C'est l'effervescence à la Ferme aux Crocodiles de Pierrelatte. Ce n'est pas tous les jours qu'un parc animalier voit la naissance d'une tortue albinos. C'est même une première dans ce parc de la Drôme. Le petit spécimen est né ce jeudi matin, 23 janvier, à 9h30.
La petite tortue aquatique est sortie de sa coquille ce jeudi matin. Son absence de pigmentation a créé une vraie surprise. Elle n'est pas plus grande qu'une pièce de deux euros, aux dires d'Antoine Soler. Mais elle fait déjà beaucoup parler... et évolue déjà parfaitement dans l'eau.
Naissance rarissime
C’est une tortue à ventre rouge (Emydura subglobosa), une espèce aquatique, originaire des rivières et marécages d’Australie et de Nouvelle-Guinée. Une tortue d'eau douce. Si elle est relativement courante en captivité, la naissance d'un spécimen albinos est "exceptionnelle". "La probabilité d'une naissance de tortue albinos est même extrêmement rare", selon Antoine Soler. Dans ce parc animalier spécialisé de la Drôme, cette naissance est une première. Le responsable scientifique de la Ferme aux Crocodiles, qui ne cache pas son enthousiasme, a tenu à faire part très vite de cette naissance surprise.
Défi zootechnique
À la Ferme aux Crocodiles, ce spécimen dépourvu de pigments aura toute l'attention nécessaire des soigneurs, compte tenu de sa rareté et de sa fragilité. La petite tortue albinos est sensible à la lumière et aux UV.
Elle n'aura pas le droit à la lampe à UV, ni à la lumière trop forte, alors que les tortues adorent ça (...) Cette naissance est un véritable défi zootechnique.
Antoine SolerResponsable scientifique, Ferme aux Crocodiles
Dans la nature, cette proie facile n'aurait d'ailleurs aucune chance de survie. "Les soigneurs veilleront à lui offrir des soins adaptés, tenant compte de ses besoins spécifiques, notamment en matière d’éclairage et de santé visuelle", assure la Ferme aux Crocodiles. "Elle ne peut pas s'exposer à la lumière. Au parc, il y a des moyens d'élevage sans les exposer aux UV", assure le responsable du pôle zoologique animalier du parc.

Nés en même temps que onze autres tortues, "tous auront la même attention et la même surveillance pendant les premiers jours", assure le responsable. Il faudra nourrir ces nouveaux-nés sitôt qu'ils n'auront plus de réserves. En raison de sa particularité biologique, le petit carnivore albinos aura un traitement alimentaire de faveur, avec "complément en vitamine D et calcium déjà assimilable".
Responsabilité
Lézards, tortues, petits serpents... la Ferme aux Crocodiles se voit souvent confier des reptiles par l'administration, des associations, des refuges ou des particuliers. C'est le cas des parents de cette jeune tortue albinos. Si cette dernière ne présente pas un réel intérêt en matière de conservation, elle est toutefois un atout pour le parc.
"Cette tortue est une espèce commune, mais ce spécimen albinos va permettre de parler d'éthique et de bien-être animal. Elle est issue d'un groupe de 15 tortues aquatiques, toutes abandonnées par des particuliers qui les avaient achetés en animalerie. Elles sont arrivées au cours de ces cinq dernières années au parc", explique Antoine Soler, passionné de reptiles.
Cette espèce se trouve facilement en animalerie. Des particuliers n'hésitent pas à les acquérir puis à s'en séparer, parfois dans la nature. Faute de savoir s'en occuper, faute de connaissances ou même simple désintérêt. On se souvient des tortues de Floride. Un véritable engouement, mais un désastre sur le plan de la biodiversité locale. Les individus relâchés dans la nature par des particuliers s'étaient particulièrement bien adaptés, au détriment d'autres espèces. Avec cette naissance, la Ferme aux Crocodiles a saisi l'opportunité de sensibiliser à l’abandon de ces tortues.
Albinisme : trois spécimens rares à Pierrelatte
Cette tortue rejoint ainsi la riche collection de cette réserve tropicale, qui abrite plus de 600 animaux. La Ferme aux Crocodiles dispose aussi de deux autres reptiles albinos : deux alligators. Ces deux reptiles sont arrivés au parc voilà 15 ans, en 2010. C'étaient les premiers de France. Un événement.
Ces alligators femelles affichent toujours une belle santé et ont bien grandi. "Elles font deux mètres et sont présentées au public à tour de rôle. Jamais ensemble", indique le responsable du pôle zoologique. Une rotation qui a lieu environ tous les deux mois. L'une est à l'abri des regards, pendant que l'autre attire les visiteurs. Il s'agit avant tout de préserver leur santé. "Parce que l'éclairage même atténué favorise le développement d'algues vertes sur leur peau, parce qu'on veut économiser leurs yeux fragiles. Mais aussi parce qu'elles ne se supportent pas", assure Antoine Soler. Ces deux alligators sont devenus des sortes de "mascottes" du parc, voire des spécimens "parapluies" qui aident à la préservation des autres espèces de la Ferme aux Crocodiles, selon Antoine Soler qui reprend une expression utilisée en biologie.
La petite tortue albinos pourra bientôt être visible par le public dans la nurserie. Nul doute, elle risque aussi de susciter l'intérêt et la curiosité. Une manière d'attirer l'attention sur les autres missions de la Ferme aux Crocodiles et notamment ses missions pédagogiques.