En France, le nombre de colis livrés s'élève à 1,4 milliards en 2020. Une entreprise, née à Lyon, a eu l'idée de faciliter leur acheminement en proposant à votre voisin.e de recevoir la livraison en votre absence, en étant rémunéré. Welco souhaite également une livraison plus éthique.
Qui n'a pas déjà vécu cette déconvenue ? Vous réservez une journée pour recevoir un colis... et au final le livreur ne vient pas le jour prévu. Votre colis sera finalement déposé dans un point-relais situé à l'autre bout de la ville. Ou, pire, renvoyé à l'expéditeur. Et vous voilà embarqué.e dans un processus compliqué et chronophage pour tenter de le récupérer. La jeune entreprise Welco, basée dans le 5ème arrondissement de Lyon, a peut-être trouvé la solution pour soulager les clients, comme les livreurs. Et, au passage, participer à l'amélioration du lien social entre les habitants.
Romain Barraud, 28 ans, ardèchois, a fondé sa start-up avec son associé Mathieu Mazoyer, en partant de ce type d'expérience. "J'ai rejoint Lyon à l'âge de 18 ans pour suivre des cours en école de commerce", raconte-t-il. Un soir très pluvieux de décembre 2016, de retour de sa formation, il tombe sur un facteur de la Poste. L'entreprise publique testait alors la livraison en soirée. "Il m'interpelle et me demande si je veux bien récupérer le colis d'une voisine, qu'il a essayé de livrer déjà quatre fois. Elle est restauratrice et souvent absente pour son travail. Je récupère donc le colis, qui reste plusieurs jours chez moi." explique Romain. Informée, la voisine finit par venir récupérer le paquet. "Elle me tombait presque dans les bras. Simplement en étant là au bon moment, je venais de changer une frustration en satisfaction. L'idée m'est venue d'en faire quelquechose de plus durable", se souvient-il.
Une communauté de "welkers"
Welco est donc née et a créé son application pour référencer les personnes prêtes à réceptionner chez elles les colis, en étant rémunérées. "En fait, on a toujours un.e voisin.e disponible en journée mais, sans cette appli, on ne le sait pas." résume Romain. Ces personnes, lorsqu'elles s'inscrivent gratuitement sur cette application, deviennent des "welkers". Elles y laissent leur adresse et peuvent tenir à jour le calendrier de leurs disponibilités. Welco se charge de mettre en relation les livreurs avec ces "welkers" : au moment de son achat, lorsqu'il détermine ses choix de livraison, le client peut tout simplement choisir l'option (au même titre que les points-relais, par exemple). Et ça marche : la start-up revendique déjà 13 000 abonné.e.s "welkers". "On les rémunère jusqu'à un euro par colis", ajoute Romain Barraud.
Une appli qui recrée du lien social
Cette nouvelle version du point-relais traditionnel a convaincu des retraité.e.s, des étudiant.e.s, demandeur.e.s d'emploi et indépendant.e.s... "et surtout des personnes en télétravail, ce qui a fortement augmenté la taille de notre communauté, pendant le confinement " confirme Romain. Une communauté qui obtient, par ce biais, un petit complément de revenus et qui participe à un effet supplémentaire : ajouter du lien social. "On a, parmi nos abonné.e.s, des témoignages d'étudiant.e.s, par exemple, ravis de pouvoir jouer ce rôle qui leur permet de rencontrer des gens".
L'ambition d'un système de livraison plus vertueux
L'ambition de l'équipe de cette start-up ne s'arrête pas là. Elle souhaite participer à une évolution plus éthique de la livraison en France. "Au-delà des services de livraison traditionnels, nous nous mettons en relation aussi directement avec les commerçants qui vendent en ligne. L'idée est de leur donner la possibilité de choisir un mode vertueux." explique Romain "Les consommateurs ont pris l'habitude de penser que la livraison est gratuite. C'est faux. La chaîne de la livraison nécessite d'urgence un gros travail de revalorisation. Aujourd'hui, ce sont des centaines de milliers de chauffeurs-livreurs sous-traitants, pressés comme des citrons par certaines grosses sociétés de transport." Les fondateurs de Welco estiment qu'il faut rétablir de la transparence et responsabiliser les consommateurs. "Si on y parvient, au bout de la chaîne, le chauffeur ne livrera plus 200 colis par jour mais 80, pourra prendre une vraie pause pour déjeuner, et sera rémunéré au juste prix".
Pour atteindre cet objectif, Romain imagine d'inverser le système en commençant par donner aux clients la possibilité de choisir un mode de livraison respectueux, quitte à participer davantage à son financement. "Le consommateur déciderait lui-même de la somme qu'il compte investir dans la livraison de son colis, pour s'assurer de participer à ce mode vertueux. C'est un peu notre ADN, de tendre vers cet objectif." assure Romain.
A Lyon, "Ma livraison Zen" encourage cette démarche éthique
Des aspirations éthiques et durables qui correspondent parfaitement à la politique menée par la majorité écologiste à Lyon. En effet, la Ville de Lyon et LPA (Le Parc auto) viennent de s’engager avec « ma livraison zéro émission nette (ZEN) » en faveur de la logistique décarbonée pour accompagner les activités économiques vers une évolution au bénéfice de leurs clients et de l’environnement.
« Ma livraison ZEN » est donc une démarche qui permet la connaissance des solutions logistiques propres entre professionnels et particuliers. Mais cette logistique zéro émission nette ne s’attache pas qu’aux modes de transports : "Elle met l’humain au cœur de la démarche en valorisant les professionnels de la livraison qui offrent des conditions de travail justes et reconnaissent la nécessité d’assurer une protection sociale à tous les actifs de la profession. Au-delà, cette mise en visibilité d’une offre logistique différente permet aussi à nos concitoyens de prendre une part active dans la transition écologique en les incitant à valoriser les acteurs qui privilégient ces services." explique la mairie. A Lyon, les fondateurs de Welco, qui adhèrent à cette philosophie, sont également partenaires de LPA.