Dans la nuit du dimanche 3 au lundi 4 avril, dans les vergers de Drôme et d'Ardèche, les arboriculteurs ont allumé bougies et braseros pour limiter les dégâts et éviter les pertes de récoltes. L'objectif : empêcher les fruits naissants et les bourgeons de geler.
Des flammes dans les vergers pour "anticiper le gel au lever du soleil". Les images étaient spectaculaires alors que le jour n'était pas encore levé. Les allées plantées de fruitiers étaient parsemées de braseros, installés à distances régulières au pied de chaque arbre.
La nuit dernière, notamment dans les vergers drômois, les arboriculteurs inquiets n'ont pas chômé. Ainsi, à Châteauneuf-sur-Isère, sur une parcelle de 30 hectares exploitée par Julien Rispal, l'allumage des bougies a débuté peu avant 4 heures du matin. Une opération menée tambour battant. Pas une minute à perdre.
Pour préserver les prochaines récoltes, cet arboriculteur a lutté contre les risques de gel à grand renfort de braseros, bougies et autres chaufferettes. Les sévères baisses de températures en ce début avril mettent en péril les récoltes. Et l'heure est critique : "On est aux alentours de 1°C. A -0,5°C, il y aurait beaucoup de dégâts. Alors on préfère anticiper et allumer avant que ça gel. A l'heure actuelle, le fruit n'a plus rien pour le protéger. On préfère anticiper et limiter la casse", a expliqué tôt ce matin Julien Rispal.
Mais l'arboriculteur se disait confiant, habitué à ces périodes de gel au printemps. Des phénomènes qui deviennent récurrents : "Aujourd'hui, on sait que le gel de printemps devient fréquent. On avait 2 ou 3 épisodes de gel au printemps certaines années. Aujourd'hui, on en a jusqu'à 10 par saison". Des conditions climatiques qui engendrent des "coûts de production supplémentaires". L'an dernier, grâce aux bougies installées dans ses vergers, Julien Rispal avait réussi à sauver jusqu'à 70% de sa production.
Depuis plusieurs années, dans la Drôme, les aléas climatiques se répètent d'année en année, entre la grêle, le gel et la sécheresse. Les arboriculteurs de la région ont encore à l'esprit l'épisode de gel noir de l'année passée. Dans la nuit du 7 au 8 avril 2021, les températures étaient tombées très bas, jusqu'à -7°C. Malgré les différents moyens déployés par les arboriculteurs et les vignerons pour lutter contre le gel, les pertes avaient été massives. Cet épisode exceptionnel de gel en avril avait fait perdre une bonne partie de la récolte de pêches, abricots, cerises ou encore de poires, sans compter la production de vin.
Même inquiétude en Ardèche, près d'Aubenas. Certains exploitants ont utilisé des bougies pour lutter contre les températures négatives. D'autres ont eu recours à une autre technique : celle de l'aspersion.
Dans la Drôme et en Ardèche, les arboriculteurs sauront dans quelques jours si leurs efforts ont permis de limiter des dégâts causés par le gel. Une seule certitude, pour les prochaines nuits, le mercure devrait remonter.
La nuit d'avril la plus froide depuis 1947
En moyenne, en France, les températures enregistrées dans la journée du dimanche 3 avril étaient de six degrés au-dessous de la moyenne de saison, selon Météo-France. Une vague d'air polaire venue de Scandinavie zèbre le pays du nord-est au sud-ouest qui devait favoriser les gels nocturnes.
Ce lundi matin, Météo France annonçait que la nuit de dimanche à lundi les températures les plus froides pour un mois d'avril depuis 1947 avaient été enregistrées. Les températures les plus basses ont été enregistrées en Champagne, où elles sont descendues jusque -9 °C, alors que le gel a touché la quasi totalité du pays.
La vallée du Rhône épargnée?
De son côté, la présidente du premier syndicat agricole français, la FNSEA a indiqué dans la matinée que le gel avait "tapé dur" dans la nuit et qu'il aurait des conséquences "très graves" car de nombreuses régions avaient été touchées par des températures à -5 degrés. "Ce qui a souffert, ce sont surtout les fruits à noyaux," a-t-elle précisé. "Il y a beaucoup de régions touchées comme la Dordogne, la Bourgogne, l'Alsace, le Centre-Val de Loire, le Lot-et-Garonne, le Maine-et-Loire", a-t-elle précisé.
Il faut cependant attendre encore pour faire un bilan dans la région Auvergne Rhône-Alpes. "Ce qui semblerait épargné à ce stade là, c'est plus la Méditerranée et un peu la vallée du Rhône grâce au Mistral et des températures qui ont été entre 0, -1 degré. Il va falloir attendre pour voir s'il y a pas quelques dégâts, je pense notamment sur ces parcelles qui sont en bas-fond. Vers 11h, midi, on verra plus l'ampleur des dégâts", a résumé Jérôme Despey, secrétaire général de la FNSEA.
C'est le mistral qui semble avoir permis aux vergers de la Drôme, dans la vallée du Rhône, où des bougies avaient été allumées dans les abricotiers, d'échapper au pire.