Insécurité, délinquance, vols, violences : ce que veulent vraiment dire les chiffres du ministère de l'Intérieur

Le ministère de l'Intérieur a publié son rapport sur l'insécurité et la délinquance en 2024. De nombreux chiffres sont en hausse, mais ils sont à prendre avec précaution selon un spécialiste de la sécurité.

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Les chiffres publiés par le ministère de l'Intérieur, dans son rapport 2024 sur l'insécurité et la délinquance, ont de quoi inquiéter dans le Rhône. Le nombre de victimes d'homicides (27) et de tentatives d'homicides (100) est en forte hausse dans le département : respectivement +42,1 % et + 35,1 % par rapport à 2023.

Mais selon Sébastian Roché, directeur de recherches au CNRS / Sciences Po Grenoble, ces chiffres sont à prendre avec précaution : "D'un point de vue statistique, c'est comme les chutes d'avions : il y en a peu et leurs variations sont très difficiles à expliquer. Ce sont des événements singuliers qui produisent ces variations locales." Car, selon lui, nous sommes en France "à des niveaux qui sont historiquement les plus bas. [Ces chiffres] ne reflètent pas du tout une tendance nationale qui est plutôt une stabilité depuis plus d'une dizaine d'années", assure-t-il.

L'étude montre, par ailleurs, un nombre important de vols d'accessoires dans les véhicules : il s'établit à 5108 actes, correspondant à une hausse de 20,4 % sur un an. En revanche, le nombre de vols de véhicules est en baisse (-6,3 %). Mais avec un taux de 3,1 vols ‰ habitants, le Rhône se situe au-dessus de la région (2,3 ‰) et de la moyenne française (2 ‰).

Augmentation des plaintes pour violences sexuelles

L'étude révèle également que les violences sexuelles ont augmenté de 15,6 % dans le Rhône depuis 2016. Pourtant, "les enquêtes de victimation montrent que les femmes victimes de violences sexuelles n'étaient pas plus nombreuses depuis 2006."

Cette forte augmentation dont fait état le rapport du ministère de l'Intérieur reflète en fait une libération de la parole des femmes, accompagnée de "plus de préoccupation des pouvoirs publics et de la société" pour ces sujets. Et donc une meilleure prise en compte de la part des forces de l'ordre des violences sexuelles : "Les femmes portent plainte, et les policiers acceptent plus volontiers de les enregistrer", note le chercheur.

Escroqueries et cambriolages en hausse

Le nombre de victimes d'escroqueries augmente également dans le Rhône : +8,2 %. Avec un taux de 7,8 ‰ habitants, le département se situe encore au-dessus des moyennes régionale (6,3 ‰) et nationale (6 ‰).

Le département se démarque aussi par une hausse significative du nombre de cambriolages de logements en 2024 : +8,3 % alors même que la tendance est à la baisse depuis 2016 (-2,3 %). Avec un taux de 8,6 ‰ habitants, le département se place une fois de plus au-dessus de la région (6,8 ‰) et du pays (5,9 ‰).

Trafic de stupéfiants et vols avec armes en baisse

Autre fait marquant : le nombre de mis en cause pour trafic de stupéfiant baisse de 4,4 % en un an, même s'il est en augmentation depuis 2016 (+11,2 %). Les chiffres du ministère de l'Intérieur nous apprennent en revanche que le nombre de consommateurs augmente sur un an (+13,2 %). Cela représente un taux de 5,2 ‰ habitants, au-delà des moyennes régionale (3,9 ‰) et nationale (4,2 ‰). Mais selon Sébastian Roché, ces statistiques ne sont "pas fiables" car elles mesurent plutôt l'activité des services de police en fonction des directives qui leur sont données : "Si Premier Ministre dit que les stupéfiants sont un sujet d'importants, les policiers et gendarmes vont faire plus de contrôles de stupéfiants et vont trouver plus d'infractions", explique le directeur de recherche CNRS / Sciences Po Grenoble.

Pour mesurer l'évolution du marché de la cocaïne, "les statistiques fiables [sont celles] de l'OFDT [Observatoire français des drogues et des tendances addictives] qui va dénombrer les usagers. Lorsqu'il y a beaucoup d'usagers, cela signifie qu'il y a beaucoup de cocaïne en circulation. Le deuxième indicateur est le prix du gramme : s'il est très faible, comme c'est le cas aujourd'hui, cela signifie que le commerce est florissant : c'est en baissant le prix d'un produit qu'on va en vendre beaucoup", note le chercheur.

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