Quand le tirage au sort pour l'entrée dans la filière Staps a provoqué des polémiques partout en France, l'université de Grenoble Alpes (UGA) s'enorgueillit, elle, d'accueillir à la rentrée l'ensemble des 1.200 étudiants désireux de suivre ce cursus, grâce à une transformation pédagogique.
Alors que dans de nombreuses universités, des étudiants voulant s'orienter en STAPS ont vu leur demande d'inscription rejetée faute de places, l'université de Grenoble Alpes a pu accueillir grâce à des aménagements pédagogiques tous les étudiants désireux de suivre cette voie.
A Grenoble ou Valence, les deux antennes de l'UGA spécialisées dans ces formations dédiées aux sciences et techniques du sport, les enseignants pratiquent "l'amphi inversé" en première année: "c'est un dispositif numérique qui supprime purement et simplement les cours magistraux en amphithéâtre", explique Henri Benoit, qui était directeur des Staps jusqu'en janvier 2017.
Concrètement, les ressources pédagogiques sont disponibles sur une plateforme internet, accessibles aux étudiants avec des codes personnels. On y trouve le cours magistral enregistré par pastilles de 10 minutes, des diaporamas commentés par le professeur, des vidéos 3D et interactives.
Et surtout, afin de vérifier que l'étudiant acquiert les notions essentielles du cours, des quizz ponctuent le passage d'un chapitre à l'autre.
L'étudiant peut aussi poser des questions sur un forum en ligne, qui servira de trame à des travaux en petits groupes où la présence du professeur sera plus efficace car plus ciblée, notamment sur "ces élèves qui pourraient réussir mais ont besoin d'être accompagnés", selon M. Benoit.
Enfin, ce dispositif permet de voir si les élèves se sont connectés, ont tenté les quizz et leurs résultats. Et si un élève ne se connecte jamais, "on lui envoie un mail pour lui dire de travailler parce que le prochain examen du contrôle continu est la semaine suivante", raconte M. Benoit.
L'idée de cette "transformation pédagogique radicale" - qui ne s'est pas faite sans certaines réticences - est née de la "crise" de 2014 : "c'était l'époque des premiers tirages au sort contre lesquels nous étions farouchement opposés".
Que faire pour absorber une population estudiantine doublée en cinq ans en 1ère année à moyens humains constants et sans extension de salles devenues trop petites ?
"On n'est pas parti de rien parce que les cursus de médecine à l'UGA avaient déjà mis en place cette pédagogie inversée depuis 2006 et avec succès".
Les professeurs volontaires n'ont eu que les deux mois de l'été 2014 pour créer les ressources numériques,
"C'était très artisanal et depuis nous les avons améliorées", assure M. Benoit - mais la rentrée n'a laissé aucun étudiant sur le carreau.
Les résultats ont l'air de conforter cette révolution: le taux de réussite (passage en 2e année de licence) est passé de 39% à 48%. Et le taux de décrocheurs a chuté de 45% à 28%, selon M. Benoit, devenu vice-président de l'UGA chargé des systèmes d'information et du numérique.