Elle était l’un des symboles de La Clayette, et très appréciée des habitants et touristes. Le cheval cabré signé du sculpteur Christian Maas, acheté 30 000 euros en 2002, a dû être enlevé par la municipalité. Son auteur aurait copié l’œuvre du sculpteur jurassien Frédéric Jager.
A La Clayette (Saône-et-Loire), la place où tronait la statue de bronze "Le Cheval cabré", une statue de bronze semble bien vide. La statue de bronze signée du sculpteur Christian Maas a dû être retirée.
Acquise en 2002 pour 30 000 euros avec un certificat d'authenticité par la Ville, l'oeuvre signée par Christian Maas est en fait un plagiat. Alertée par l'avocat de l'artiste auteur de l'oeuvre originale, Frédéric Jager, et suite à une requête déposée devant le tribunal administratif de Dijon, la municipalité de la Clayette a dû procéder à son enlèvement jeudi 5 décembre. La mairie encourait une pénalité de 100 000 euros si elle ne retirait pas la statue.
C’était l'emblême de la commune."
Christian Lavenir, maire de la clayette (SE), regrette de devoir en arriver là. "Je suis déçu car c’est une affaire qui traine de longue date. Il y a eu un premier jugement de Christian Maas en 2010. Il n’avait pas été demandé à la commune d’enlever la statue. Huit ans après, on découvre qu’il faut finalemement la retirer au plus vite. C’est un peu dommage."
Dommage d'autant plus que ce "cheval cabré" était devenu l'un des symboles de la ville, très apprécié de ses habitants et des touristes. "Elle avait tout son sens et toute sa place", affirme le maire. "Bon nombre de visiteurs et de touristes se faisaient photographier devant. Et au pied du château, c’était joli. C’était l'emblême de la commune."
La contrefaçon provient d'un original baptisé "La Fontaine aux chevaux". Il est l'oeuvre du sculpteur et peintre animalier jurassien Frédéric Jager. Ce dernier est le véritable signataire de plusieurs versions du "Cheval cabré", inspiré par cette "Fontaine aux chevaux", que des municipalités ont acquises en France et dans le monde.
Des copies réalisées dans une fonderie en Thailande
Tout commence en 1994, lorsque Frédéric Jager vend aux enchères publiques un exemplaire en plâtre de la "Fontaine" à un antiquaire belge, "un voyou que je n'ai même pas le droit de citer aujourd'hui car il y a prescription", déplore l'artiste.
Aussitôt acheté, par le biais d’un artisan d’objets décoratifs en pierre reconstituée, ce dernier fait créer un moule en silicone de la sculpture. C’est ce moule qui est utilisé par un autre sculpteur, Christian Maas, pour faire réaliser des copies par une fonderie en Thaïlande. "Le contrefaisant a moulé la sculpture, il a chauffé la cire pour déformer un peu les têtes. Et en plus, ça a été fait dans une fonderie qui n'a pas le même savoir-faire que les nôtres", explique Frédéric Jager.
Des faux qui seront jugés grossiers et portant atteinte à l’œuvre originale par l’expert qui interviendra au cours des procédures pénales. Frédéric Jager apprend l’existence de deux de ces copies par hasard au début des années 2000.
Un combat judiciaire de 20 ans
"Christian Maas, c’est un voyou de très grande envergure. J’ai été porté plainte contre lui devant la police judiciaire de Melun pour contrefaçon il y a 20 ans. L’enquête a duré longtemps."
Une enquête qui aurait couté selon l'artiste près de 40 000 euros à l’Etat avec des voyages en Thaïlande. "On a fait les choses bien", se félicite Frédéric Jager. "Et celui qui a été inquiété, c’est celui qui signe les sculptures."
Christian Maas a été poursuivi et condamné par la Cour de cassation en 2010 à cinq mois d'emprisonnement avec sursis et à verser 300 000 euros de dommages et intérêts à Frédéric Jager pour contrefaçons.
Près de 27 contrefaçons sur le territoire français
Frédéric Jager est depuis plusieurs années en procédure judiciaire contre son plagiaire et vient enfin d'obtenir gain de cause pour contrefaçon de la fontaine sculptée par ses soins en 1985.
Selon nos confrères du Progrès, l'expert judiciaire, Gilles Perrault, a mis en évidence quelques modifications sur la tête de l'animal opérées par un sculpteur thailandais.
Aujourd'hui, selon Frédéric Jager, 27 copies auraient été vendues sur le territoire français dont celle de La Clayette mais également de la ville de Tarbes dont la municipalité a également pris la décision de retirer la statue.
L'artiste auteur de l'oeuvre originale espère aujourd'hui que toutes ces contrefaçons seront retirées, ce qui est déjà le cas à La Clayette. "Ils ont enlevé les chevaux mais logiquement ils doivent les détruire", explique Frédéric Jager. "Quand vous le détruisez, il y a 3000 ou 4000 euros de bronze bruts. Ils pourraient utiliser cet argent pour le reverser à des associations caritatives. Ce serait une façon un peu drôle de sortir de cette bagarre".
Le maire de La Clayette, Christian Lavenir, lui pour l'instant ne souhaite pas détruire la statue. Il compte missionner un avocat pour se défendre et voir ce qu'il peut faire.