Des étés secs depuis plusieurs années, un hiver doux et les parasites du bois sont de retour. Mais cette année, leur présence inquiète particulièrement les professionnels : ils redoutent des dégâts de grande ampleur, deux fois plus importants qu'en 2018.
L'arrivée des beaux jours a fait sortir de leur sommeil les insectes et autres parasites du bois. Ce qui n'est pas vraiment une bonne nouvelle pour les forêts de Franche-Comté, menacées par la prolifération de ces nuisibles après la canicule de 2018. Un "épisode de sécheresse et de chaleur exceptionnel par son intensité, sa continuité et sa durée", déplore la Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt de Bourgogne-Franche-Comté (DRAAF).
Chaleur et sécheresse : un cocktail très favorable à la prolifération du scolyte, un petit coléoptère qui vit sous l'écorce des arbres et se nourrit de bois jeune, dont la population aurait explosé. Et pour cause : il faut seulement quatre à six semaines entre la ponte et l'envol de l'insecte adulte. Mais ces condition climatiques sont aussi une source de stress hydriques pour les arbres. Résultat : leur résistance est amoindrie face aux attaques de ces parasites dits "de faiblesse" comme le scolyte, certains champignons...
"En ce début de printemps 2019, avec la reprise de l’activité physiologique des arbres, des mortalités de sapins pectinés commencent à se révéler", alerte la DRAAF. L'organisme compare l'année 2019 à la période post-canicule de 2003 où les sapinières avaient été décimées. Mais le scolyte n'est pas le nuisible qui inquiète le plus les professionnels.
Une partie de leurs efforts sera centrée sur la lutte contre le typographe de l'épicéa. Moins connu mais bien plus dangereux, il peut attaquer tous les arbres, même ceux qui ne sont pas en état de stress hydrique. "Les sécheresses à répétition de ces dernières années ayant affaibli les épicéas, particulièrement à basse altitude, la population importante de typographes dans l’environnement laisse craindre (...) des attaques importantes en 2019, potentiellement supérieures à 2018", prévient le Département de la santé des forêts qui évoque des dégâts jusqu'à deux fois supérieurs.
Quelles conséquences ?
Les zones les plus touchées seront celles de basse altitude : les secteurs de plaine, le premier plateau jurassien, les Vosges saônoises et belfortaines ou encore les contreforts du Morvan, précise la DRAAF. "Les conditions climatiques de 2019 seront déterminantes quant à l’intensité et à la durée du phénomène épidémique", estime l'organisme, indiquant que les attaques de ces parasites s'accentueraient en cas de "conditions sèches et chaudes".
D'après les données récoltées, les insectes sont sortis de leur léthargie hivernale lors de la première quinzaine de mars, ce qui laisse présager des attaques dès maintenant. Et plusieurs dizaines de variétés d'arbres risquent d'être touchés : "L'épidémie de scolytes va vraisemblablement toucher les autres essences résineuses : notamment sur sapin pectiné mais potentiellement aussi sur mélèze et pin. Les conditions ont également été favorables aux cambiophages (scolytes, buprestes...) sur hêtre et chêne qui sont donc à surveiller."
Comment lutter contre ces parasites ?
Tous les professionnels s'accordent à le dire : il faut agir vite. "La première étape consiste à repérer le plus tôt possible les foyers actifs de scolytes", explique le Département de la santé des forêts. Et pour neutraliser ces foyers, l'une des seules solutions possibles à ce stade est l'abattage. L'objectif est de transporter le bois "scolyté" en dehors de la forêt le plus rapidement possible pour que le parasite n'ait pas le temps de s'y reproduire.
La Franche-Comté est particulièrement concernée car beaucoup de forêts avaient déjà été victimes des scolytes en 2018. Et une étude Suisse a récemment montré que "deux tiers des nouvelles infestations s’étaient produites à moins de 300 mètres du foyer d’infestation le plus proche, voire 500 mètres dans 80% des cas", ce qui en fait une zone à traiter en priorité.
Mais encore une fois, l'essentiel des efforts vont se concentrer sur le typographe. "D'un point de vue sanitaire, il est recommandé de lutter prioritairement contre le typographe, beaucoup plus agressif et capables d’attaquer des tiges vigoureuses contrairement aux scolytes et pissode du sapin pectiné", conseille la DRAAF.
La mesure la plus importante pour limiter des dégâts d'enlever à temps le reste des chablis (arbres tombés au sol et déracinés) qui auraient pu survenir pendant l’hiver 2018-2019. Des mesures "indispensables", selon les professionnels, pour contenir cette invasion qui pourrait se révéler dévastatrice sur les forêts à basse altitude.