La chute du régime de Bashar el-Assad en Syrie après plus de 50 ans de dictature redonne l’espoir aux réfugiés arrivés en France. Shehada et sa famille vivent dans le Haut-Doubs, loin de leur pays. La joie, les larmes, ont coulé ces dernières heures.
Ils rentrent chez eux. Des photographes de l'Agence France Presse ont capturé ce lundi des images de déplacés syriens traversant la frontière entre le Liban et leur pays d'origine. Les groupes rebelles qui ont renversé Bachar al-Assad, dimanche 8 décembre, ont appelé les réfugiés exilés à l'étranger à regagner la Syrie. Shehada Alghajar pourrait en faire partie prochainement.
Dimanche à Pontarlier où ce père de famille syrien est accompagné par une association, les Syriens ont dansé, fêté la chute d’el Assad.
C’est une respiration. Ils disent les uns et les autres, c’est 50 ans de prison, 50 ans de copains qui disparaissent et d’un seul coup les portes s’ouvrent. C’était la joie, pas seulement de la fuite de Bachar, mais de se dire, je vais retrouver, mon ami, mon oncle, ma soeur.
Patrick CollePrésident de l'association Réseau Pontarlier Accueil Insertion Réfugiés
Shehada Alghajar est arrivé en France en 2023. Il a fui son pays avec ses trois petites filles et sa femme, en passant d’abord par le Liban. La répression sanglante qui s’est abattue sur la population syrienne depuis mars 2011 a engendré près de 500 000 morts, plus de 6 millions de réfugiés et plus de 150 000 disparus. Alors Shehada est heureux, rêve de démocratie maintenant pour son pays.
Oui bien sûr que je veux retourner moi et ma famille en Syrie, quand les problèmes seront réglés et que la situation sera plus calme. Retourner dans la nouvelle Syrie.
Shehada, réfugié syrien en France
Shehada Alghajar fabrique des fromages dans une entreprise bien connue pour la fabrication de mont d’or. Ce lundi matin au travail, ses collègues avaient en face d’eux un homme heureux. “On l’a senti souriant, très relâché, comme si c’était un poids en moins pour lui” explique Maxime Rossier, responsable de fabrication.
Alors que notre équipe de reportage tourne, Shehada Alghajar décroche son téléphone. Au bout du fil en visio, un ami d’enfance, réfugié au Liban. Les deux Syriens ne s’étaient pas parlé depuis 15 mois. Les larmes sont difficiles à cacher. L’émotion de deux hommes qui espèrent enfin des jours meilleurs pour la Syrie.
Que sera la Syrie de demain ?
Le régime de Bachar al-Assad s'est effondré, en Syrie, face à l'offensive fulgurante de groupes rebelles menée par le groupe islamiste radical Hayat Tahrir al-Sham (HTS) de Abou Mohammad al-Joulani. C'est la fin d'un demi-siècle de règne sans partage de la famille al-Assad dont Bachar, qui a dirigé d'une main de fer la Syrie pendant 24 ans, dont près de 14 ans de guerre. Mais que sera demain ? Shehada et les autres Syriens réfugiés en France ont bien conscience que l’avenir reste incertain sur le plan politique et des droits de l’homme.
“C’est une joie extériorisée et contenue, c’est comme un couvercle qui se soulève d’un seul coup…Nous, on sait que la situation est compliquée, que ça peut basculer dans un capharnaüm complet avec les factions en face.
Patric Colle
La Syrie, j'y retournerai en vacances
Pour certains réfugiés syriens, la joie est là, mais la prudence aussi. “Une réfugiée syrienne nous a dit,je travaille ici, ma vie est ici. J’irai en Syrie en vacances. Je reste ici pour travailler” complète Patrick Colle.
On n’efface pas cinq décennies de souffrance d’un peuple en une journée, et en faisant basculer des statues du régime syrien. La Syrie aura besoin de temps pour tourner la page de tant de souffrances.