Piquée à l'âge de six ans par une tique, Justine contracte la maladie de Lyme des années plus tard. Après quatre ans d'errance médicale, elle décide de se faire soigner en Allemagne. Son dernier espoir. À l'âge de 24 ans, la jeune femme fait preuve d'une grande résilience.
Silencieuse. C’est ce qu’a été la maladie de Lyme chez Justine pendant des années. Piquée par une tique à l’âge de six ans, ce n’est que des années plus tard que les bactéries se sont affolées. En janvier 2020, celle qui vit à 200 à l’heure se retrouve clouée au lit. "Une grippe", pense-t-elle à ce moment-là. Jusqu’en mars, elle traînera une fatigue inhabituelle pour celle qui se décrit hypertonique et qui était capable de vivre deux journées en une. Pendant le confinement, elle est de nouveau malade, le Covid cette fois. Après quoi, l’enfer commence. Maux de tête violents, perte de poids et de force, douleurs abdominales, troubles respiratoires… Elle se met alors en arrêt maladie, durant cinq mois.
Quatre années d'errance médicale
Pendant quatre ans, Justine, agricultrice dans le Haut-Doubs, vit avec des douleurs articulaires et musculaires. "Quand on me demande comment je vais, je réponds tout le temps que j’ai mal partout", confie la jeune femme. Quatre années durant lesquelles elle enchaîne les rendez-vous médicaux et sillonne les hôpitaux : rhumatologue, pneumologue, cardiologue… Personne ne trouve rien. Parmi tous ces examens, un test pour chercher la présence de la maladie de Lyme, revenu négatif. À ce moment-là, la vie de Justine est rythmée par la douleur et la fatigue. L’agricultrice se levait à 5h15 et terminait à 19h30.
Je m’étais mis en tête que ma vie était ainsi. Je survivais.
Justine, atteinte de la maladie de Lyme
Pourtant, en échangeant avec une amie de sa maman, atteinte de cette maladie, la jeune femme réalise que ses symptômes sont similaires aux siens. En novembre, son état se dégrade semaine après semaine : la maladie prend un nouveau tournant. Faute de force et de tonus musculaire, elle a perdu l’usage de ses bras et de ses jambes, Justine finit en fauteuil roulant. "Ce qui n’est pas évident, ce n’est pas la maladie elle-même. C’est d’accepter qu’à 25 ans, on ne passe pas le samedi soir à faire la fête, mais à être dans son lit parce qu’on est fatiguée et qu’on a mal partout", confie Justine, la voix remplie de larmes.
L'Allemagne comme dernier espoir
Après des recherches sur internet, elle tombe sur Jeanne, qui est allée se faire soigner en Allemagne. Le pays outre-Rhin devient alors son dernier espoir. Elle s'y rendra à la mi-novembre mais, là-bas aussi, le test de la maladie de Lyme revient négatif. Les médecins lui affirment cependant qu’elle est bien atteinte de la pathologie. Au vu de son tableau clinique, aucun doute ne plane. Pour réveiller la maladie, les médecins lui injectent des antibiotiques : le test est enfin positif. "J’étais avec mes parents au moment des résultats. Mais mon cerveau était déconnecté, je n’y croyais pas. Aujourd’hui, j’ai l’impression de vivre un film, que je suis à côté de tout ça et que je regarde ce qui se passe, que toute cette histoire est irréelle", confie-t-elle.
Le 12 janvier dernier, la jeune femme est entrée dans la clinique pour suivre un protocole : antibiothérapie, thérapie par champ magnétique, phytothérapie, luminothérapie… "On soigne le corps à un prix fort. Je m’attendais à des effets secondaires, mais là, c'est très dur. On attaque les bactéries, elles sont folles et cela crée des réactions de Herxheimer (réactions aiguës en début de traitement, ndlr)", explique Justine.
Cette prise en charge en Allemagne a aussi un coût financier. Entre 20 et 30 000 euros. Pour financer le protocole, Justine a récolté des dons via une cagnotte en ligne. "Je remercie tout le monde qui a participé. Je ne pensais pas qu’on obtiendrait autant, c’est magnifique", confie-t-elle.
La famille comme pilier
Justine peut aussi compter sur ses proches : son frère, ses parents et son compagnon. L’émotion est vive quand elle parle de sa famille, encore plus soudée depuis le début de la maladie. "Je sais qu’ils sont tristes, mais ils ne le montrent pas, car je leur ai dit de ne pas l’être. Parce que moi, je ne le suis pas. Si on pleure, on pleure de joie, pas de tristesse", échappe-t-elle, entre quelques sanglots.
Mes proches, c'est mon pilier et si je ne les avais pas, je ne ferais pas tout ça.
Justine, atteinte de la maladie de Lyme
L’émotion est encore plus grande quand elle parle de son compagnon : "Je ne le remercierai jamais assez. À 26 ans, être l’auxiliaire de vie de quelqu’un, ce n’est pas forcément ce qu’on veut. Il est exceptionnel. Il me dit souvent qu’il est fier de notre combat."
Il y a deux jours, Justine a remarché pour la première fois avec l’aide de son kinésithérapeute. Encore une fois, tout cela lui paraît être un film. "J’avais envie de faire ça toute la journée, confie-t-elle le ton rieur. J’avais l’impression de faire mes premiers pas comme un bébé." Chaque amélioration est une victoire pour Justine, même les toutes petites choses. Aujourd’hui, la jeune femme espère qu’une chose : retrouver ses proches en étant debout. "C’est difficile, mais je me bats pour eux, pour que quand je revienne, je puisse les revoir debout. C’est mon objectif et j’espère l’atteindre."
Mode pilote automatique
Pour tenir bon loin de ses proches, Justine écrit beaucoup.
J’écris pour me souvenir, mais je ne regarde pas ce qu’il se passe. Je ne me regarde même pas dans le miroir, c’est trop dur de voir la vérité en face.
Justine, atteinte de la maladie de Lyme
"Je note tout pour me libérer quand ça ne va pas. Mais je suis en pilote automatique, je n’ai pas d’autre choix que d’avancer." L’agricultrice fait part d’une grande résilience. Et de toute cette histoire, elle retient une leçon de vie : rien ne sert de vivre à 200 à l’heure. "Je ne voyais plus la beauté des choses. Le principal aujourd’hui, ce n’est plus le travail, mais de prendre soin de moi. Il faut profiter de la vie."
À travers une page Facebook, Justine partage son histoire pour être la messagère d’une cause : ne pas attendre de ne plus pouvoir marcher pour se faire tester en Allemagne. La jeune femme regrette que cette prise en charge ne soit pas disponible en France. "Ici, les tests ne sont pas assez poussés pour détecter la forme chronique de la maladie de Lyme." Justine doit rester encore quelques semaines en Allemagne. Elle espère de tout cœur remarcher d’ici là, même si elle a conscience que le chemin est encore long.