Jeudi 24 avril, une délégation du gouvernement népalais a entamé des discussions avec des sherpas en colère au camp de base de l'Everest, pour désamorcer la crise déclenchée par l'avalanche meurtrière qui a tué 16 de leurs collègues.
Ces négociations interviennent alors que trois nouvelles agences d'alpinisme ont annulé leur expédition vers le plus haut sommet du monde pour des raisons de sécurité, mais aussi par crainte de violences sur le camp de base.
"Notre équipe au camp de base nous informe que la réunion entre les guides et les responsables gouvernementaux a commencé, les discussions sont en cours", a dit Badri Bikram Thpa, un responsable policier.
Des sherpas, anéantis par la mort de leurs 16 collègues vendredi, et en colère contre la faiblesse des indemnisations proposées, avaient annoncé mardi qu'ils renonçaient à toute ascension du plus haut sommet du monde cette saison. Le gouvernement tente depuis de trouver un terrain d'entente pour qu'ils reprennent le travail en dépit de la multiplication des annulations d'expéditions.
L'agence américaine International Mountain Guides, a estimé mercredi soir que la voie passant par la cascade glacière Khumbu, où les sherpas ont été ensevelis, était trop dangereuse pour envisager une expédition. "La traversée de la cascade glacière est actuellement trop dangereuse pour être réalisée sans aménagements par les 'icefall doctors' (ces guides spécialisés qui posent échelles et cordes fixes) et qui ne pourront reprendre leur travail cette saison", a estimé IMG dans un communiqué.
De son côté, l'agence américain RMI Expeditions a aussi annulé son expédition en raison "de risques dépassant les possibilités de succès".
Peak Freaks, dirigé par l'alpiniste canadien Tim Rippel, a estimé que "la voie, d'un point de vue professionnel, n'est PAS sure", estimant fort le risque de nouvelle avalanche.
"En outre, plus de 300 sherpas ont mis leurs noms sur une liste de protestation pour décider de ne pas grimper par respect pour les victimes. Pourquoi ne devrions-nous pas les écouter?", ajoute-t-il sur internet.
Décrivant une atmosphère tendue au camp de base, il a indiqué que les sherpas voulant mettre fin à la saison menaçaient de violences ceux qui voulaient continuer. Des agences d'alpinisme et des représentants des autorités font en outre pression sur les guides népalais pour qu'ils continuent la saison, a-t-il ajouté. "C'est vraiment le bazar (...) Maintenant que nous avons l'armée, la police et des sherpas en colère sur le camp de base, il est temps de partir", écrit-il.
Les pertes financières
L'alpiniste australien Gavin Turner a confirmé la fracture entre sherpas. "Des factions se sont créées et un groupe de jeunes sherpas dit, en gros, que si des guides remontent à la cascade glacière pour reprendre le travail, leur sécurité ne sera pas garantie", a-t-il dit.
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"Nous ne prendrons une décision qu'une fois que j'aurai rencontré mes sherpas et le gouvernement pour évaluer les conditions sur la montagne", a dit pour sa part l'alpiniste néo-zélandais, Russell Brice, qui possède l'agence Himex. Trois autres agences avaient déjà annoncé leur retrait depuis l'avalanche.
Les propositions d'indemnisation du gouvernement et de couverture d'assurance n'ont jusque-là pas convaincu les sherpas. Les autorités de Katmandou veulent éviter une fin prématurée de la saison sur l'Everest qui occasionnerait d'importantes pertes financières et en termes d'image pour le Népal.
L'avalanche a mis en lumière les risques pris par ces guides qui transportent les tentes, apportent l'approvisionnement, réparent les échelles et fixent des cordes pour aider les alpinistes étrangers à atteindre le sommet de 8.848 mètres.
Les sherpas, du nom d'un groupe ethnique connu pour son aptitude aux métiers de la montagne, gagnent entre 3.000 et 6.000 dollars par saison mais sont mal couverts par leur assurance.
Plus de 300 personnes, essentiellement des sherpas, sont morts sur les pentes du plus haut sommet du monde depuis la première ascension en 1953 par Edmund Hillary et Tenzing Norgay.