Cantal : l'histoire héroïque de l'inventeur du tracteur Cournil

En 2021, le tracteur Cournil, créé dans le Cantal, fêtera ses 60 ans. Si beaucoup d'agriculteurs l'ont adopté, peu connaissent le passé de son inventeur, Bernard Cournil, dont l'action pendant la Seconde Guerre mondiale lui a valu d'être médaillé par la Reine Mère d'Angleterre. 
 

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« C'est à sa mort et lors des commémorations que j'ai compris ce que mon père avait fait pendant la guerre. » Comme beaucoup, Alain Cournil associait son patronyme au tracteur qui a simplifié la vie de beaucoup de ruraux. Mais Bernard Cournil n'a pas seulement roulé sa bosse dans la mécanique. Il a aussi été un résistant exemplaire. Seulement voilà, son histoire, à la maison, il ne la racontait pas, sinon quelques anecdotes de temps en temps. « Mon père était d'une nature très discrète. Par exemple, il n'affichait jamais la médaille qu'il a obtenu de la Reine Mère d'Angleterre. Il la gardait dans sa poche. »


Lorsque la guerre éclate, à l'automne 1939, raconte son fils Alain, Bernard Cournil commence à héberger dans une ferme des personnes qui devaient partir pour le travail obligatoire. Très vite, il a créé un premier maquis, puis un deuxième et un troisième. En Août 1943, il est contacté par un groupe de résistants toulousains pour organiser une zone de parachutage. C'est donc dans le sud-ouest du Cantal, sur la commune de Saint-Saury que s'établit le terrain « Chénier », nom emprunté à un poète révolutionnaire du XIXème siècle. Ce terrain a une grande importance stratégique, lit-on dans un article de la Lettre de la Fondation de la Résistance datant de mars 2007: « Non seulement il est conçu pour recevoir des opérations programmées, mais surtout il a reçu une mission spéciale comme terrain de récupération de la zone sud. »

« Chénier » devient essentiel à grands nombres d'opérations d'Août 1943 à septembre 1944 : « Il est équipé de matériel de transmission de pointe dont une radio balise (Eurêka) et un radio téléphone (S-Phone), qui permet à un responsable au sol de prendre contact avec l’équipage et de diriger l’avion vers le point précis de largage. Par ailleurs, plusieurs maquis constitués aux alentours sont chargés d’assurer sa sécurité. »


Au sol, le chef, c'est Bernard Cournil. Son équipe compte une vingtaine d'hommes. Ces résistants possèdent un parc automobile pour transporter tout ce qui est parachuté, marchandises, armes ou personnes. « Au minimum s'y déroulèrent trente-deux opérations et probablement davantage. » raconte Eugène Martres dans son livre « L'Auvergne dans la tourmente, 1939-1945 » (Editions De Borée). Ce livre reprend également les éléments mentionnés dans la citation qui accompagnait l'attribution à Bernard Cournil de la « King's medal for courage in the cause of freedom » et indique la réception sur le terrain « Chénier » de quatre-vingt-dix agents et à lui seul d'une centaine de tonnes d'armement. 

« Un géant parmi les héros de la résistance »

Constitués en 1944, les équipes Jedburgh ont pour mission « d'assurer une liaison militaire avec la Résistance en informant Londres de l’état de préparation des groupes de résistants, puis en provoquant des parachutages d’armes nécessaires, et enfin en servant de conseillers militaires. » nous explique l'article de la Fondation de la Résistance. Le terrain « Chénier » sera le théâtre de la première mission Jedburgh avec le Major écossais Thomas Macpherson à sa tête, chargé par l'Etat-major interallié de la coordination des opérations en Auvergne. Cinquante ans plus tard, lors d'un hommage aux résistants du terrain « Chénier » à Saint-Saury, le même major rendra un poignant hommage au courage de Bernard Cournil :  « Il était au-dessus de tous. Un homme de passion, d’autorité, d’honnêteté, d’humour, de courage extraordinaire. Il ne faut jamais oublier son nom. C’était un géant parmi les autres héros de la Résistance. »


Mais les efforts du géant n'ont pas seulement été récompensés de manière posthume. Après la guerre il est honoré de plusieurs médailles dont celle qu'il reçoit des mains de la Reine Mère d'Angleterre. Alain Cournil raconte que le seul souvenir qu'il garde de cet événement, c'est la rage de dents qui a fait souffrir son père au moment où il est allé à Paris pour se faire décorer. Et encore, c'est son dentiste qui lui a raconté cette histoire. Ce héros très discret n'a jamais souffler mot de son héroïsme, même pas à son fils. 

« Le couteau-suisse des véhicules agricoles »

Avant de créer son fameux véhicule tout terrain, juste après la guerre, Bernard Cournil deviendra le premier maire du Rouget, une commune créée en 1945 de la réunion de deux hameaux, dont celui où est installée la forge de son père.

Deux ans plus tard, il installe son garage à Aurillac et bricole des jeeps issues du débarquement pour les agriculteurs du coin. A force de bricolage naît le fameux 4x4. Selon Alain Cournil, un ingénieur des mines explique à son père que c'est bien une nouvelle voiture que le mécanicien a créé. Le tracteur Cournil est né : « Quand les marchants de tracteurs vendaient un Cournil, ils ne vendaient pas qu'un tracteur agricole. Ils vendaient également un véhicule pour les déplacements du quotidien. C'était le véhicule à tout faire. Mon père disait souvent : " le dimanche, vous allez à la messe avec le véhicule, ensuite vous tractez une remorque pleine de bêtes à la foire et le reste du temps, vous travaillez avec à la ferme ! " C'était un peu le couteau suisse des véhicules agricoles ! » s'amuse le fils de l'inventeur. 

Plus de mille exemplaires seront fabriqués jusqu'en 1977. Aujourd'hui encore, Alain Cournil répare les véhicules tout-terrain de son père dans son garage à Aurillac. 
 
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