Singulier destin que celui de ce skieur d'abord évincé de la sélection française et finalement rappelé à la dernière minute. Un champion qui saisit sa chance et finit sur le podium du Super G. Mais qui est donc Gauthier de Tessières?
"C'est le destin", répéte Gauthier de Tessières en apothéose de sa médaille d'argent en super-G aux Mondiaux de ski alpin, mercredi à Schladming. Le destin de naître à Clermont-Ferrand, d'un parcours atypique et surtout d'être remplaçant. Il a pris au dernier moment la place de Yohan Clarey, tombé à pied samedi à Tignes sur une plaque de verglas et opéré lundi d'une lombo-sciatique aiguë. Clarey, qui plus est son meilleur copain, bonne pâte qui l'a accepté tel qu'il est. Encore un signe du destin.
"Je suis différent", revendique Gauthier. Sans provocation mais avec assurance. "Un skieur qui vient d'une autre région que les Alpes et qui défend des valeurs du ski un peu différentes des autres. J'ai mon expérience, mon histoire qui font que je ne vois pas toujours les choses comme les autres. Ma différence, c'est mon parcours", rappelle le médaillé surprise. Et d'expliciter : "J'ai grandi pas forcément près des Alpes comme mes coéquipiers. J'étais toujours très proche de l'Ecole du ski français qui inculque d'autres valeurs du ski, plus dans le plaisir, moins dans la compétition". Un vécu qui l'a catalogué "dilettante" dans un monde dur, lui toujours entre deux groupes, celui des techniciens et celui de la vitesse, entre la routine de sélections mondiales et olympiques sans sommet et la grande déception de l'exclusion il y a quelques jours.
Enfant à Saint-Germain-L'Herm, village de quelque 200 habitants près d'Issoire, il a appris le ski au Mont-Dore, station dont il est désormais ambassadeur. Puis, avec ses parents pharmaciens, qui ont par la suite transféré leur activité professionnelle en Isère, il a découvert l'Alpe d'Huez.
Quel destin?
Le destin? Gauthier avait été médaillé de bronze aux Championnats du monde juniors de Verbier (Suisse) en 2001. Il a retrouvé le podium dans la même discipline 12 ans plus tard, après maints détours. "Je suis content d'écrire une ligne à mon palmarès", souffle-t-il. Il était de l'équipe en or aux Mondiaux 2011, mais comme remplaçant. Quand on lui demande ce qu'il entend par destin, le brun barbu aux yeux clairs sourit, embarrassé autant qu'amusé : "Je suis pas spirituel à ce point-là, mais quand même je crois qu'on n'est pas là pour rien. Quand t'es appelé comme ça à la dernière minute, c'est qu'il va se passer quelque chose. "Autre réponse : "Je pense avoir mérité tout ça, ajoute-t-il. Le destin, peut-être personnifié par Johan Clarey."Lecteur assidu, il a beaucoup apprécié "Les Dieux voyagent toujours incognito", roman psychologique dont le héros n'est plus maître de son destin. Au rayon littérature, on connaissait le fameux "La faute de la fatalité", qui scelle le destin de Charles Bovary et du célèbre roman de Gustave Flaubert, Madame Bovary. "C'est le destin", version Tessières, a quelque chose de réjouissant désormais.