Législatives 2022. "C'est dommage de perdre autant de terres" : en Isère, le foncier agricole victime de l'urbanisation

REPORTAGE. Direction le pays du Grésivaudan en Isère dans le cadre de notre série spéciale "Législatives 2022". Dans cette vallée proche de Grenoble, les villes s'agrandissent un peu plus chaque année à la faveur du développement des zones résidentielles et commerciales. Principale victime de cette urbanisation galopante : le foncier agricole qui diminue de près de 1 000 hectares par an. Ce qui complique l'installation des jeunes agriculteurs.

"On s'estime heureux, on aurait pu finir à côté d'une autoroute", explique Xavier, genoux à terre, en train de récolter des gousses de petits pois. A la place, ce maraicher s'est installé à Pontcharra, dans la vallée du Grésivaudan, il y a plus de deux ans après sa rencontre avec Hugues, son collègue. Ils ont fondé une ferme bio qui s'étend sur 4 hectares et qui donne sur les pentes ensoleillées des massifs de Belledonne et de la Chartreuse.

Du soleil et de l'eau : ses cultures sont situées autour d'un captage d'eau potable de la commune. Idéal pour développer des cultures biologiques et satisfaire les deux compères. "C'est une belle histoire", reconnait Xavier. Il se souvient de leurs débuts : "Comme pour toute installation, la première étape importante est de trouver du foncier. Surtout pour les profils comme nous, qui ne sommes pas issus de familles d'agriculteurs."

Il y a beaucoup de jeunes agriculteurs, des personnes qui ont fait des formations en agriculture, qui finissent par renoncer à s'installer.

Xavier Robichon, maraîcher à Pontcharra.

"On a pris cette recherche à bras-le-corps, pendant une année à temps plein. Et nous avons eu la chance d'être aidés par différents acteurs", poursuit-il. Mais, dans le milieu, tout le monde n'a pas cette chance. Surtout en Isère, où le foncier agricole fond comme neige au soleil. Entre 2016 et 2020, 867 hectares de terres agricoles ont été perdus en moyenne chaque année dans le département, d'après les chiffres de la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer) en Auvergne-Rhône-Alpes. L'équivalent de près de 1 200 terrains de football perdus chaque année.

Ces terres utilisées jusqu'alors par des agriculteurs, éleveurs ou maraîchers sont revendues au plus offrant. Et, dans bien des cas, elles sont destinées à de nouveaux usages. Elles sont urbanisées, de nouvelles constructions y voient le jour... Ou bien elles sont rachetées par des particuliers à des fins uniquement résidentielles.

Made with Flourish

"Le foncier agricole est sous pression pour différentes raisons, comme la pression de l'urbanisation ou certains modèles économiques. Il y a beaucoup de jeunes agriculteurs, des personnes qui ont fait des formations en agriculture, qui finissent par renoncer à s'installer. Faute de trouver du terrain, indique Xavier. La question de la maîtrise du foncier agricole est fondamentale."

Nous sommes sur une plaine alluviale, il y a un fort potentiel agricole. C'est regrettable que de nouvelles constructions grignotent ces terres.

Jacqueline Rebuffet, élue à la Chambre d'agriculture de l'Isère.

Selon Xavier et Hugues, certains jeunes maraîchers finissent par jeter l'éponge après trois voire quatre ans de recherche. Trop de difficultés, pas assez de terres disponibles, selon eux.

"C'est dommage de perdre autant de terres dans le Grésivaudan. Nous sommes sur une plaine alluviale, il y a un fort potentiel agricole. C'est regrettable que de nouvelles constructions grignotent ces terres", observe Jacqueline Rebuffet, élue à la Chambre d'agriculture de l'Isère.

Du haut de sa ferme située dans le massif de Belledonne, cette exploitante voit le paysage agricole de cette vallée proche de Grenoble, évoluer. Face à l'urbanisation des terres, les collectivités tentent de se défendre avec des PAEN (des périmètres de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains, ndlr).

"A l'échelle de la commune, les PLU (plan local d'urbanisme, ndlr) peuvent déjà protéger les terres agricoles. Les PAEN sont une compétence du département. Ce sont des périmètres de protection des zones agricoles qui ont pour vocation de durer une trentaine d'années", explique Jacqueline Rebuffet. Un projet d'extension du PAEN sur l'ensemble de la communauté de communes du Grésivaudan est en cours, selon l'agricultrice. Mais outre ces plans, le foncier agricole reste en danger : sur les 2 107 hectares nouvellement urbanisés en 2020 à l’échelle régionale, 15 % l’ont été dans le département de l’Isère.

Les propositions des candidats sur le foncier agricole

Cinq candidats aux élections législatives dans la cinquième circonscription de l'Isère, celle du pays du Grésivaudan, ont débattu, ce mercredi 25 mai, sur France 3 Alpes. Voici les positions sur l'agriculture de deux des candidats dans l'ordre de leur intervention lors du débat télévisé :

Florence Jay, candidate de Renaissance : "La Région pourrait accompagner les jeunes maraîchers puisqu'elle a la compétence formation. Il faut accompagner les nouveaux agriculteurs qui s'installent. Il faudrait également un plan d'autonomie alimentaire dans chaque territoire pour soutenir l'économie locale et lutter contre la vie chère."

Enzo Dubois, candidat suppléant du Rassemblement national (le titulaire, Jérôme Santana, a dû décliner l'invitation au débat car positif au Covid-19) : "Le modèle du libre-échange tue l'agriculture en France, comme la concurrence internationale et déloyale. Les produits de nos agriculteurs coûtent trois fois plus cher que les produits venus d'ailleurs. Je pense qu'il faut favoriser les circuits courts, détaxer ces circuits et engager une économie circulaire."

L'intégralité du débat est à retrouver en replay ci-dessous : 

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