VIDEOS. Eau potable : une désherbineuse pour diminuer l'utilisation des pesticides dans le Sud du Territoire-de-Belfort

Première action concrète pour améliorer la qualité de l'eau dans le Sud du Territoire-de-Belfort : une désherbineuse a été achetée par la communauté de communes du secteur pour aider les agriculteurs à diminuer l'usage des pesticides. Sur les neuf captages d'eau du secteur, celui de Saint-Dizier l'Évêque est fermé depuis 2019.

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Une fois n'est pas coutume, c'est si exceptionnel que nous avons filmé la coupure de ruban officialisant l'achat d'une désherbineuse par la Communauté de communes du Sud Territoire pour aider les agriculteurs à diminuer l'usage des pesticides. Après deux ans de préparation, de réunions, c'est la première action concrète d'un programme baptisé "L'eau d'ici" . Un travail de longue haleine alors que la société demande au monde agricole de faire rapidement évoluer ses pratiques vers un plus grand respect de l'environnement.

Le changement climatique, les longues périodes de sécheresse, le manque d'eau ont fait prendre conscience de l'urgence de protéger cette ressource surnommée l'or bleue. Dans le Sud du Territoire de Belfort, neuf captages permettent d'alimenter en eau potable et depuis 2019, celui de Saint-Dizier l'Évêque a dû être fermé. 

Depuis début 2019, l'eau d'ici n'est plus du tout utilisée pour alimenter la population de St-Dizier l'Évêque. À cause des pics de pollution par les pesticides. On a pris la décision de le fermer jusqu'à nouvel ordre parce qu'on ne peut pas garantir une qualité d'eau pérenne sur l'année à tout moment parce qu'on a des apparitions de pics. "

Claude Monnier, Vice-président de la Communauté de Communes du Sud Territoire. Janvier 2022

Eau potable : les captages du sud du Territoire de Belfort © Dominique Robbe. Francetv

En janvier 2022, nous avions rencontré Claude Monnier, vice-président à la communauté de communes du Sud Territoire lors d'un tournage sur la gestion de l'eau dans le Nord Franche-Comté. Cet élu (Sans Etiquette) est un agriculteur à la retraite, un atout pour convaincre ses anciens collègues de changer leurs pratiques afin d'arrêter de polluer les eaux bruts. C'était aussi le tout début de l'opération L'Eau d'ici.

La franchise et la pertinence de l'intervention de Vincent Rossi, chef de service à l'Agence de l'eau RMC Corse, soulignait l'importance de ce projet de territoire. 

Pour aller plus loin il faut qu'on se lance dans des mesures qui impliquent des changements plus profonds. Et pour ça, la seule façon est d'associer la profession agricole à cette construction d'une nouvelle filière ou d'une nouvelle approche en matière de culture ou d'élevage. Il faut que l'on change de mode de fonctionnement où on pouvait avoir des instances où on discutait et il n'y avait pas vraiment de concertations ou de négociations sur le fonds.

Vivien Rossi, Agence de l'eau RMC Corse. Janvier 2022

Effectivement, des agriculteurs exploitant 400 hectares de la zone de ce captage prioritaire de Saint-Dizier l'Évêque avaient déjà bénéficié d'aides pour diminuer l'usage des phytosanitaires. Entre 2014 et 2019, ils ont diminué de 40% mais cela n'a pas été suffisant pour maintenir ouvert le captage de Saint-Dizier. D'où la nécessite de changer de méthode. 

"Carte blanche pour relever le défi"

Claude Monnier précisait en ce début d'année 2022 qu'ils avaient "carte blanche" pour obtenir des résultats. Un an plus tard, nous avons retrouvé, à Delle, tous ces acteurs engagés pour la signature de la charte d'engagement l'Eau d'ici.

 

Deux salariées ont été recrutées tout spécialement pour animer ce projet : Zohra Bachiri, chargée de mission pour la protection de l'eau potable à la communauté de communes du Sud Territoire et Camille Diot, conseillère agroenvironnement à la chambre d'agriculture 25-90. Les deux femmes travaillent ensemble au quotidien. 

On essaie de remettre du lien entre les agriculteurs, les consommateurs locaux, les industriels.

Camille Diot, chambre d'agriculture 25-90

Les deux salariées insistent sur le changement de pratique, la concertation doit venir de la base. Les agriculteurs sont "impliqués de façon constructive". Leur travail est d'identifier les "leviers et les freins" pour améliorer la qualité de l'eau. Pour cela des ateliers ont été mis en place pour définir ce qui serait le plus utile à faire. 

Ce n'est pas une action ponctuelle pour résoudre un problème, il s'agit d'inscrire cette action dans la durée.

Zohra Bachiri, communauté de communes du Sud Territoire

Cette charte d'engagement a été signée par l'Etat, l'Agence de l'eau, la chambre d'agriculture 25-90, la communauté de communes du Sud Territoire, l'Agence Régionale de Santé, l'institut de recherche INRAE et le département du Territoire-de-Belfort.

Même si l'industrie, les collectivités sont concernés pour améliorer la qualité de la ressource en eau, Les agriculteurs sont en première ligne. Deux des objectifs de la charte sont d'"accompagner la mise en oeuvre de solutions alternatives pour atteindre le "zéro-pesticides" pour les collectivités et les particuliers". Une obligation pour les collectivités, l'Etat et les établisssements publics depuis 2017. Pour les agriculteurs, il s'agit de développer des formations et la mise en place de technologies pour "optimiser la gestion des cultures" et "favoriser le recours aux matériels innovants et aux traitements mécaniques" pour la gestion des cultures". 

La preuve par l'exemple

Et nous voici en juin 2023. Deux ans après les premières intentions de trouver des solutions efficaces pour préserver la ressource en eau, le premier geste concret était officiellement présenté à Thiancourt. Il s'agit de l'achat d'une désherbineuse. Un outil qui désherbe mécaniquement et qui traite en ciblant au mieux la plante. D'après Luc Jeannerot, le prestataire de services qui assure le passage de cet outil complexe, l'agriculteur peut diminuer jusqu'à 70% la dose de pesticides utilisée. 

Pourquoi les agriculteurs n'ont-ils pas acheté eux-mêmes ce nouvel outil ?

La désherbineuse a coûté 78 500 euros à la communauté de communes du Sud Territoire. La collectivité s'est aussi engagée à financer 50% de la prestation du passage de la désherbineuse sur 130 hectares. Soit un budget total de 87 655 HT pour la collectivité. 

Ce 12 juin, nous sommes retournés sur l'exploitation des frères Hubert et Dominique Moinat. Ils font partie des 12 exploitations sur les 80 du Sud Territoire à s'être investis dans la démarche "L'eau d'ici". Sans cette aide financière, ils n'auraient pas essayé cette désherbineuse sur leur parcelle de maïs. Ils ont fait leur calcul. Même avec l'aide financière, le désherbinage coûte environ 10 euros l'hectare de plus qu'un traitement conventionnel avec une dose plus importante de pesticides. Mais les frères Moinat ont voulu tout de même expérimenter ce nouvel outil. Sur les 35 hectares de leur exploitation qui sont situés dans le secteur de l'opération "l'Eau d'Ici", 11 hectares sont engagés dans le programme. Ils ont déjà diminué leur surface de maïs au profit de l'herbe pour le fourrage, ce qui diminue les traitements. 

"Tous les cinq ans, on change de méthode de travail" précisent les frères Moinat. À chaque fois, leur priorité est de minimiser le risque d'erreur et par conséquent de chute de revenus. Nous les avions rencontrés au tout début de leur engagement. Ils nous avaient fait visiter leur immense et nouveau bâtiment pour leurs 180 vaches laitières. Ils venaient d'investir 1,5 millions d'euros pour ce bâtiment qui "donne plus d'espace et de liberté" à son troupeau de vaches laitières.

On est prêts vraiment à changer de méthodes, à faire tout ce qu'il faut pour que la qualité d'eau revienne, mais il faut dans le même temps qu'on ait un minimum de résultats pour rembourser les prêts et évidemment pour nous-mêmes.

Dominique Moinat, agriculteur Gaec Du Mont

Pourquoi faut-il autant de temps pour agir ? 

Faire tourner un paquebot prend plus du temps que pour un voilier. Claude Monnier, l'ancien agriculteur devenu élu, le sait. Le défi qu'il s'est lancé prendra du temps. Avec ce premier geste concret, il espère que d'autres agriculteurs seront convaincus de l'intérêt d'agir pour diminuer radicalement l'utilisation des pesticides.

Mais cela risque de prendre du temps pour voir les efforts des agriculteurs. Alors qu'ils ont arrêté depuis des années d'utiliser de l'atrazine, la présence de ce dangereux produit est toujours détectable dans l'eau à certains endroits.

"L'eau d'Ici" fait partie des trois territoires de Bourgogne-Franche-Comté qui ont répondu à l'appel des services de l'État pour améliorer la qualité de l'eau. Si cette expérimentation permet effectivement de préserver l'eau destinée à nos robinets, elle sera proposée à d'autres communautés de communes de la région ou de France.

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