Une plainte a été déposé contre un chirurgien orthopédique qui travaillait à l'hôpital privé Drôme-Ardèche. Rencontre avec plusieurs dizaines de personnes à la mairie de Glun en Ardèche. Toutes ont été opérées par ce même chirurgien et en gardent des séquelles sévères.
En fauteuil roulant, aidées de béquilles, chacune des personnes présentes dans la salle de la mairie de Glun est endolorie.
Leur vie a basculé après une opération, toutes pratiquées par le même chirurgien.
Parmi les premières personnes arrivées, Marie-Christine Nicolet, sous son bras, un dossier rouge rempli de certificats médicaux, de radios qu’elle dévoile.
Opérée en janvier 2018 par le docteur Marc Pierunek, l'intervention qu'elle a subi devait soulager une douleur et conforter quatre vertèbres.
*Elle était loin d’imaginer le calvaire que serait sa vie après cette opération.
« Ici, vous avez une vis qui touche la vertèbre, dit-elle en montrant sa radio, la vis a traversé le disque et est au ras du canal rachidien. Vous avez une vis, explique-t-elle en indiquant un autre endroit de sa colonne vertébrale, qui est près de la veine iliaque. Si la vis rentre dans la veine iliaque, je fais une hémorragie. »
Des conséquences irréversibles
« Il m’a détruit, il a détruit ma vie, répète-t-elle. Je ne vis plus, je suis handicapée à vie avec mes douleurs du matin, du midi, de la nuit...».
Pour elle, ce praticien doit assumer la responsabilité de ses actes, «Il faut que Pierunek paye .»
Marie-Françoise n’est pas un cas isolé, chacune des personnes dans la salle a des séquelles.
Une plainte déposée
Pour Fernande Rulland les séquelles sont morales. Le chirurgien orthopédiste a opéré le dos de son compagnon, Jean-Marie Monnier en janvier 2019. Sa santé a décliné et il est décédé quelques mois après l’opération. Une infection l'a emporté sans qu’il n’ait pu retrouver l’usage de ses jambes.
Elle a décidé de porter plainte pour homicide involontaire contre le chirurgien.
« Je lui disais : tu souffres, tu as quelque chose ? Il me disait non, je ne souffre pas mais je ne comprends pas que je ne puisse pas marcher. Qu’est-ce qu’on m'a fait ? »
L’attitude du chirurgien, son comportement irresponsable, qu'elle juge désinvolte la révolte. « Il a été incapable de dire ce qu’il s’est passé. C’est un toubib qui avait des problèmes et on a tout laissé passé» explique-t-elle indignée.
Avant son décès, Jean-Marie Monnier avait signalé les manquements de son praticien à l'ordre des médecins de l'Ardèche.
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Le médecin radié ...tardivement
La clinique Pasteur aujourd’hui rebaptisée Hôpital Privé Drôme Ardèche confirme qu'il y a eu une alerte de médecins-anesthésistes, en mai 2019, suivie d’une enquête interne qui a conduit l’établissement à suspendre l’activité du praticien et à mettre fin à son contrat en juillet 2019.
Suspendu à plusieurs reprises, le chirurgien est alors radié par l’agence régionale de santé à l’été 2022.
Bien trop tard pour Edouard Bourgin, avocat grenoblois, spécialiste de la réparation des dommages corporels. Il défend plusieurs victimes. "Ce que cette nouvelle affaire nous apprend, c’est que encore une fois un médecin a pratiqué du nomadisme géographique, c’est-à-dire qu’il a quitté une région dans laquelle, les procès s’accumulaient pour en adopter une autre. Et on s’aperçoit dans cette nouvelle affaire Pierunek qu’en réalité les institutions locales n’ont pas connu ou signalé les dangers, les méfaits qu'avait déjà pratiqué ce chirurgien à Nice" déplore l'avocat.
L’avocat du chirurgien n’a pas souhaité répondre aux questions de nos reporters.
Les victimes du médecin souhaitent, à présent, créer un collectif pour sortir de l’anonymat et se battre tous ensemble.