Depuis le 26 octobre dernier, la Maison de la danse de Lyon accueille des ateliers de danse pour personnes en situation de handicaps visuels. Les participants reproduisent les mouvements faits par les danseurs sur scène, pour apprendre à ressentir le spectacle au-delà de l'audiodescription.
Peu à peu, les corps se relâchent et se déploient au rythme de la musique. Ce jour-là, ils sont une petite dizaine de personnes à participer à cet atelier un peu particulier à la Maison de la danse de Lyon. Tous sont en situation de handicaps visuels. S’ils suivent d’ordinaire des spectacles en audiodescription, ils apprennent désormais à reproduire les mouvements des danseurs. Une manière de s'approprier le spectacle.
"Un spectacle de danse est éminemment visuel. J'ai toujours un tout petit peu vu, mais pas suffisamment pour percevoir ce que représentent les mouvements de la danse. Pouvoir l'expérimenter au travers d’ateliers était pour moi une opportunité en or" témoigne Lise Wagner. Sur scène, elle s’est même surprise à courir "pour ressentir la détente des jambes, le centre de gravité du corps".
Guidés par la voix, les corps occupent l’espace, esquissent des mouvements, épousent la musique. L’objectif est de sensibiliser les participants à l’art chorégraphique, et les préparer à découvrir l’audiodescription du spectacle.
Cela permet de réimaginer le corps en mouvement, se laisser prendre dans la musique, se laisser embarquer dans un spectacle. Pouvoir ressentir des mouvements réalisés par des danseurs
Diane Fey, participante à l'atelier
Diane a pratiqué la danse pendant plusieurs années, avant que cela ne devienne de plus en plus compliqué avec la perte de sa vision. "Cet atelier me permet d’être dans des groupes adaptés au handicap. Ça m’a apporté de retrouver une liberté dans le mouvement, ce qui est très beau".
Rendre la culture accessible à tous
L’initiative mêle la médiation à la pratique, articulée en lien avec le spectacle Danses non humaines du chorégraphe Jérôme Bel et de l’historienne de l’art Estelle Zhong Mengual, qui sera présenté en audiodescription le 11 décembre à la Maison de la danse. Tout au long de l’atelier, Valérie Castan accompagne les mouvements par l’audiodescription. "L’idée est de mettre en regard comment je décris le mouvement et comment il est interprété par les personnes concernées" explique l’artiste chorégraphique audiodescriptrice. "Cela permet quelque part de traverser physiquement ce qu’on va entendre en audio description", précise-t-elle, soulignant qu’il est fatiguant d’imaginer du mouvement sans avoir pu le ressentir.
"Ce projet s'inscrit dans la perspective du droit à la culture pour tous. On faisait de l’audiodescription depuis plusieurs années, puis on s’est dit comment emmener ces publics plus loin ? explique Ghislaine Hamid-Le Sergent de la Maison de la danse, "le challenge était alors de les faire danser".
Mercredi prochain tous les stagiaires assisteront au spectacle de Jérome Bel à la Maison de la danse avec une acuité qu’ils seront seuls à partager.