Le restaurateur, très médiatisé, de la Vallée du Cusancin dans le Doubs ne veut pas "crever" dit-il. Alors il rouvrira son établissement le 1er février 2021. Il a lancé ce mot d'ordre à tous ses collègues et son rendez-vous jeudi 28 janvier, à la préfecture ne lui a pas fait changer d'avis.
Stéphane Turillon multiplie les interviews, aux médias locaux, régionaux, nationaux,et chaînes d'information en continu. Le 4 janvier 2021, il a lancé un "mouvement de désobéissance civile" intitulé le "mouvement du 1er février". A cette date, il rouvrira son restaurant dans le Doubs et il appelle tous ses collègues à faire de même... D'autres restaurateurs le suivront-ils ? Qui ? Combien ? Suspens…
Début janvier, le restaurateur de Cusance, avait publié une vidéo sur Facebook, qui est devenue virale. Il y expliquait sa situation et appellait à la révolte. Joint au téléphone ce vendredi 29 janvier, l'homme est en colère, inquiet, et se dit plus combattif que jamais. L’interdiction de travailler, alors que la grande distribution continue d’accueillir du public. Les aides de l’Etat insuffisantes et qui servent à payer les charges... à l'Etat, le demi-million de dettes « sur le dos » pour lancer son entreprise, les salariés et les prestataires de service à l’arrêt…sur ses arguments, il est intarissable.
"Il est hors de question que je crève, personne ne me fera taire"
Stéphane Turillon insiste : il n’a pas été « convoqué » par la préfecture du Doubs à Besançon mais « j’ai forcé pour être reçu, j’ai même menacé de me suicider. » Ce rendez-vous n’a rien donné de concret. Il rouvrira donc toujours le 1er février. Et si, comme le restaurateur de Nice qui a ouvert son établissement mercredi 27 janvier, il est arrêté et placé en garde à vue ? Stéphane Turillon dit qu’il n’a plus rien à perdre. Il s’en prend vertement au gouvernement et surtout à Emmanuel Macron, qu’il a demandé de rencontrer.
Il cite des chiffres : 300 000 restaurateurs, 1 million d’emplois et exprime sa crainte pour l’après-Covid, où s’amplifiera la crise économique et sociale.
Mais combien de collègues vont le suivre et rouvrir ? C'est la grande inconnue. « J’aime beaucoup les jeux de stratégie, notamment les échecs. Je gueule devant les médias, je m’agite, pendant qu’on me regarde, les autres se préparent. Sur un jeu d’échecs, on ne regarde pas la Reine qui se déplace librement. »
Lui, il ne se voit pas d’avenir ici : « J’ouvre le 1er février, comme un baroud d’honneur, et après je vends et je pars à l’étranger, en Australie ou au Canada. » lance le restaurateur comtois qui a pris d'ores et déjà comme avocat Me Randall Schwerdorffer, le médiatique avocat de Jonathann Daval.
L'UMIH du Doubs appelle à ne pas suivre le mot d'ordre lancé par Stéphane Turillon
Dans un post Facebook, l'union des métiers de l'industrie hotelière du Doubs se désolidarise de l'appel lancé par Stéphane Turillon : "Depuis des semaines des appels à ouvrir nos établissements le 1 février circulent. Notre confédération est dirigée par des élus responsables. Nous n'appellerons donc pas à ouvrir. Les conséquences pourraient être trop lourdes et dramatiques : fermeture administrative au moment de la réouverture de nos établissements, sanctions pénales pour mise en danger de la vie d'autrui, pertes de toutes les mesures de soutien financier etc…Certes, nous comprenons votre détresse et votre colère face à cette stigmatisation de nos métiers sans preuve ! Oui les versements tardent à venir ! Oui nous sommes sans perspective ! Mais nous travaillons sans relâche et nous ne lâcherons rien ! Le Gouvernement nous écoute mais ne nous entend pas toujours. Nous avons gagné des négociations et des combats. Notre travail n'est pas terminé, loin de là !" écrit l'UMIH du Doubs.
D’autres professionnels ne sont pas convaincus par la démarche
Stéphane Turillon espère beaucoup de soutien et une opération de grande ampleur lundi 1er février : il dit avoir reçu 18 000 messages, courriels et même lettres. Mais, localement, ses collègues sont réticents.
Antonin Borie, de la discothèque L’Antonnoir à Besançon, exprime son opinion : "Je comprends sa colère mais je ne cautionne pas la manière. Ce n’est pas la bonne solution. Les aides de l’Etat nous tiennent sous respirateur artificiel, oui, mais la situation est comme ça ! Pour certains, c’est évident, ce n’est pas suffisant. Mais l’image renvoyée de la profession n’est pas bonne. Non, je ne rouvrirai pas lundi. Je ne veux pas qu’on me ferme l’établissement et que je perde les aides. Mais aussi et surtout, je ne veux pas rouvrir en jouant le rôle de flic avec mes clients en disant tout le temps de mettre le masque, en ayant peur. »
Même sentiment chez Sarah Fassot-Gauthier qui gère le bar « L’Ephéméride » Place de la Révolution à Besançon : « J’en ai discuté avec Antonin Borie, et je suis d’accord avec lui. Je suis admirative du combat de Stéphane Turillon, je comprends sa colère. Stéphane appelle à la Révolution, fait des comparaisons avec 1789. Mais on n’est plus au 18 ème siècle ! Il essaie de faire culpabiliser ses collègues qui ne rouvriront pas lundi, c’est limite comme attitude. J’espère que rien de fâcheux ne lui arrivera lundi. On attend le 1er février avec impatience… » dit-elle.