Nicolas et sa femme sont les seuls producteurs de noisettes d’Auvergne. Installés dans un petit village de l’Allier, ils doivent faire face à un insecte ravageur : la punaise diabolique. Ils misent sur l’intelligence artificielle pour trier les noisettes et ainsi gagner un temps précieux.
C’est à Echassières, dans l’Allier, que Nicolas Perrin et sa femme Karen, un couple d’agriculteurs, se sont installés en 2017 afin de produire des noisettes. “La noisette se développe bien dans le Lot-et-Garonne et dans le Tarn-et-Garonne, avec un climat plus doux. En en plantant en Auvergne, on a pris un gros risque”, explique Nicolas. Un défi qu’il relève mais qui le met en difficulté. L’agriculteur raconte : “On a planté 25 hectares de noisetiers en décembre 2017. On est les premiers à implanter de la noisette en Auvergne. On est partis de loin pour la diversification car les banques n’étaient pas forcément favorables. Rapidement, le climat auvergnat a montré ses limites, le rendement n’était pas forcément à la hauteur de ce qu’on attendait. On a monté en 2020 un laboratoire de transformation. Idéalement, on devait faire de la noisette seulement pour les huileries locales”.
Le fléau de la punaise diabolique
Les dégâts dans le verger sont aussi dus à la punaise diabolique. Nicolas indique : “On a l’habitude de gérer des ravageurs de noisettes comme le balanin, le vers qui fait un trou dans la coquille de noisette. On a quelques moyens de lutte pour cela. Mais on ne peut rien faire contre la punaise diabolique : elle vient piquer la noisette au moment où elle se développe. Extérieurement, on n’a aucun moyen de détecter cela. Même pour une noisette décortiquée après cassage, il n’est pas évident de voir si elle a été piquée”. Après cuisson, la peau ne s’enlève pas et la noisette devient noire. Sur une année, on peut compter entre 15 et 20% de fruits infectés.
Des noisettes triées grâce à l'IA
La solution vient peut-être de Chine. Après avoir effectué un long travail de recherche, l’agriculteur décide de miser sur une trieuse optique par intelligence artificielle (IA) venue tout droit de l’Empire du Milieu : “La semaine dernière, un technicien est venu de Chine exprès, pour définir les échantillons de noisettes à rejeter. Cette machine est une trieuse. Grâce à deux rangées de caméras, elle regarde la noisette sous tous les angles et par air comprimé, elle repère la noisette qui lui semble défectueuse”. Auparavant, les trieuses optiques fonctionnaient par rapport aux couleurs. Désormais, grâce à l’IA, la trieuse a appris à photographier des milliers de noisettes défectueuses et elle sait les repérer par la forme du fruit.
Grâce à cette innovation, le couple d’agriculteurs espère dire adieu à un triage très chronophage : “Pendant que la machine trie, on peut faire notre travail. Cela va s’amortir assez rapidement”. Coût de l’investissement : 25 000 euros, qu’il espère rentabiliser par l’économie de main-d’œuvre et par la qualité des produits. Si ses prévisions sont bonnes, Nicolas compte embaucher un salarié l’an prochain. Il est pour l’heure le seul producteur de noisettes en Auvergne.
"On a sauvé la boîte en valorisant notre produit"
Nicolas et sa femme ont lancé une gamme de pâtes à tartiner, de noisettes caramélisées, de noisettes salées, de noisettes enrobées de chocolat, vendues dans la grande distribution, en épiceries fines et par une boutique en ligne. Un choix qui s’avère payant : “On a sauvé la boîte en valorisant notre produit. Au lieu de le vendre à 7 euros le kg à une huilerie, on la valorise à 40 euros le kg avec notre méthode”. L’exploitation se développe : le couple passe de 5 tonnes de noisettes récoltées en 2022 à 18 tonnes en 2023. En 2024, la récolte est de 15 tonnes à cause de la météo pluvieuse.