Le Fonds Régional d’Art Contemporain (Frac) de Franche-Comté s’inscrit dans une démarche ambitieuse de démocratisation culturelle. Grâce à ses expositions hors les murs et à des dispositifs pédagogiques novateurs, il rapproche l’art contemporain des habitants de la région, en particulier ceux éloignés des centres culturels traditionnels.
Depuis sa création en 1982, le Frac se consacre à la diffusion de l’art contemporain dans toute la région. Virginie Lemarchand, responsable des collections et de leur diffusion, explique que cette mission s’inscrit au cœur des objectifs du Frac : "La mission fondamentale du Frac, c’est de constituer une collection, de la diffuser sur le territoire régional et de sensibiliser le plus grand nombre." Cette approche vise à garantir que chacun, quel que soit son lieu de résidence, ait accès à l’art.
Des dispositifs novateurs pour un accès élargi
Pour Virginie Lemarchand, il s’agit aussi de casser les barrières qui entourent souvent l’art contemporain.
L’art, ce n’est pas réservé à une élite. On veut désacraliser les choses. Ce qui compte, c’est que face à une œuvre, il y ait de l’échange.
Virginie Lemarchand, responsable des collections et de leur diffusion au Frac de Besançon
En exposant dans des lieux du quotidien comme des écoles ou des bibliothèques, le Frac souhaite inciter les visiteurs à dépasser la réaction instinctive du "j’aime ou je n’aime pas".
En France, un tiers des Français ne fréquente pas les musées. Dans l’objectif de pouvoir les atteindre, le Frac multiplie les expositions hors les murs, en partenariat avec des établissements scolaires, des médiathèques ou encore des centres hospitaliers. Virginie Lemarchand souligne l’importance de proposer des œuvres dans des espaces familiers : "Un élève ne va pas toujours visiter un musée, mais il va à l’école, un territoire qu’il connaît et maîtrise. Proposer une œuvre dans ce contexte peut l’encourager à franchir ensuite les portes d’une structure culturelle."
Le Frac a également mis en place un dispositif éducatif, l’École des médiateurs, qui forme les élèves à devenir médiateurs culturels. Au lycée Condorcet de Belfort, les lycéens participent à l’exposition La Fabrique des images et présentent les œuvres à leurs camarades et proches.
Ce n’est pas toujours évident de prendre la parole en public, mais cela leur apprend à argumenter, à produire de l’échange.
Virginie Lemarchand, responsable des collections et de leur diffusion
Depuis 2016, ce projet a également été développé au collège Notre-Dame de Mont-Roland à Dole, où des élèves de 5ᵉ encadrent l’exposition Snow Tears de Nathalie Talec.
“Aller vers”
Le satellite, cette galerie d’art itinérante parcourt la région avec des expositions thématiques. Virginie Lemarchand explique : "Le Satellite nous permet d’aller dans des zones éloignées où il y a moins de structures culturelles. Nous essayons de balayer tout le territoire pour atteindre un public diversifié et créer des rencontres autour des œuvres." En mars 2025, l’exposition Métamorphoses fera notamment escale à Réchésy (Territoire de Belfort), avant de continuer son parcours dans d’autres localités.
Le Frac propose également des dispositifs portables comme la Mallette Lefever, qui contient une œuvre d’une collection publique française. Elle est confiée pendant un mois à un enseignant, avec tout le matériel pédagogique pour découvrir l’œuvre. L’objectif de ce dispositif est d’encourager la curiosité, l’expression, la créativité, de permettre aux élèves de s’emparer d’une œuvre d’art hors du cadre de l’espace d’exposition, tout en découvrant le travail d’un artiste contemporain. Cet outil permet aux enseignants de travailler en classe sur des thématiques contemporaines tout en offrant aux élèves une expérience unique : "C’est incroyable d’avoir une œuvre dans sa classe", s’enthousiasme Virginie Lemarchand.
Dans la même lignée, une seconde mallette, nommée Zarka, est dédiée à un film sur le skateboard. Virginie Lemarchand insiste sur l’importance de ces mallettes pour “désacraliser l’art contemporain”.
Beaucoup de gens imaginent qu’une œuvre doit être un joli tableau figuratif, mais les artistes vivent dans le même monde que nous et utilisent des formes multiples.
Virginie Lemarchand, responsable des collections et de leur diffusion
Une mission pour l’égalité d’accès
L’ensemble de ces initiatives traduit une volonté de réduire les inégalités d’accès à la culture, en particulier pour les publics ruraux. Comme le rappelle Virginie Lemarchand, "nous devons rester disponibles dans ces zones. Il faut s’appuyer sur le réseau existant pour que chaque enfant, quelle que soit sa localisation, ait les mêmes opportunités."
Elle précise que les scolaires sont très demandeurs. Le Frac essaye de respecter une forme d’égalité dans les établissements, en allant également dans les zones où l’accès à certains espaces culturels est moindre. “On essaye de donner un accès égal à la culture”, appuie Virginie Lemarchand avant d’ajouter qu’il est de plus en plus difficile pour les classes de faire déplacer les élèves. "Cela a un coût financier de faire venir les élèves au Frac. Il faut donc rester disponibles dans ces zones-là. C’est pourquoi nous devons proposer des alternatives comme les expositions itinérantes ou les mallettes pédagogiques."
Le Frac accueille également le public à Besançon, avec une collection de plus de 800 œuvres. Le Frac a pour mission de prouver que l’art contemporain peut être un outil puissant pour le partage et la réflexion. Pour Virginie Lemarchand, l’essentiel reste que "chacun puisse imaginer, penser et ressentir face à une œuvre".