Alors que la démolition du dernier immeuble HLM de Fontaine Ecu est en cours, les militants de la Confédération Nationale du Logement (CNL) à Besançon dénoncent toujours cette décision de LogeGBM. Selon l'association, ces démolitions sont une aberration écologique. Pour le bailleur social LogeSMB, c'était "une passoire thermique".
C'est toujours avec un pincement au cœur que Monique et Michel Badet reviennent dans le quartier des immeubles HLM Fontaine Ecu de Besançon. Ils ont vécu là pendant 32 ans.
Leur dernier appartement était un trois pièces de 64 m2. Ils n'avaient qu'à marcher une dizaine de minutes et ils avaient tous les commerces du quotidien à leur disposition. Aujourd'hui, ils vivent dans 10 m2 de moins pour le même loyer, tout près du collège Camus. Pour eux qui ont du mal à marcher, les commerces de la rue de Vesoul sont bien trop loin.
En 2016, une de nos équipes de reportages avait rencontré Monique Badet. Avec son mari Michel, ils ont vécu dans deux des quatre immeubles HLM de Fontaine Ecu.
Le couple vivait dans cette barre construite dans les années 1960. Ils participaient à la "journée portes ouvertes" organisée par l'antenne bisontine de la CNL, Confédération National du Logement. Une des nombreuses actions organisées par l'association de défense des locataires, opposée aux propositions du bailleur social.
En mars 2009, le conseil municipal lance la "requalification du site de Fontaine Ecu" étudié par le bailleur social depuis 2004. 1200 habitants sont concernés. "Des décisions drastiques ont été prises, au regard des difficultés sociales du quartier et de l’obsolescence de la majeure partie des bâtiments. La quasi-totalité des logements du site soit 270 sur 318 (85%) sont démolis, en deux décisions successives". Il est prévu de démolir trois des quatre bâtiments et de réhabiliter l'immeuble du 12 rue de Chaillot.
A l'époque, ce groupe d'immeubles n'a plus la cote, les appartements sont mal isolés. L'objectif est de construire à la place 99 logements sociaux, précise lors d'une conférence de presse Michel Boutonnet de la CNL.
Depuis 2015, il combat la décision de l'office HLM du Grand Besançon, nouvellement intitulée LogeGBM, de détruire l'un des immeubles du groupe HLM de Fontaine Ecu , celui du 12 rue de Chaillot.
Cette association de défense des locataires a tout tenté : pétitions, manifestations et même actions en justice (perdues en première instance et en appel) pour que les habitants puissent rester dans leurs logements et leur quartier.
Au printemps 2021, les derniers locataires ont quitté leur appartement du 12 rue de Chaillot pour d'autres logements à Besançon. Les travaux de démolition ont commencé fin mars 2022.
Aujourd'hui, le couple Badet a été relogé rue de Vesoul mais c'est plus loin des commerces et des cabinets médicaux. Pour un loyer quasi identique, ils vivent dans un appartement de trois pièces qui fait 10 m2 de moins que leur ancien logement. Certains cartons n'ont pas encore été ouverts.
Un dialogue difficile
Pour LogeGBM, c'est un dossier où "la concertation a été extrêmement difficile". Après un premier échec, un second projet de réhabilitation présenté aux locataires "conduisait à une hausse de 35% de loyer compensée par la baisse significative des charges restituée entièrement aux locataires soit une hausse moyenne de la quittance de 13% hors incidence de l'APL." Un projet refusé par les habitants en 2015. Sur les 32 locataires, 22 étaient contre en raison des hausses de loyers. LogeGBM souligne que ce second projet de réhabilitation avaient été soutenu par "les deux autres associations CLCV et INDECOSA CGT qui sont représentées au Conseil d’Administration" de l'organisme bailleur. Les deux associations avaient donné un avis favorable à ce projet.
LogeGBM rappelle que ses "conseillères sociales avaient rencontré la quasi-totalité des familles avant le vote et vérifié auprès de chacune la soutenabilité financière du projet, au regard de ses ressources et de ses caractéristiques". D'importants travaux d'isolation thermique avaient été engagés pour réhabiliter le bâtiment. Mais le dialogue est toujours aussi difficile et la décision de démolition est prise en 2015.
"La situation d’impasse pour ce dossier de réhabilitation, le rejet des familles pour lesquelles il avait été produit, l’impossibilité financière et de principe à rénover sur fonds propres d’une part et à poursuivre la location dans de bonnes conditions, y compris pour les familles en place, opte pour l’arrêt de la réhabilitation et se prononce très majoritairement et assez logiquement pour une démolition. Il s’agit finalement de la dernière décision de renouvellement urbain de ce quartier qui est d’ores et déjà en cours de reconstruction" précise LogeGBM.
Pour la CNL, cette destruction est "une erreur humaine, économique, écologique". Michel Boutonnet, de la Confédération du Logement n'en démord pas. Selon l'association, ce début de réhabilitation puis le prix de la destruction coûtent beaucoup plus cher que la réhabilitation complète.
Une fois le bâtiment détruit, trois petits immeubles vont être construits proposant 33 logements sociaux dont 10 en rez-de-chaussée pour des personnes à mobilité réduite. Une autre conception du logement social.
Au delà de cette crispation autour du bâtiment de la rue de Chaillot, ce sont deux visions de l'urbanisme qui s'opposent. La CNL milite pour "une réhabilitation des quartiers en laissant les gens y vivre". Pour Michel Boutonnet, il faut "arrêter les démolitions et préserver les lieux de vie".
Des démolitions aussi à Planoise
Dans un autre quartier de Besançon, les 408 à la Grette, les immeubles ont déjà été détruits. "La conception architecturale entraînait un lieu de déviance terrible, explique Isabelle Marqués, directrice de LogeGBM. On ne parvenait plus à gérer correctement le patrimoine." Des étages étaient occupés par des dealers.
A Planoise, une ville dans la ville à Besançon, environ 1000 logements doivent être détruits dans le cadre d'un programme de rénovation urbaine. "Cette rénovation, précise Isabelle Marqués va permettre d'améliorer la performance énergétique de l'habitat et de proposer des logements adaptés aux personnes à mobilité réduite". Mais aussi de tenter de mettre fin à des problèmes de délinquance.
La Confédération Nationale du Logement est bien décider à se battre pour faire entendre son point de vue lors de la rénovation de Planoise.