Depuis 2020, Marouane Sista est une figure montante de la scène humoristique française. Comédien, stand-uppeur, créateur de vidéos sur les réseaux sociaux, l'enfant de la Petite Hollande, quartier difficile de Montbéliard (Doubs), a su se faire un nom après un itinéraire "casse-gueule" qui l'aura vu côtoyer aussi bien l'Olympia que la prison. L'artiste revient avec franchise sur son parcours.
Humoriste : être rémunéré pour faire rire les gens. Le meilleur métier du monde diront certains. Cette profession peu commune, beaucoup l'ont rêvé. Depuis l'enfance, lors des premières blagues en cours de récréation, ou en classe. Mais peu sont parvenus à gagner leur vie en faisant rire des salles entières. Marouane Sista fait partie de ceux-là.
À 33 ans, l'enfant de la cité de la Petite Hollande, à Montbéliard (Doubs), est aujourd'hui connu dans la France entière. Comédien, stand-uppeur, humoriste mais aussi créateur de vidéos sur les réseaux sociaux, le jeune homme a côtoyé des artistes reconnus comme Jamel Debbouze, Thomas Ngijol ou Ahmed Sylla et s'est aujourd'hui fait un nom grâce à son talent. À sa persévérance. Et à sa résilience.
À 17 ans, des allers-retours à Paris pour "bouffer de la scène"
Car ne croyez pas que le chemin fut facile pour Marouane. Au contraire. Son parcours n'est pas des plus lisse. Certes, l'enfant rêveur, qui allait "à l'école pour faire rire les gens" comme il l'explique lui-même, a "toujours voulu faire de la scène". Un désir poli par ces longues heures passées à regarder ses idoles à la TV. Hyperactif, il commence très tôt à écrire ses premiers sketchs "dans une salle de la MJC" de son quartier, pour se canaliser.
L'histoire semble tracée, et bien partie. Suivent les premiers spectacles, les cours de théâtre malgré "le manque de structure dans mon quartier". Avant, comme un symbole, une montée sur Paris, obligatoire pour l'adolescent de l'époque qui voulait à tout prix "percer".
J'avais 17-18 ans. À l'époque, le stand-up n'était pas aussi populaire qu'aujourd'hui. Tout se passait sur Paris. Je me suis dit "je bouffe un maximum de scène et j'essaye de faire mon trou là-dedans".
Marouane Sista,humoriste
Le jeune homme enchaîne alors les allers-retours entre Montbéliard et la capitale et découvre alors un milieu où tout reste à faire. Un quotidien excitant, où Marouane côtoie alors "toute une génération d'humoristes" qui, comme lui, "ont la dalle". Mais un quotidien également "galère" : "on est payé au chapeau, c'est pas des masses. Pour avoir 50-60 euros, faut jouer 5-6 fois. On s'entraidait. Moi j'avais pas les moyens donc je faisais les allers-retours. C'était très dur" confie l'humoriste.
Un passage en prison salvateur
Malgré la difficulté, Marouane Sista tutoie alors son rêve de stand-up professionnel. Avant que tout s'effondre, un an plus tard. Le jeune homme est arrêté puis incarcéré. "Il fallait que je me débrouille pour avoir de l'argent pour monter à Paris. J'avais encore un pied dans les conneries qu'on peut faire dans les quartiers" se souvient-il. "Je me suis pas laissé le choix de gagner cet argent autrement. C'était une erreur".
En prison, je voyais mes amis humoristes passer à la TV. Ça a été un déclic. Je me suis dit : "tiens, j'étais dans le bon truc". Ça a tout changé. Je suis l'un des seuls à dire que j'ai étais content de faire de la prison, car sans ça, j'aurais peut-être continué à être le même petit con.
Marouane Sista,humoriste
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À sa sortie, Marouane décide de "changer d'attitude, de fréquentations et d'y aller pour de bon. On peut croire qu'après la prison, c'est fini. Mais non. On peut faire de ça une force". Pour avoir les fonds nécessaires à une installation, le jeune homme travaille dans un snack. Avant de remonter à la capitale. Grâce à un réseau de connaissances accrues, il se fait héberger par l'humoriste Shirley Souagnon, qui l'avait repéré, ce qui lui permet de se consacrer uniquement à la scène.
"J'ai une vie casse-gueule, donc ça fait marrer"
La routine du stand-uppeur reprend alors : aller gratter des dates et écrire des sketchs percutants, pour lesquels Marouane puise son inspiration dans sa propre vie, ses galères et ses joies. Et cela marche : "j'ai une vie qui est un peu casse-gueule, donc ça fait marrer" sourit-il. Petit à petit, l'humoriste fait son nid, devient "titulaire" dans un théâtre où il peut se produire à sa guise, fait les premières parties d'Ahmed Sylla... Nous sommes alors en 2020.
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Mais après la prison, un nouveau coup du sort vient le faucher en pleine ascension : le Covid. "Ça m'a séché. Tout se passait bien, je jouais 3 à 4 fois par jour et du jour au lendemain, toutes les salles ferment petit à petit" regrette-t-il. "C'était un coup de massue. Tout d'un coup j'avais plus de vie". Dans ce triste horizon, l'artiste, encore une fois, s'accroche.
Pendant le Covid, des vidéos incitant "à mettre le masque"
Et décide de rebondir avec les vidéos sur les réseaux sociaux. Le concept est simple : dire aux gens qui portaient mal le masque, de le remettre convenablement. Tout cela de façon humoristique. C'est un carton. Les millions de vues s'enchaînent, en France comme à l'international. Marouane agrandit son public et reçoit même les félicitations du président Macron.
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Rien ne sera plus jamais pareil. Au déconfinement, cette notoriété sur les réseaux sociaux lui servira à se faire connaître sur scène. Il passera par l'Olympia, le Casino de Paris et sillonne actuellement la France et l'Europe alors que ses réseaux comptent des centaines de milliers de followers.
Ce destin hors du commun, Marouane Sista le raconte en détail dans la riche interview qu'il nous a accordée. Enfance, premières scènes, prison, Covid, stand-up, galères financières, gestion de la notoriété, amour de sa Franche-Comté natale, difficulté de percer dans l'art quand on vient d'un quartier difficile... L'artiste se livre au cours de plus de 35 minutes d'entretien.
Une interview préparée par Antoine Comte, avec la complicité de Jean-Michel Bohé, Léa Gutleben, Bruno Pardillos, Bertrand Poirier, Achille Salvini, Jimmy Chabod et Morgane Hecky.
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