Comme dans une soixantaine de villes en France, un rassemblement de professionnels de la petite enfance a eu lieu jeudi 6 octobre à Besançon (Doubs). A l'appel du collectif "Pas de bébés à la consigne", elles étaient une cinquantaine réunies sur l'Esplanade des droits de l'Homme pour dénoncer la pénurie de personnel et la dégradation des conditions d'accueil des tout-petits.
A Besançon, certaines familles ont dû trouver un plan B pour faire garder leur petit aujourd'hui. En raison d'un mouvement de grève national, le service d'accueil des crèches a été fortement perturbé ce jeudi 6 octobre. 9 structures sur 14 étaient fermées. La mobilisation répond à l'appel du collectif "Pas de bébés à la consigne" qui réunit une cinquantaine d'associations et d'organisations syndicales de la petite enfance.
Derrière le slogan « crèches surbookées, professionnels surmenés, bébés sacrifiés », des professionnels se sont rassemblés sur l'Esplanade des Droits de l'Homme pour alerter sur les conditions d'accueil des tout-petits.
Selon une enquête de la Caisse d'Allocation Familiale (CAF), une crèche sur deux en France rapporte un manque de personnel. Pour lutter contre cette pénurie, l'arrêté paru le 29 juillet 2022 autorise les crèches à recruter jusqu’à 15 % de professionnel sans diplôme petite enfance ni expérience auprès des jeunes enfants. Une réforme dénoncée par les grévistes. Françoise Wetzel est auxiliaire puéricultrice en crèche depuis plus de 20 ans. Venue de Pontarlier, elle a tenu à prendre part au mouvement. « Nous sommes le premier maillon dans la chaîne éducative, si on veut que les enfants soient épanouis dans leur développement, il faut se battre pour que le personnel ait une formation reconnue d’au moins un an, c’est un minimum », insiste-t-elle.
"Des petites mains gratuites" pour compenser le manque de personnel
Poupées en plastique dans les bras, une dizaine d’étudiants et étudiantes ont rejoint le rassemblement. Elles obtiendront dans quelques mois le diplôme d’état d’éducateur de jeunes enfants. La pénurie de personnels pèse aussi sur leurs jeunes épaules. "Durant nos stages, nous compensons le manque de professionnels, nous sommes des petites mains gratuites. Nous sommes jetées dans le bain sans accompagnement alors que nous sommes en apprentissage et que nous ne comptons pas dans les équivalents temps plein," explique l'une des étudiantes. Une autre confie que malgré son attrait pour les métiers de la petite enfance, elle songe à poursuivre ses études pour occuper un poste administratif.
« Jamais on n’a vu, jamais on verra des enfants entassés dans quelques mètres carrés » entonnent les manifestants reprenant la mélodie d'une comptine pour enfant. "Si on veut faire du travail de qualité et non pas de la simple garderie, il faut limiter le taux d’encadrement d'enfants par adulte" explique Céline Delarue, auxiliaire à Besançon. Il y a un an une réforme des modes d’accueil de la petite enfance avait déjà abaissé le taux d’encadrement d’un adulte pour 5 enfants qui ne marchent pas et un adulte pour 8 qui marchent à un adulte pour 6. La réforme autorise une diminution de la surface minimum par enfant : 5,5 m2.
1600 euros en fin de carrière : le manque d'attractivité des métiers de la petite enfance
"Les métiers de la petite enfance souffrent d'un manque d'attractivité, les salaires trop faibles et les conditions de travail n'attirent plus", affirme Isabelle Ménétrier, secrétaire générale adjointe CGT des territoriaux de la ville de Besançon. Face à des conditions de travail qui se dégradent, certains professionnels changent de voie. "J’ai des collègues qui préfèrent se réorienter dans d’autres secteurs qui n’ont rien à voir avec la petite enfance aujourd’hui malgré leur amour du métier" déplore Maud, auxiliaire à Besançon.
Le mouvement a été suivi à Besançon, avec 147 grévistes. Il n'y avait pas que les personnels de crèche dans la rue. Des ATSEM (agents territoriaux des écoles maternelles) et animateurs du périscolaires ont rejoint le mouvement social. "Dans l'école maternelle où je travaille je suis la seule ATSEM pour deux classes d'une trentaine d'enfants" explique Evelyne Roubey, Atsem. En fin de carrière Evelyne touche 1600 euros nets : "C’est insuffisant au vu du nombre de taches différentes que nous assumons", assure-t-elle, "et la seule évolution salariale possible pour notre fonction en catégorie C est de passer de première à deuxième classe" se désole-t-elle.