“Jouer à Clermont-Ferrand c’est magique. C'est mon berceau” confie Mounir Margoum, comédien qui brille à Paris

Jusqu’au 3 juin, Mounir Margoum est à l’affiche du théâtre de l’Odéon, à Paris, dans “Antoine et Cléopâtre”. Sur scène, le comédien fait une prestation unanimement saluée par la critique. Il nous raconte son enfance à Clermont-Ferrand, là où son amour du théâtre est né.

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Une voix suave et posée, des mots choisis qui résonnent. Une interview de Mounir Margoum fait partie des moments qui vous marquent. Jusqu’au 3 juin, le comédien joue le rôle-titre dans la pièce “Antoine et Cléopâtre” de Shakespeare. La mise en scène de Célie Pauthe au théâtre de l’Odéon, à Paris, est remarquée, mais surtout le jeu de Mounir Margoum. Pour le comédien de 45 ans, tout a commencé en Auvergne. Il raconte : “Je suis né à Clermont-Ferrand. J’ai grandi dans la ZUP et ensuite à Croix-de-Neyrat. Mes parents ont déménagé quand je devais avoir 7-8 ans et j’ai alors habité à Lempdes. J'y ai vécu jusqu’à mes 20 ans. Mes souvenirs d’enfance sont joyeux, avec des amitiés très fortes que je garde encore. C’est associé à ma famille, à l’école, le basket, le judo, les volcans. Je suis très ému de les retrouver à chaque fois que je reviens. Quand je revois le puy de Dôme, en train ou en voiture, il y a tout de suite un attachement de cœur avec cette région. Dès que je peux, j’y retourne. Mes parents sont d’origine marocaine et sont arrivés en France dans les années 70”.  

Des études prestigieuses à Centrale

Troisième enfant d’une fratrie de neuf frères et sœurs, il a fait de brillantes études : “J’ai fait ma prépa au lycée Lafayette à Clermont-Ferrand, en maths sup et maths spé. Ensuite je suis rentré à l’école Centrale de Lyon et où je suis resté trois ans”. Mounir Margoum explique comment sa passion du jeu est née : “Cet amour du théâtre est venu par une professeure de français que j’avais en classe de sixième. Je devais réciter une poésie en cours. J'étais tellement timide que ma première poésie, j’ai regardé le plafond et je l’ai récitée très vite. Elle m’a encouragé et m’a dit de regarder mes camarades la prochaine fois. De retour chez moi, pour la poésie d’après, je me suis mis à la jouer devant ma glace. Je me suis retrouvé en classe et j’ai commencé à jouer la poésie. A la première phrase, la classe a explosé de rire. Je me suis demandé si je devais m’arrêter et en fait j’ai continué. Je suis allé au bout de ma poésie. Là-dessus la classe a applaudi. Ma professeure de français m’a encouragé. C'est le premier souvenir de théâtre que j’ai. A partir de là, on a fait des piécettes avec ma prof”.

L'amour du jeu

A partir de là, l’amour de la scène grandit :  “J’ai eu un autre intervenant, qui dirigeait la compagnie Athala à Lempdes. Je me suis mis à jouer des spectacles. On partait ensemble jouer dans des villages. Ca a été un vrai bonheur. Ca a duré de la troisième à la prépa”. Mais le jeune Mounir Margoum ne songe pas à devenir comédien. Il souligne : “Je n’imaginais pas du tout en faire un métier. Pour moi les études marchaient bien. Issu de l’immigration, a priori ce n’était pas légitime pour moi. J'étais loin d’imaginer cela. C’est une fois arrivé à Centrale que je me suis mis à refaire du théâtre. Il y a eu un festival étudiant à Sophia-Antipolis, et j’ai reçu un prix d’interprétation. Il y avait un jury de professionnels et l’un d’eux m’a demandé si j’avais pensé en faire un métier. Cela m’a fait rire. Je lui ai répondu que j’étais ingénieur. Je suis reparti et je me suis demandé pourquoi j’avais ri, pourquoi ça m’avait semblé aussi absurde. Je me suis rendu compte que de par mes origines et mon parcours social, je n’avais même pas rêvé la possibilité de faire ce métier. A partir de là, j’ai passé ma dernière année à Centrale, j’ai fait beaucoup de théâtre. J'ai décroché mon diplôme. Je l’ai donné à ma mère. Je lui ai dit que j’allais prendre une année sabbatique. Je m’attendais à ce qu’elle me dise que j’étais fou de vouloir faire du théâtre. Elle m’a répondu qu’on m’avait emmené où je devais aller et que maintenant je devais être heureux”.

Heureux sur les planches

Aujourd’hui, le théâtre est devenu une évidence : “Vingt ans après, cette année sabbatique a duré. Je suis monté à Paris. J'ai pris des cours à Chaillot. L’année d’après je suis rentré au conservatoire national d’art dramatique. C'est devenu une évidence. La première fois que j’ai mis les pieds sur scène, il s’est passé quelque chose, de manière intérieure. Mais je ne l’ai jamais conscientisé. C'est un endroit où j’ai toujours eu plaisir à aller : c’était un endroit de liberté. J’ai pris conscience que ça me rendait profondément heureux”. Le comédien détaille les rencontres qui ont été capitales pour lui : “Denis Podalydès, en troisième année de conservatoire, a été une forme de mentor pour moi. Il m’a révélé la possibilité du jeu. Jean-Louis Martinelli, qui a dirigé le théâtre des Amandiers, a aussi beaucoup compté. Il y aussi des metteurs en scènce comme Arthur Nauzyciel, Franck Castorf et Célie Pauthe qui m’ont offert des rôles importants”.

Libre sur scène

L’acteur rappelle ce qui lui plaît tant sur scène : “Ce qui m’anime, je pense, c’est qu’il y a quelque chose de l’ordre du groupe qui me plaît beaucoup. C'est un endroit de liberté, un endroit où on peut exprimer des choses. Dans la vie, j’exprime moins de choses que sur scène. C’est un endroit d’exploration de soi. Au cinéma, c’est différent. J’ai tourné sur des choses assez chouettes en France et avec des anglo-saxons. Au théâtre on montre et au cinéma on cache. C’est la caméra qui vient chercher”. Au cinéma, il a fait des apparitions dans des productions anglo-saxonnes telles que “Détention secrète” en 2008 ou “Le Cinquième Pouvoir” en 2013. En France, il interprète des rôles secondaires dans “Trois mondes” de Catherine Corsini et “L'Ombre des femmes” de Philippe Garrel, avant de jouer le premier rôle masculin dans “Par accident”de Camille Fontaine, auprès de Hafsia Herzi et Emilie Dequenne, un rôle qui lui vaut un prix du public au Festival Jean Carmet de Moulins Il a joué également dans “Divines”, de Uda Benyamina, qui a obtenu la caméra d'or au Festival de Cannes 2016.

Le rôle d'Antoine

Cette pièce qu’il joue actuellement le ravit : “L’auteur est Shakespeare, donc c’est absolument magnifique. C’est un poncif mais c’est une langue sublime. Il fait partie des grands auteurs comme Racine, Molière, Tchekhov. Le rôle d’Antoine est magnifique : une grande figure de l’histoire qui est en même temps passionnée et prise sans cesse entre deux feux, entre la passion et l’honneur”. Mounir Margoum confie au sujet d’Antoine : “C’est quelqu’un qui a fait un pont, entre deux rives de la Méditerranée. Cette pièce est une histoire entre Orient et Occident. Le pont dans l’amour aurait pu exister, par le mariage. Mais Octave ayant gagné, il a choisi qu’un côté de la Méditerranée devait dominer l’autre. Aujourd’hui cette histoire est encore prégnante, entre ces deux rives qui s’attirent et se repoussent. ".

Rapprocher les deux rives

Le comédien aime rappeler pourquoi il n'est pas cantonné à un certain type de personnage :" J'ai réussi à tomber, notamment au théâtre, sur des personnalités intelligentes qui à un moment ont dépassé ces clivages. Je suis très content de pouvoir jouer un Mokhtar par exemple, un Mohamed, parce que je ne veux pas du tout effacer mon identité. Mais je suis tout aussi content de jouer Antoine ou de jouer Hippolyte. Simplement, pour moi, il y a quelque chose qui est de l'ordre de la catharsis. Au théâtre notamment ou dans les rôles, de manière générale, le public vient s'identifier d'une certaine manière à une personne et à un rôle. Puis les mots priment. En jouant dans Antoine et Cléopâtre, personne ne m'a jamais dit “Ah tiens, c'est marrant, Antoine est joué par un quelqu'un d'origine maghrébine et Cléopâtre est joué par quelqu'un d'origine française", parce qu’en même temps ce n'est pas le propos. Par contre, le rapprochement des deux rives, c'est le propos”. Pour le moment, il n’a pas prévu de revenir sur scène en Auvergne mais le comédien conclut : “Jouer à Clermont-Ferrand c’est magique. C'est mon berceau. C’est une boucle. Revenir là-bas c’est retrouver le terreau, la magie où tout est venu. C'est quelque chose que je n’explique toujours pas. Je suis déjà venu jouer à la Comédie”. Voir jouer Mounir Margoum à Clermont-Ferrand, c’est tout ce que l’on peut espérer, afin de capter cette présence sur les planches qui séduit tant de metteurs en scène et de spectateurs.

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