Léontine et Louise, un duo inspirant de Belfort, unissent sport et solidarité. Entre amitié fusionnelle, dépassement de soi et innovation, elles transforment leur passion en un projet inclusif, porteur d'espoir.
Léontine Peter et Louise Dookun. Un binôme attachant diffuseur de joie, d'humanité et de générosité. Les deux Belfortaines se sont rencontrées il y a neuf mois, sur un terrain de basket. Louise, atteinte de spina bifida -malformation de la moelle épinière - pratique le handi basket au club de Belfort et Léontine avait rencontré son entraîneur durant la rédaction de son mémoire. Ce dernier lui propose alors de venir s'essayer à un entraînement. De là est née l'amitié fusionnelle entre les deux jeunes filles de 25 ans.
La connexion s'est faite rapidement. On a l'impression de se connaître depuis toujours et depuis ce jour-là, on ne se quitte plus
Louise Dookun
Un lieu qui n'est pas inconnu pour Léontine, qui avait intégré le pôle espoir de basket à Besançon (Doubs) à l'âge de 12 ans, des rêves plein la tête. Après une sélection qui ne se passe pas comme elle l'imagine, elle laisse tomber ce projet. Alors 10 ans plus tard, frôler à nouveau le parquet et rencontrer Louise a une énorme signification. "Tout ça m'a permis d'accepter mon passif et impulser un devenir pour le message que l'on souhaite passer", explique-t-elle. Aujourd'hui, ce qui lie Louise et Léontine, ce n'est pas uniquement leur amitié.
Courir en autonomie grâce à un guidon adapté sur le fauteuil
Léontine avait un projet qui émergeait dans sa tête depuis quelque temps. Et lorsqu'elle rencontre Louise, elle sait que c'est la bonne personne avec qui partager cette aventure : courir ensemble, en tandem. Pas question pour elle de pousser quelqu'un sur plusieurs kilomètres, elle l'avait déjà fait en joëlette. Mais en binôme, avec une personne qui court en étant autonome à 100 %. "Louise m'est apparue comme une évidence", confie spontanément Léontine.
Quand elle m'en a parlé, je n’ai même pas eu à dire oui tellement ç'a été évident. Elle avait une approche sportive, mais aussi humaine.
Louise Dookun
Quelques années en arrière, sa tante lui avait proposé de faire la course du Lion qui relie Belfort à Montbéliard, en la poussant. "Ce système ne me plaisait pas. Me faire pousser, me demande un certain lâcher prise et à ce moment-là, ce n'était pas possible pour moi, se souvient Louise. Je fais du tennis, du basket, je voulais rester en action". Garder son autonomie est vraiment l'argument qui l'a séduite. Entre la personnalité de Léontine, sa vision des choses, son regard "beau et humain", Louise a été convaincue. "Je me suis dit que c'était elle et personne d'autre."
L'aventure commence. Avant d'avaler les kilomètres, il faut adapter le fauteuil de Louise, celui avec lequel elle joue au tennis. Pour ce faire, Léontine se tourne vers Christophe Pruvost, un soudeur du département, qu'elle connaît depuis plusieurs années. En une semaine, il recycle un guidon de vélo et en fait un véritable lien réglable selon l'accessibilité de la route, entre les deux jeunes filles. L'objet est montable et démontable pour que Louise puisse continuer sa pratique du tennis. Ce guidon n'est pas qu'un lien physique entre leurs deux mondes et ce projet a bouleversé leurs vies respectives.
"Elle a une résilience énorme"
"Louise, c'est des leçons de vie permanentes", confie Léontine, quand on lui demande ce que, mutuellement, elles s'apportent. Les mots ne manquent pas à la jeune femme.
Malgré son handicap, elle a une résilience énorme. Elle me fait avancer dans la vie personnelle et professionnelle.
Léontine Peter
Par le sport, elles ont rompu ensemble les barrières. Mais leur rencontre reste au cœur du projet : "son amitié n'a pas de prix". À travers le téléphone, les regards et sourires complices sont perceptibles, pour les deux jeunes femmes qui n'ont pas l'habitude de se dire ce qu'elles ressentent et pensent l'une de l'autre.
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"Ça va être dur de faire mieux", lâche Louise en riant aux éclats, avant de se lancer à son tour. "Depuis qu'elle est rentrée dans ma vie, j'ai beaucoup évolué sur le plan personnel et dans l'acceptation de mon handicap, confie Louise, la gorge nouée par l'émotion.
La société renvoie beaucoup de choses et je m'étais fermée aux rencontres. Son arrivée, ça a été une lueur sur ma vie et mon handicap.
Louise Dookun
Une chose dont elle est sûre, sans son handicap, elle n'aurait pas fait la rencontre de Léontine. "C'est une des plus belles choses que mon handicap m'a fait vivre."
2025, une année de défis
Le projet initial était de courir les 10 km du Lion. Puis au fil des entraînements, elles décident de se lancer dans le semi-marathon (21 km), avec comme objectif de le terminer en deux heures. Un pari fou qu'elles réussissent. Malgré les crampes de Léontine et grâce à la remobilisation de Louise, ensemble, debout, elles franchissent la ligne d'arrivée. "À ce moment-là, on est fières d'avoir monté le projet et d'avoir réussi. Voir la fierté dans les yeux de nos proches, c'était très émouvant", se souvient Léontine.
L'aventure ne se termine pas là pour ces deux compétitrices dans l'âme. Le marathon de Paris en ligne de mire, un autre projet les anime. Après avoir déposé un brevet sur ce guidon, elle souhaite en faire un modèle universel clipsable sur n'importe quel fauteuil roulant. Pour ce projet, elles ont été récompensées par le Grand prix de l'inclusion par le sport de l'Équipe. "C'est un vrai tremplin et on veut vraiment propulser ce projet", ajoute Léontine.
Aussi, avec leur association Resi-sens, elles souhaitent faire des conférences dans les centres de rééducation, les centres hospitaliers... Aller à la rencontre des patients et leur faire passer un message d'espoir.
On veut leur montrer que quand ils vont sortir, ils pourront réaliser plein de choses, leur montrer que c'est possible.
Louise Dookun
"Il y a encore de l'espoir, tout ne s'arrête pas à l'accident, la maladie ou le handicap." Le dernier objectif de 2025 est de courir cinq courses, en rappel aux cinq sens touchés par le handicap, avec certaines en Europe.
Pour réussir à relever tous ces défis, elles savent qu'elles peuvent compter sur leurs proches. "On a de la chance d'avoir. Ils nous remobilisent, nous permettent de prendre du recul... Aujourd'hui, c'est important de les mettre dans la lumière, car ils agissent dans l'ombre. Mais c'est grâce à eux qu'on y est arrivées", conclut Léontine.