Harcèlement scolaire et cyberharcèlement : "Il faut toujours en parler", conseille une enseignante de Floirac à ses élèves

Quatre cents signalements en 2020 sur l’académie de Bordeaux pour harcèlement scolaire, 10% des collégiens victimes de cyberharcèlement : en cette journée de lutte contre le harcèlement à l’école, le 18 novembre 2021, le département de la Gironde a annoncé le déploiement d’une étude sur les dangers des réseaux sociaux. En parallèle Emmanuel Macron a présenté des mesures de lutte contre ce fléau.

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"Il faut toujours en parler. Si on est témoin de quelque chose, si on reste sans rien faire c’est comme si on était un peu complice. Si on fait quelque chose c’est une action solidaire, on aide les autres. Ça permet d’éviter à une personne seule, en souffrance, de souffrir", explique Caroline Bonamy à ses élèves de CM1-CM2 de Floirac (Gironde). Réactifs, intéressés, les élèves de 9 à 10 ans participent et s’interrogent après la projection d’une vidéo de sensibilisation au harcèlement scolaire ce 18 novembre 2021, dans le cadre de la journée national sur ce sujet.

"Je ne connaissais pas l’effet de répétition. Je ne savais pas que la plupart du temps la personne victime était toute seule et c’était un groupe", réagit Florian, 9 ans. "Il faut aider, faut en parler, faut pas laisser la personne toute seule, faut pas rire, faut se confier à quelqu’un", explique de son côté Rebecca. Quant à Yannis, 10 ans, il évoque avoir lui-même était victime de harcèlement et s’être senti seul : "J’ai déjà vécu cette situation, des violences physiques… J’ai parlé à mes parents. Je ne savais pas ce que je devais faire quand je me faisais harceler. Tu ne sais pas quoi faire."

Par le programme pHARe, (Prévenir le Harcèlement et Agir avec Respect), mis en place à la rentrée 2021 dans certaines écoles en France, les professeurs peuvent être formés à faire face à ce fléau dans les écoles.

Il y a deux ans, on avait eu une situation où pendant plusieurs semaines un élève avait ses petits soldats, ils donnaient des consignes pour aller taper souvent le même élève. Le fait de beaucoup en parler, ça libère la parole. Les enfants se rendent compte qu’ils peuvent dire les choses et ils trouveront forcément une solution pour les aider.

Caroline Bonamy

Professeure des écoles à Floirac (Gironde)

"L’année dernière il y a eu 400 signalements dont un tiers concerne le premier degré et deux tiers le second degré avec principalement le collège", énonce la Rectrice de l’Académie de Bordeaux, Anne Bisagni-Faure, en déplacement dans cette école de Floirac.

Le harcèlement scolaire s’accompagne parfois du cyberharcèlement : 10% des collégiens en sont victimes. "Aujourd’hui, nous sensibilisons les parents. Nous organisons un Insta Live avec la gendarmerie nationale de Gironde et l’Académie de Bordeaux. Nous avons une centaine d’inscrits et nous espérons répondre aux questions et expliquer, repérer, appeler à la responsabilisation des parents par l’utilisation des téléphones portables", souligne la Rectrice.

En Gironde, déploiement d’une étude sur les dangers des réseaux sociaux

Dans le cadre de cette journée de lutte contre le harcèlement à l’école, le département de la Gironde a annoncé jeudi 18 novembre, le lancement d’une étude, à Bordeaux, sur les dangers "potentiels des réseaux sociaux pour les jeunes."

L’étude Cyberlife, financée par l’Agence Nationale de la recherche (ANR) a pour objectif "d’identifier et construire des actions de préventions adaptées au cyberharcèlement", informe le département. Le questionnaire est à destination des parents et des enfants.

"L’enquête est paramétrée pour étudier la concordance entre les réponses des parents et celles des enfants. Ces données sont importantes pour tout le monde et notamment pour les collectivités publiques ou les associations qui se lancent dans la prévention. Il faut savoir sur quel diagnostic on se base", explique Mathilde Husky, professeure de psychologie clinique et psychopathologie, qui étudie, depuis plus d’un an, les effets des réseaux sociaux sur la santé de milliers de collégiens girondins. Selon elle, "il y a urgence à rechercher les liens entre l’usage des réseaux sociaux et la santé mentale, entre le temps passé sur les réseaux et le sommeil et les affects anxio-dépressifs, à diagnostiquer ce qui fait basculer les jeunes les plus vulnérables."

Le questionnaire est disponible ici.

Nouvelle application, introduction du "harcèlement scolaire" dans le code pénal : les annonces d’Emmanuel Macron

Dans le cadre de cette journée, les mesures de lutte contre le harcèlement à l'école du président de la République Emmanuel Macron étaient attendues. Il a tout d’abord annoncé un renforcement du contrôle parental sur les écrans utilisés par les enfants. Dans sa vidéo postée sur les réseaux sociaux, le chef de l'Etat annonce qu’ "en plus du numéro 3018 mis en place, une appli 3018 sera lancée en février pour permettre aux victimes et aux témoins d'adresser une capture d'écran de situations de harcèlement afin que celles-ci soient encore mieux accompagnées".

Il indique également le renforcement des "maisons des adolescents, les points d'accueil écoute jeunes, les lieux physiques avec des personnes qui sont là pour recevoir la parole et pour écouter partout sur le territoire."

Le lancement d’une expérimentation, en délivrant "une certification à la sensibilisation au numérique aux élèves de 6e à partir de la rentrée 2022, avec l'idée, ensuite, de généraliser dès la rentrée suivante."

Enfin, l'Assemblée nationale examinera le 1er décembre une proposition de loi du MoDem Erwan Balanant pour "combattre le harcèlement scolaire" en introduisant spécifiquement le "harcèlement scolaire" dans le code pénal.

Le harcèlement scolaire et le cyberharcèlement causent des drames

En septembre dernier, Alexandra Joris Bouvier avait alerté sur le réseau social Linked In des dangers et des dérives des réseaux sociaux. "Le harcèlement TUE" avait-elle écrit. "Mon histoire n'est malheureusement pas isolée. J'aimerais tellement que notre histoire puisse d'une manière ou d'une autre alerter les gens, sauver ne serait-ce qu'un enfant parce qu'on aura détecté ou trouver des solutions."

Sur son post, elle s'adresse à tous les adultes qui entourent ces enfants, ces adolescents vulnérables.

Le 1er mai 2021, Alexandra Joris Bouvier a retrouvé sa fille de 15 ans pendue dans le salon familial à Pessac, près de Bordeaux. "Elle avait, de manière très méthodique, posé son téléphone à deux mètres d’elle, son chargeur, le câble de son téléphone, elle voulait attirer l’attention." Pour la maman de l'adolescente, pas de doute. "Ma Juliette est rentrée dans ces pièges des Réseaux Sociaux".  Juliette, comme énormément d'ados de son âge, était très active sur Instagram. Très populaire avec 50 000 abonnés. "L'enquête fait état de harcèlement. On a poussé ma fille à mettre fin à ses jours. Il y a eu du harcèlement, c’est sûr" témoigne Alexandra Joris Bouvet.

Depuis le 1er janvier dernier, 19 enfants se sont suicidés à cause du harcèlement scolaire qu'ils subissaient.

Si vous avez besoin d'aide, si vous êtes inquiet ou si vous êtes confronté au suicide d'un membre de votre entourage, il existe des services d'écoute anonymes. La ligne Suicide écoute est joignable 24h/24 et 7j/7 au 01 45 39 40 00.

En cas de cyberharcèlement, contactez Net Ecoute 3018. Elèves, parents, professionnels, appelez le 30 20. Les services et appels sont gratuits.

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