Coronavirus COVID 19 : pourquoi le Cantal semble relativement épargné par l’épidémie

Aucun décès et un nombre de cas hospitalisés faible au 10 avril, le Cantal semble relativement épargné par la pandémie de coronavirus COVID 19. Pourtant, le département enregistre un nombre important de personnes âgées, qui aurait pu laisser craindre le pire.

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Aucun décès, ni à l'hôpital ni en Ehpad lié au coronavirus COVID 19. Malgré une population âgée, le Cantal affiche un bilan enviable face à l'épidémie de coronavirus mais les professionnels restent prudents dans l'attente du déconfinement, redoutant notamment la "deuxième vague". C’est le cas de Mathieu Kuentz, biologiste et président de la Commission médicale du centre hospitalier d'Aurillac : « Nous avons des inquiétudes par rapport au déconfinement. On ignore pour l’instant si le fait d’avoir eu le virus confère une immunité, mais si c’est le cas, lors de la fin du confinement, nous aurons une grande proportion de personnes immunologiquement naïves dans le Cantal. La circulation du virus a été assez faible. »

Vers une très grosse "vague" ?

C’est cette « deuxième vague » qui l’inquiète le plus. Si l’hôpital d’Aurillac a eu le temps d’anticiper la crise du coronavirus, il n’en sera peut-être pas de même après le confinement : « On fait au mieux pour s’organiser, mais je ne suis pas capable, pour l’heure, d’affirmer avec certitude que nous serons à même d’assumer une très grosse vague. Cela dépend de la manière dont le déconfinement sera organisé et si, oui ou non, les personnes fragiles seront déconfinées en décalé. Il sera aussi très important de respecter les mesures barrière », affirme le biologiste.

En effet, le coronavirus a assez peu touché la population autochtone du Cantal. Pourtant, l'arrivée d'un virus touchant plus particulièrement les personnes âgées laissait présager le pire dans ce département où la part des seniors est l'une des plus élevées en France. Les plus de 60 ans y représentent 35% de la population, mais les autorités sont formelles : aucun décès n'a encore été enregistré à l'hôpital.

Une faible densité de population

« Proportionnellement à la densité de population, nous ne sommes pas si différents de nos voisins en termes de cas. Nous avons bénéficié des mesures de confinement car son début a coïncidé avec les premiers cas dans le Cantal, ce qui a stoppé net la première vague. De plus, la plupart des personnes âgées vivent dans des maisons individuelles et ne sont pas dans des grandes agglomérations, ce qui limite leurs contacts et donc la contamination. On est face à un virus qui se transmet par projection, ou par le contact avec des surfaces, alors elles ne peuvent pas être contaminées par le bouton de l’ascenseur par exemple », explique Mathieu Kuentz.

Les EHPAD épargnés

De plus, aucun décès n'a été recensé dans les nombreux Ehpad du territoire. Pour Mathieu Kuentz, il s’agit encore d’un bénéfice du confinement : « Nous étions en retard sur l’arrivée du virus. Lorsque les premiers cas sont arrivés dans le Cantal, les visites en EHPAD étaient déjà interdites depuis quelques jours, les mesures barrière étaient déjà en place. En prenant exemple sur les régions plus touchées, nous avons pu anticiper les différentes étapes de l’épidémie, ce qui a permis d’éviter des décès. Ou alors, c’est l’air du Cantal qui nous a protégé ! » Seul le département voisin de la Lozère peut aujourd'hui se vanter de n'avoir compté aucun mort à ce jour en métropole.

"Casser les chaînes de transmission"

Au total, 63 personnes avaient été testées positives dans le Cantal au 5 avril, selon la préfecture. Et l'Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes comptabilisait vendredi 10 avril 27 patients hospitalisés. C'est seulement le 13 mars qu'un premier cas a été détecté. Les mesures d'isolement de la population ont ainsi permis très vite de "casser les chaînes de transmission et la circulation du virus", explique Mathieu Kuentz.

Le centre hospitalier d'Aurillac préparé

Ce décalage avec les autres régions a aussi accordé davantage de temps aux professionnels de santé pour se préparer. « Grâce à ça, on a eu le temps de bien préparer l’hôpital, de mettre en place différents circuits. Nous avons augmenté notre capacité de 8 lits de réanimation à 20 lits. Nous avons transformé un service de chirurgie en service pré-COVID avec 27 places, et un service de médecine en service COVID de 26 places. On a également utilisé le garage du SMUR, que l’on a équipé de lits et d’arrivées d’oxygène. Pour l’instant, on ne s’en est pas servi », raconte Mathieu KuenTz. A Aurillac, 8 lits seulement ont été nécessaires pour accueillir des patients COVID 19 en réanimation.

"Ici, nous n'avons pas de barres d'immeubles avec 300 personnes"

L'enclavement du Cantal, département situé au coeur du Massif central, en marge des grandes voies de communication, "a eu un rôle certain", estime M.Kuentz, qui évoque également la faible densité de population et un habitat "diffus". Selon l'Insee, le Cantal compte un peu plus de 25 habitants par kilomètre carré contre 105 au niveau national. "Ici, nous n'avons pas de barres d'immeubles avec 300 personnes, ce qui limite la diffusion par les boutons d'ascenseurs ou les poignées de portes", note le biologiste.
Avec 146 000 habitants, et une majorité de communes comptant entre 200 à 400 habitants en moyenne, "le phénomène de distanciation sociale est naturel" dans le Cantal, explique à l'AFP la préfète Isabelle Sima. "L'accès au Cantal est difficile y compris pour le coronavirus!", s'amuse la sénatrice Josiane Costes (RDSE), l'une des premières patientes testées positives dans le département, confiant avoir depuis "retrouvé (s)a forme habituelle".

"La population a été globalement très disciplinée" 

L'élue avance une autre explication au bilan singulier de son département: "Les Cantaliens sont des gens citoyens et ils ont bien respecté les règles de confinement édictées au niveau national", assure-t-elle, en rappelant que le Cantal affiche traditionnellement les meilleurs taux de participation aux élections. "La population a été globalement très disciplinée", confirme Mme Sima. Pour elle toutefois, l'absence de décès est "un petit miracle chaque jour" car les patients en réanimation sont souvent très âgés. "Nous n'avons plus de cas ou alors au compte-goutte", constate Mathieu Kuentz et de fait, le déconfinement, "est la principale question qui nous occupe aujourd'hui".
 
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