Tous les ans la même chose, deux fois par an : penser à modifier l'heure sur tous les réveils avant d'aller faire un somme. "Ah oui, c'est ce week-end !?!". Avouons qu'à chaque fois, on se demande à quoi ça peut bien servir et si au final, ça n'est pas beaucoup de bruit pour rien. Explication.
Au moment d’avancer votre horloge d’une heure, pourquoi ne pas avoir une petite pensée émue pour … Benjamin Franklin. Car c’est lui qui, en 1784, parle pour la première fois dans le quotidien Le journal de Paris de la possibilité de décaler les horaires afin d’économiser l’énergie.
L’objectif est noble : Il s'agit d’effectuer des économies d’énergie en réduisant les besoins d’éclairage en soirée, ce qui, avouons le, fait l’affaire de tous les amateurs de barbecue entre amis pendant les longues et heureuses soirées d’été.
Pour quoi faire?
Des économies d'énergie, disent les promoteurs de ce système. Le passage à l’heure d’été permet ainsi de prolonger d’une heure l’ensoleillement en soirée sans pour autant le réduire sur le début effectif de la journée pour les habitants.
Par exemple à Lyon le 30 mars, le soleil se lève (en heure d’hiver) à 6h22, et se couche à 19h03 (selon le site http://www.leshorairesdusoleil.com/).
Dimanche 31 mars, en tenant compte du décalage d’une heure, le soleil se lèvera à 7h20, et se couchera à 20h05.
Pour quel résultat?
Il y aura donc bénéfice si l'économie d'énergie réalisée le soir pour ne pas s'éclairer est supérieure à celle nécessaire pour faire fonctionner vos ampoules entre 6 h et 7 h, créneau pendant lequel il est vrai de nombreux français sont encore au lit.
Dans l'hexagone en 2009, une étude réalisée conjointement par le ministère de l’Industrie, EDF et l’ADEME estimait l’économie d’électricité (poste d’éclairage) était d’environ 440 GWh (1 300 GWh en 2003) et représente environ17 kWh/foyer/an (comptage hors industrie, entreprise). L’émission de 44 000 tonnes de CO2 aurait ainsi été évitée.
Oui, mais...
Pourtant, on est loin de l'unanimité. D'abord, pour des raisons de biorythme. De nombreuses personnes, à commencer par les enfants et les personnes agées, sont victimes de ce changement d'horaire qui n'a rien de biologique : deux heures d'avance sur l'heure solaire.
Des études récentes mettent en relation la réduction du temps de sommeil liée à l’avancement de l’heure au printemps (qui retarde la sécrétion de la mélatonine – l’hormone du sommeil), avec l’augmentation du nombre et de la gravité d’accidents divers, comme: des accidents cardiaques, des accidents du travail et des accidents de la circulation.
Ensuite, il y a toutes les personnes travaillant avec des animaux, vaches et chèvres en particulier, pour qui l'heure de la traite ne se décale pas impunément.
Enfin, il y a ceux qui relativisent les économies en expliquant que l'éclairage et le chauffage nécessaire le matin lors d'un printemps pourri (tiens, ça vous rappelle quelque chose?) mange littéralement le bénéfice de la soirée.
Faut-il en finir avec l'heure d'été?
Cette question, on se la pose régulièrement. Le Sénat, lui, avait répondu par l'affirmative en ... 1997, dans une étude éponyme (dont vous trouverez l'intégralité du texte en cliquant ici).
Sans ambage, le rapport concluait " que les avantages annoncés ou attendus du changement semestriel de l’heure ne sont pas suffisamment importants pour compenser les inconvénients ressentis par les populations ", en particulier en ce qui concerne la santé publique, les conditions de travail et les modes de vie, l'agriculture, la protection de l'environnement et la sécurité routière.
Alternative
Et de proposer une alternative : " Si le souci d'économiser l'énergie et le souhait de favoriser les loisirs devaient être maintenus, une solution plus respectueuse des modes de vie pourrait être trouvée dans l'instauration d'horaires d'été, plus souples et mieux adaptés aux contraintes locales que l'heure d'été actuelle. Cela conduirait ainsi à décaler les horaires des écoles, des administrations ou des entreprises, en fonction de leurs besoins, de leurs contraintes et de leur situation géographique par rapport au soleil".
L'Europe consacre un autre intérêt
Alors que de nombreux pays ont déjà abandonné le changement d'heure (Chine, Russie, Biélorussie, Japon, Corée du Sud), L'europe, elle, persiste. Mieux, elle harmonise la chose en 1998. Et reconnaît parmi les bienfait de ce dispositif bien sûr "quelques économies d'énergies " mais aussi " le fait qu'elle favorise la pratique de toutes sortes de loisir le soir".
L'apéro ou la pétanque du soir reconnus d'utilité publique ? Pas vraiment, mais avouons qu'au moment d'avancer nos horloges d'une heure ce soir, beaucoup auront à l'esprit ces (longues) soirées à venir, en famille et entre amis. Tout cela avec un sourire de contentement. Comme quoi, le bonheur, c'est simple comme un peu de soleil.