Du doudou au porno : quand, en un clic, enfants et ados sont plongés dans la pornographie

"Du porno dans la tête" explore l'évolution de la découverte de la sexualité. Des premiers émois sur catalogue du réalisateur à la pornographie à laquelle les jeunes sont exposés parfois très tôt, le film invite à la réflexion. Si le ton y est léger, le constat est alarmant : au XXIème siècle, les enfants passent du doudou à la pornographie.

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On est loin des pages lingerie du catalogue préféré de leurs aînés, celui que Samuel Ruffier, le réalisateur, nomme son " Everest de l'érotisme ". Tout ça c'est de la vieille dentelle. Aujourd'hui, les jeunes entrent sans préliminaires dans le monde rarement poétique de la pornographie.

Selon l'ARCOM qui régule la communication audiovisuelle et numérique, ils seraient tous les mois, plus de 2 millions de mineurs à fréquenter les sites pornos. Et ça commence tôt, très tôt même puisque dès 12 ans, plus de la moitié des garçons se rend chaque mois sur ces sites. Ils sont près des deux tiers à s'y rendre entre 16 et 17 ans. En moyenne, 12% de l’audience des sites adultes est réalisée par les mineurs.

Ne faites pas cette tête, ce sont les âges auxquels vous piquiez le catalogue de votre grand-mère ! Si internet avait existé...

Effaré et père de trois enfants, le réalisateur du film "Du porno dans la tête" questionne un groupe de jeunes sur l'influence de la pornographie accessible en ligne. Des ados qui ont la chance de pouvoir s'exprimer sur le sujet, dans un atelier sur la sexualité, mené à l'espace jeune de Dieulefit dans la Drôme.

" En primaire un porno, c'est chaud, mais en fin de 6ème c'est bien "

Voilà, tout est dit ou presque... Par accident, par curiosité, "pour faire comme tout le monde",  les ados rencontrés par le réalisateur ont tous consommé du porno. Certains ont été " choqués ", d'autres sont devenus accros, jusqu'à regarder trois films par jour : "En ce moment j'essaie d'arrêter, témoigne un jeune. Depuis trois mois je me suis désabonné de tous les comptes à caractère porno. J'ai arrêté le jour où je me suis demandé pourquoi je le faisais ".

A qui la faute ?

Les conséquences, il n'est pas compliqué de les imaginer. Les jeunes en parlent parfaitement notamment en ce qui concerne l'image entachée de la femme, du rapport domination soumission : "C'est grave, dit une jeune fille, parce que certains pourraient penser que les femmes sont des objets. Donc si tu ne t'en rends pas compte, en grandissant, il y a des mecs qui pensent qu'on peut traiter les filles comme ça ". Et pas que dans les films... Nous sommes entourés d'images plus ou moins suggestives quand elles ne le sont pas complètement.

Cette question-là, qui amène aussi celle du consentement, fait de l'objet de rencontres avec des réalisatrices de films pornos, Olympe de Gê en France et Erika Lust en Espagne, d'acteurs, de sociologue, de philosophe. Ils abordent le consentement, le corps, le fantasme et le consommateur : "N'oublions pas que le consommateur fait partie de l'industrie du porno", rappelle Erika Lust. Et il a le choix, le consommateur : plus de 27 millions de sites sont à disposition sur le Net. Rares sont ceux à nécessiter une carte bancaire pour y accéder.

De l'importance du dialogue

C'est Brigitte Lahaie, ex-star du porno, désormais animatrice radio, qui souligne l'importance du dialogue parents enfants : " Ça dépend de comment l'enfant a été éduqué et d'où il en est dans sa sécurité affective. Bien sûr que les parents ont une responsabilité énorme. C'est à eux de montrer, d'expliquer ce qu'est la relation à deux, l'amour. Ce n'est, je pense, ni à la société, ni à l'école de le faire. Il n'est pas nécessaire de tout dire mais de rappeler les règles de bon sens et de respect ".

Pas moralisateur pour un sou, le film illustre la quête de Samuel Ruffier face aux défis d'une éducation à la sexualité dans un monde saturé d'images explicites, dans une société où l'intimité est en permanence bousculée par l'accès facile aux films classés "X". À travers les interrogations de l'auteur, le film pose la question universelle de la responsabilité des parents et du rôle de la société.

Il faut savoir qu'il n'existe légalement pas en France de définition précise de la pornographie. En revanche plusieurs sites accompagnent les adultes et notamment les parents pour aborder le sujet.

"Du porno dans la tête " de Stéphane Ruffier, une coproduction Mona Lisa production/france télévisions à voir le jeudi 5 décembre à 22h50 sur France 3 Auvergne-Rhône-Alpes. Et d'ores et déjà sur France.tv

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