle à ses patients castelroussins

Médecin généraliste, obstétricien puis médecin de famille, le Docteur Brousse est désormais pour sa patientèle, le médecin traitant. 57 ans que cela dure. C'est dans son ADN.

L'année du bac.

Jeune médecin.

50 heures par semaine


Les journées de travail du Docteur Brousse sont bien remplies."Je travaille à temps plein" dit-il.
On s'en serait douté. Comme un métronome.
Arrivé à son cabinet à 7h45, il consulte jusqu'à 12h30. Puis il s'offre une petite pause pour un déjeuner frugal. A 13h30, il reprend ses consultations et ce, jusqu'à 20h30. Infatigable.

Il y a longtemps, bien longtemps de cela, son profil psychologique avait été dressé. On pouvait notamment lire ceci : " Travailleur acharné. Peu rêveur. Très méticuleux ".
Il avait dit-il, le sentiment que l'on parlait d'une tierce personne. Pas de lui. Puis le temps a passé.
Comme une pirouette, il nous cite Confucius. Un maître à penser chinois : " Si vous avez une activité qui vous plaît, vous n'avez pas l'impression de travailler."

Comme pour se dédouaner, il précise : " Médecin, on l'est à temps plein. Vous allez dans un repas de famille, vous êtes en vacances, il y a toujours quelqu'un qui va vous interpeller. Pour vous raconter ses misères. Quand je me suis installé, que ma plaquette a été visée, le 2 Mai 1960, mon seul projet c'était que quelqu'un ait envie de venir sonner à ma porte. Et à l'heure d'ouverture, quelqu'un a sonné. J'ai cru que c'était un représentant de commerce. C'était une patiente. Elle m'a dit, j'aime les jeunes médecins, je suis un porte bonheur. Je l'ai soignée jusqu'à sa mort".

Prendre le pouls d'une évolution révolutionnaire


"Vous n'imaginez-pas les avancées fulgurantes de la médecine en un demi-siècle. En obstétrique, le médecin disposait d'un stéthoscope et de ses mains. Sans plus. Désormais, grâce à la biologie, à l'échographie et au monitoring, c'est un peu comme les Américains débarquant sur la lune. C'est prodigieux. Une évolution révolutionnaire. Aujourd’hui, le patient demande un scanner, une IRM, une scintigraphie comme s'il allait à l'épicerie du coin pour avoir un paquet de nouilles.
Quand je pratiquais l'obstétrique, heureusement qu'il y avait un chirurgien avec moi pour les césariennes et les forceps. On travaillait à toute heure du jour et de la nuit, 7J/7. C'était une autre époque. La médecine a fait des pas de géant par le diagnostic d'abord puis par les résultats thérapeutiques ensuite. On est passé de l'âge de la pierre à la fusée puis au vol interplanétaire."

"J'aime passionnément ce que je fais. C'est toute ma vie. C'est vrai"


Le Docteur Pierre-Henri Brousse confesse finalement qu'il est un hyperactif,
Une autre confidence arrachée à cet homme très pudique. Autant il est intarissable sur sa profession et sur sa patientèle autant il devient mutique quand il s'agit de parler de lui-même.

Nous avons appris qu'enfant de la guerre, il voyait tous les ans à la Communale, des copains emportés par des infections qui aujourd'hui se traitent en quelques jours. De cette époque, il a conservé une aversion inconditionnelle de l'encens.
Un parfum sans doute associé à la mort, dans l'esprit du petit garçon.

Dans son for intérieur, il a toujours voulu être médecin. Et une expression latine lui va comme un gant. Le médecin en premier lieu nous dit-il, c'est : "Ne pas nuire, guérir parfois, soulager toujours. On ne se prend pas pour le Christ : Lève-toi et marche." Pas d'injonction.

"Le médecin, poursuit-il, c'est quelqu'un qui va soigner aussi bien les gens du voyage dans leur roulotte que le PDG d'une grande entreprise. Nous avons un éventail très large de la population comme aucune autre profession. Et en plus, on va dans l'intimité des gens. Ils nous racontent leurs joies et nous confient leurs peines comme leurs tourments. Ils nous font confiance".
Mais le Docteur Pierre-Henri Brousse n'est pas angélique pour autant.
Au cours de notre conversation, il aura une pensée pour les épouses et pour les conjoints de médecins.
"Notre travail est très absorbant, chronophage... Le médecin est confronté chaque jour, un peu plus, aux exigences des patients. Il ne peut pas élargir sa plage horaire au risque d'y laisser sa santé.

Mais face à la pénurie de médecins, je constate que les malades sont vite exacerbés. Ils fulminent au téléphone. "Vous vous en fichez de moi. Vous voulez me laisser crever. Ce n'est pas le premier médecin que j'appelle. Et chaque fois, c'est toujours la même réponse."
Le Docteur Brousse fustige à son tour la logique comptable qui désormais prend le pas sur des considérations humaines. Le souci de la rentabilité et de la performance à tout prix. A n'importe quel prix?
Et dire que le modèle français autrefois vanté par l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé) comme le meilleur au monde, s'est insidieusement aligné sur le système anglo-saxon.

"Il n' y a pas si longtemps encore, les Britanniques venaient nombreux se faire soigner en France… " plaide-il.
"Avant, constate-il, il y avait des médecins dans les campagnes. Il y avait un vrai maillage territorial. Ce n'est plus le cas. Ici même, dans notre ville de Châteauroux qui est une préfecture, les confrères partent désormais à la retraite le plus tôt possible. Ceux qui sont à quelques années de la retraite se reconvertissent en médecins de Maisons de retraite. Ils deviennent des salariés pour avoir un peu la paix. C'est tout cela qui gâche un peu ma fin de carrière."

Mais que l'on se rassure: Pierre-Henri Brousse a un fils. Lyonel Brousse, 53 ans. Profession : Médecin généraliste. Le père et le fils partagent le même Cabinet Médical et travaillent en bonne intelligence depuis 27 ans. Une histoire de famille. Une même passion chevillée au corps et la médecine en partage.


Propos recueillis par Théophile MBAKA et Pascal EPEE.

Confidences

©France 3 Centre-Val de Loire

 

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