“Le zéro risque ça n’existe pas” : quand la glace se brise sous les patins d’un ex-champion olympique

L’ancien champion olympique de biathlon Vincent Defrasne a posté une vidéo sur laquelle on peut le voir fendre la glace et se rattraper de justesse. L’occasion de rappeler que les paysages magiques et la joie de la glisse ne doivent pas faire oublier le risque de chute dans une eau à moins de 4 degrés...

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Les images sont saisissantes. Filant sur la glace du lac de l’Entonnoir à Bouverans (Doubs), ce dimanche 19 janvier, Vincent Defrasne filme les dessins formés par l’eau gelée, juste sous ses patins. Les paysages sont somptueux, le ciel bleu, la glace miroir.

Mais l’aventure va prendre une autre tournure quand l’ancien champion olympique de biathlon (à Turin en 2006) approche des roseaux qui émergent de l’eau. Soudainement, les patins heurtent une glace d’une qualité moins bonne, s’enfoncent, et Vincent Defrasne évite une première chute. Dans un éclat de rire, on l’entend commenter en direct “Euhh, incident !” 

L'ancien biathlète va devoir s'y reprendre à trois fois avant de retrouver une glace résistante. © Capture d'écran Facebook Vincent Defrasne

“Emporté par la beauté des lieux” 

“On filme ou on filme pas la plongée ?”, commente-t-il avec humour, tentant de repartir. Quelques mètres plus loin, dans une zone marécageuse où la glace est encore très craquelée, ses patins percent la faible couche d’eau gelée. Sur la vidéo tournée en caméra 360 fixée sur une perche, on peut voir l’ex-champion tomber dans l’eau jusqu’à la taille. 

Faut pas rester là. Mais faire demi-tour c’était s’arrêter. 

Vincent Defrasne, entrepreneur et ex-biathlète 

Parvenant à se remettre debout presque aussitôt, la perche toujours en main, Vincent Defrasne cherche le meilleur chemin pour sortir de cette zone à risque. “Bon, on va là-bas et on se casse”, poursuit le patineur qui vient de connaître une jolie frayeur. S’appuyant sur des roseaux, qui semblent sûrs, il perfore une seconde fois la faible couche de glace. 

Ce n’est qu’après une troisième chute dans l’eau, et en se déplaçant à genoux, les mains sur la glace pour équilibrer son poids, qu’il parvient à retrouver une glace résistante, le sourire aux lèvres mais visiblement soulagé.

Des paysages somptueux et une sensation de bout du monde, mais un danger bien réel. © Antoine Laroche - FTV

 

“J'ai vu que je m’enfonçais, je commençais à me dire ‘Est-ce qu'il faut y aller...’, explique Vincent Defrasne à France 3 Franche-Comté. Si je fais demi-tour, je vais m’arrêter, ce n’est pas bon non plus.” 

Là l’erreur, ça a été d’aller sur les bords alors que la glace était visiblement trop blanche et dans un endroit où je pouvais plus trop garder de la vitesse. 

Vincent Defrasne, entrepreneur et ex-biathlète 

“Surpris”, l’entrepreneur résidant aux Grangettes confie avoir vu arriver le danger. “Je n’ai pas trop paniqué. Ce n’était pas non plus un danger vital, j’ai vu qu’il y avait des bords.” Dans cette zone, la profondeur est proche de 2 mètres, “assez pour que ça puisse être dangereux”, assure Vincent Defrasne.

Gardant visiblement son sang-froid, sans mauvais jeu de mots, ce grand sportif et habitué des conditions extrêmes a su heureusement garder les bons réflexes. “J’avais quelques rebords pour que mes genoux tapent, une petite superficie, ça m’a donné un point d’appui.” 

D’avoir de petits craquettements c’est quand même assez fréquent, d’avoir les pieds qui transpercent ça m’était déjà arrivé. D'avoir à batailler un peu pour regagner la glace ferme, c’était la première fois. 

Vincent Defrasne, entrepreneur et ex-biathlète

Familier de ce lac, situé à quelques kilomètres de chez lui, Vincent Defrasne était ce jour-là accompagné d'amis, mais il avait décidé d’aller faire un tour un peu plus loin, seul. “Je me suis laissé piéger par le fait de voir des traces, mais ils étaient peut-être passés plus tôt.”

 

Partager, et ne pas fanfaronner 

Comme de nombreux locaux, Vincent Defrasne est un connaisseur des conditions nécessaires pour patiner : “au moins 4 cm d’épaisseur pour pouvoir aller en sécurité”, selon “les traditions qui se colportent” de générations en générations. “Un bon indicateur est une glace la plus foncée possible, plus elle est foncée meilleur signe c’est. Je me suis laissé emporter par la beauté des lieux pour aller dans cette zone plus fine et donc trop fine”, reconnaît-il, lucide.

 Après cette expérience pour le moins marquante, l’ancien champion a tout de même décidé de partager sa chute. “Surtout pas pour fanfaronner”, plutôt “pour partager ce qui se passe”, explique Vincent Defrasne. “Le zéro risque en pleine nature, ça n’existe pas”. Une vidéo pédagogique donc, qu’il voit comme un moyen “d’inciter un peu à la prudence, même si j’incite tout le monde à aller patiner un jour sur un lac, c’est magique.”

Sur l'étang de Frasne, comme sur les autres lacs du Haut-Doubs, le patin à glace est interdit par arrêté municipal. Ce qui n'empêche pas les passionnés de la discipline de s'y rendre. © Antoine Laroche - FTV

Se définissant comme adepte de la montagne et de la nature, le Haut-doubien, qui a développé sa propre marque de vêtements de sport, se dit “à chaque fois subjugué par la beauté, par l’ambiance des lieux.”  

Un amour des lieux qui n’empêche pas une prudence requise, et d’écouter les locaux. “Au bord de chaque lac, il y a les anciens, qui disent 'aller, c’est bon’, qui donnent leur go”, décrit Vincent Defrasne. “Si je n’ai pas le temps, c’est la petite perceuse, le mètre.” Et d’aller vérifier par lui-même si les 4 cm sont bien là. 

Serge Billet, l’indic de la glace 

Une technique plutôt facile à mettre en œuvre, à condition d’avoir la certitude de marcher sur la glace sans risque. Pour cela, Serge Billet, un des “anciens” du Haut-Doubs, qui chaque jour sur sa page Facebook, précise les épaisseurs et le risque sur les lacs du Haut-Doubs, a sa propre technique : “En tapant la glace avec le patin, suivant la résonance, on arrive à jauger l’épaisseur de la glace. C'est mon truc à moi.” 

Autrefois on attendait qu’il y ait 10 cm, maintenant, les gens y vont dès 5 cm. 

Serge Billet

À 82 ans, cet ancien professeur de sport habitant sur les rives du lac de Saint-Point assure en toute humilité n’avoir jamais franchi la glace. “Ça ne m’est jamais arrivé, même un doigt de pied dans l’eau. Je suis toujours très vigilant.”  Et d'expliquer certains écueils à éviter : "Il y a toujours des gens qui prennent des bains de pieds, car ils vont au niveau de la végétation qui prend la chaleur en journée."

À l'aide d'une broche à glace, Serge Billet sonde l'épaisseur chaque jour sur les lacs du Haut-Doubs. © Capture d'écran Facebook Serge Billet

 

En 1900, quand on voit les cartes postales, il y avait des centaines de personnes sur la glace. Ça a toujours été une tradition. Quand je vois que les maires veulent l’interdire, ça me chiffonne un peu.

Serge Billet 

Connu pour glisser sur les étendues gelées avec son char à voile monté sur patins, il est un bon informateur pour tous ceux qui voudraient patiner, sans connaître les conditions sur place. Avec sa broche à glace, il sonde l’épaisseur, non sans avoir observé la météo des jours précédents. “À -10 degrés la nuit, pas au-dessus de zéro dans la journée, on prend 1 cm par nuit à peu près. Par -20, jusqu’à 2 cm. Ce sont mes constatations.” 

Le lac de l'Entonnoir est l'un des premiers à geler dans le Haut-Doubs. © Capture d'écran Facebook Serge Billet

Mais chaque lac est différent. “L'altitude va entrer en ligne de compte, la profondeur joue beaucoup”, notamment au lac de Saint-Point, plus profond que ceux de Bouverans ou de Frasne, et où la glace prend plus difficilement, à cause des mouvements de l’eau, estime Serge Billet. 

Le patin à glace c’est quelque chose d’un peu extraordinaire. C'est le nec plus ultra des activités dans le Haut-Doubs.

Serge Billet

 

Amoureux des lacs et des paysages du Haut-Doubs, Serge Billet est en admiration dès que la glace fait son apparition. “Je n’arrête pas de m’extasier devant la chose, j’ai 82 ans, ça fait plus de 70 ans que je patine, je trouve ça toujours très beau. J’en prends plein les mirettes.” Son préféré ? "Frasne, c’est la Finlande, pas de traces de civilisation au bout.”  

Mais en cette fin janvier, avec le retour de la douceur, la glace ne saurait tenir. À bon entendeur... 

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