Le "Mondial de l'Auto" vient d'ouvrir ses portes à Paris. Le salon se tourne désormais vers les véhicules moins énergivores. Pour les amateurs de voitures anciennes comme les Youngtimers, quel avenir ? Le marché est loin de battre de l'aile. Il est même florissant selon un professionnel installé aux portes de Lyon.
Elles sont anciennes, mais pas trop ! Elles ont plus de 20 ans mais moins de 30 ans. Ce sont les Youngtimers. Elles font souvent tourner les têtes dans la rue. Golf cabriolet, 205 GTI, BMW E30, Alfa 156 GTA ou encore Porsche 911... Ces automobiles sont en fait "de jeunes vieilles", selon la formule de Nicolas Dumont, spécialiste installé depuis une dizaine d'années à Saint-Priest.
Mais de quoi parle-t-on ?
Dans la catégorie Youngtimers, on trouve tous types de véhicules : coupés, sportives, cabriolets, familiales, berlines, roadster et même plus récemment des breaks. Ces véhicules n'ont pas encore basculé dans la catégorie "collection", ce qui explique parfois leurs prix accessibles. Pour être considéré modèle de collection, une voiture doit avoir 30 ans et plus, et ne plus être fabriquée.
ZFE, Crit'Air... les Youngtimers sont-elles menacées?
Dans la Métropole lyonnaise, à partir de septembre 2026, seuls pourront circuler les véhicules "propres". Alors ces jeunes "vieilles" automobiles sont-elles compatibles avec la ZFE, Zone à Faible Emission, instaurée à Lyon et ses alentours ? Comment ces voitures d'anciennes générations, parfois gourmandes en carburant, vont-elles survivre à la fin annoncée de l'essence ou diesel ? Sont-elles vouées à finir la casse ? Nicolas Dumont n'est pas vraiment inquiet.
"Pour les véhicules de plus de 30 ans, il y a possibilité avec une vignette de circuler dans la ZFE. C'est de nature à calmer les inquiétudes des clients", explique-t-il. Depuis le 1er septembre 2022, les vignettes "Crit'Air 5 et non classés" sont interdites de circulation dans un périmètre proche du centre de Lyon. Ainsi toutes les voitures diesel qui ont plus de 20 ans (immatriculées avant le 1er janvier 2001) et les essences, qui ont plus de 23 ans (immatriculées avant le 1er janvier 1997) sont bannies.
Il faut être honnête, quand on conduit ce type de voiture, ce n'est pas pour aller en Presqu'île de Lyon
Nicolas Dumont,spécialiste de Youngtimers
"Concernant la vignette Crit'Air, les Youngtimers restent hélas "à la porte". Mais les pics de pollution ne sont pas encore notre quotidien" assure Nicolas Dumont. "On est également à la limite concernant la ZFE. Mais il faut être honnête, quand on conduit ce type de voiture, ce n'est pas pour aller en Presqu'île de Lyon", assure le puriste.
Les Youngtimers, ce sont des voitures plaisir. Il y a le bruit du moteur, les odeurs, les matériaux, le cuir, la mécanique, la qualité de la fabrication... C'est une madeleine de Proust. Les voitures d'aujourd'hui sont sans saveur ! Il manque le bruit du moteur, les odeurs d'essence.
Nicolas DumontSpécialiste Youngtimers - Voitures Vintage
La vignette Crit'Air ne serait donc pas le premier frein à l'achat pour ces passionnés. Les acquéreurs de Yountimers sont plutôt des amoureux qui veulent faire partie de clubs proposant des sorties en France ou à l'étranger. Exit un usage quotidien pour la grande majorité d'entre eux, selon le professionnel. Même si les acheteurs "petits budgets" constituent aussi une part non négligeable de la clientèle.
Un marché au beau fixe
Ce sont surtout les quadras et quinquas qui raffolent de ces véhicules anciens. C'est même un marché au beau fixe. Depuis plus d'une dizaine d'années, il prend même le contrepied du véhicule électrique. Et les acheteurs sont souvent des passionnés à la recherche de véhicules "plaisir". Ces voitures datent souvent des années 80 - 90. "Elles rappellent une période où tout était possible. Ce sont aussi des automobiles qui nous faisaient rêver et que l'on n'avait pas les moyens d'acheter à l'époque", explique le spécialiste saint-priot. Pour lui, le marché de la Youngtimer est toujours "très dynamique". Des voitures qui ont encore de beaux jours devant elles.
La passion pour les véhicules anciens est donc loin de régresser malgré les contraintes et restrictions mises progressivement en place. On assiste même depuis 2010 à l'essor d'une nouvelle génération de collectionneurs, davantage tournée vers des véhicules plus récents. Ces "jeunes anciennes" voitures, autrefois délaissées, sont devenues des collectors, parfois hors de prix.
Elle grimpe la cote, elle grimpe ...
Preuve de cet engouement : le large éventail de prix. C'est parfois le grand écart : "on peut s'engager sur une voiture à 500 euros mais on est assuré de faire le plein de galère", ironise Nicolas Dumont. Certains modèles très rares vont parfois atteindre des sommets, "mais les prix montent rarement au-dessus de 120 ou 150 000 euros. On est plutôt sur des prix inférieurs à 60 000 euros", assure l'expert.
Une question de coup de cœur mais aussi de rareté. Le spécialiste a parmi ses clients de nombreux collectionneurs, alors il relativise : "les Youngtimers ne concernent pas forcément une clientèle peu fortunée. Mais aujourd'hui on a de plus en plus de jeunes qui s'offrent une voiture à moins de 5000 euros qui, ensuite, vont l'améliorer". Le responsable de Voitures Vintage sera présent au salon Epoqu'Auto de Lyon, début novembre. Un rendez-vous qui attire depuis 1979 des milliers d'amateurs. L'an dernier, pas moins de 82 000 visiteurs ont arpenté les allées du salon.
Solution électrique ...
Si ces belles rétros ont aujourd'hui le vent en poupe, on l'a bien compris, c'est aussi parce qu'elles font rêver leurs propriétaires. Mais pas seulement . "Ce sont aussi des voitures qui répondent aux usages du quotidien. Elles sont confortables et répondent aux normes de sécurité", assure le spécialiste.
Et en terme de consommation ? C'est un peu le point noir de certains de ces bolides d'antan, même lorsque le moteur est bien réglé. "Elles ne sont pas économiques mais pour faire 3000 km par an ..." Pourquoi ne pas équiper ces youngtimers à l'électrique ? Une fausse bonne idée pour le puriste.
La fin du carburant pourrait alors signer l'arrêt de mort de ces belles rétros. Après avoir incité les automobilistes à acquérir des motorisations diesel pendant des décennies, les pouvoirs publics semblent aujourd'hui bien décidés à orienter les consommateurs vers les véhicules électriques réputés propres. Pour preuve, Emmanuel Macron vient d'annoncer le passage du bonus écologique pour l'achat d'un véhicule électrique de 6000 à 7000 euros. Une mesure qui concerne la moitié des ménages les plus modestes.
- A ce jour, en Auvergne Rhône-Alpes, les voitures qui roulent au gazole ou à l'essence sont encore légion : près de 4,7 millions de véhicules roulent encore aux énergies fossiles. La part de voitures électriques dans la région est anecdotique.
L'échéance 2035 : même pas peur
Nicolas Dumont est-il inquiet de ce virage ? Pas vraiment. Et l'échéance de 2035 ne lui fait pas peur. A partir de cette date, il ne sera plus possible de mettre sur le marché de l'UE des voitures ou camionnettes équipées d'un moteur à combustion interne. "L'électrique, ce n'est pas la solution et en plus les infrastructures ne sont pas au point", évoquant notamment la question des bornes de recharge des batteries électriques et de leur faible densité sur le territoire.
- Malgré l'instauration de trois Zones à Faibles Emissions en Auvergne Rhône-Alpes (Lyon, Grenoble et Saint-Etienne), la région est encore loin d'être bonne élève en terme de densité des bornes électriques accessible au public.
Je n'ai pas envie de mettre 2 ou 3 jours pour faire un trajet de 800 km. Il n'y a plus de plaisir à se déplacer.
Nicolas DumontVoitures Vintage (Saint-Priest)
Et l'argument propreté, Nicolas Dumont relative aussi : "d'après une étude de l'ADEME, l'électrique est plus propre que le thermique mais sur de courts trajets seulement ! On peut aussi s'interroger sur l'empreinte carbone d'un SUV dernière génération de 2 tonnes et d'une Youngtimer de 900 kg".
Dans cette étude, l'ADEME indique en effet que "la voiture électrique ne remplacera pas le véhicule thermique sur tous ses usages", s'appuyant sur le fait qu' "actuellement, l’offre industrielle de véhicules électriques répond aux besoins du quotidien mais ne répond pas de manière satisfaisante aux besoins de grands déplacements". D'autres solutions sont à étudier selon l'Agence de la Transition Ecologique. Remplacer son véhicule thermique par un véhicule électrique est donc loin d'être acquis.
D'autant que pour Nicolas Dumont, les voitures anciennes ont l'avantage d'être déjà fabriquées, en état de marche et souvent bien entretenues. Un avantage écologique indéniable selon lui, par rapport aux véhicules électriques, pas encore sortis d'usine.