EXCLUSIF. Trafic de drogue à Avallon : l’ADN sur les scellés n’appartient pas à la maire... mais aux enquêtrices

Selon plusieurs sources concordantes, l’ADN retrouvé sur la drogue saisie dans la maison familiale de Jamilah Habsaoui n'est pas celui de la maire d'Avallon. Il appartient, en réalité, à deux enquêtrices. Comment le dossier peut-il désormais évoluer ? Nos révélations dans cette affaire.

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C’était l'un des points d’interrogation majeurs dans cette affaire hors-normes : l’ADN retrouvé sur la drogue saisie dans la maison familiale de la maire d’Avallon était-il bien celui de Jamilah Habsaoui ? Huit mois après la perquisition, nous avons la réponse, confirmée par plusieurs sources concordantes. Et elle est étonnante.

De l'ADN féminin sur les scellés

“Au moment de la perquisition [le 7 avril 2024], on trouve de l’ADN féminin sur les scellés. C’est l’une des raisons qui poussent au placement en détention provisoire de Jamilah Habsaoui”, explique une source proche de l’enquête. Dès lors, il faut vérifier : s’agit-il de l’ADN de la maire d’Avallon ? Auquel cas, la ligne de défense du clan Habsaoui, arguant que Jamilah n’a jamais été au courant du trafic opéré par son frère Rachid, serait gravement fragilisée.

► À LIRE AUSSI : ENTRETIEN. Incarcération de la maire d'Avallon pour trafic de stupéfiants : "son frère la met hors de cause"

Mais “après analyses, il est ressorti que l’ADN féminin n’était pas celui de madame Habsaoui”, poursuit la source. Détail supplémentaire : il s’agit en fait... de l’ADN d’enquêtrices ayant procédé aux investigations. Troublant. Comment cela a-t-il pu arriver ? On n'en saura pas plus. Cette information nous est confirmée par deux sources proches du dossier, mais pas officiellement par la gendarmerie, se refuse à tout commentaire. “Nous avons procédé au démantèlement d’un trafic de stupéfiants, avec la saisie de 70 kilos de cannabis et 1 kilo de cocaïne”, rappelle seulement le colonel Nicolas Nanni, commandant du groupement de gendarmerie de l’Yonne. 

Il fallait procéder à des vérifications, tirer les choses au clair.

Une source proche de l'enquête

L’absence de l’ADN de Jamilah Habsaoui sur les scellés a, en tout cas, influencé la décision de sa remise en liberté mi-mai, après six semaines de détention provisoire. “Mais la détention provisoire ne reposait pas que sur l’ADN”, nuance une source. “Il fallait procéder à des vérifications, entendre des témoins, tirer les choses au clair. D’un point de vue judiciaire, c’est un timing ‘classique’. Il est fréquent que des détentions provisoires soient demandées pour geler la situation le temps d’effectuer les vérifications. Ça ne veut pas forcément dire que la personne est coupable.”

► À LIRE AUSSI : Comment Jamilah Habsaoui, la maire d’Avallon mise en examen pour trafic de drogue, a repris ses fonctions

Comment le dossier peut-il évoluer ?

En cette mi-décembre, Jamilah Habsaoui - qui a retrouvé son fauteuil et ses fonctions de maire à la mi-octobre - reste pour autant mise en examen, pour trafic de stupéfiants. La juge d'instruction devrait décider des suites à donner à cette affaire d'ici quelques semaines.

Concernant Jamilah Habsaoui, trois scénarios sont possibles : 

  • La justice peut décider de renvoyer Jamilah Habsaoui en correctionnelle, en maintenant la mise en examen. La maire d'Avallon serait alors jugée au tribunal.
  • La justice peut décider de maintenir la mise en examen pour le moment, puis décider ensuite soit d’un renvoi en correctionnelle, soit d’un non-lieu. 
  • La justice peut faire passer la maire sous un statut moins incriminant qu'une mise en examen, comme le statut de témoin assisté. Dans ce cas, Jamilah Habsaoui ne serait pas jugée. 

En cas de renvoi en correctionnelle, la peine maximale encourue est de 10 ans de prison pour transport, détention, acquisition et cession de stupéfiants.

Contactés à propos de nos révélations, Jamilah Habsaoui et ses avocats "se refusent à tout commentaire et laissent la justice faire son travail". Rappelons aussi que la maire n'est pas la seule mise en examen dans ce dossier : ses deux frères Rachid et Benaïssa font aussi partie des personnes poursuivies. Rachid, d'ailleurs, endosse la responsabilité du trafic de drogue.

Les grandes dates de l’affaire

  • 7 avril - Jamilah Habsaoui et six autres suspects, dont ses deux frères, sont arrêtés.
  • 10 avril - Après 72 heures de garde à vue, la maire d'Avallon est mise en examen pour trafic et détention de stupéfiants et placée en détention provisoire.
  • 23 avril - La demande de remise en liberté de Jamilah Habsaoui est rejetée.
  • 25 avril - Benaïssa Habsaoui, l'un des frères de l'édile, obtient sa libération. Il reste sous contrôle judiciaire et a interdiction de séjourner chez lui, à Étaule, un village situé à 3,5 kilomètres d'Avallon.
  • 7 mai - Jamilah Habsaoui s'exprime pour la première fois via un communiqué transmis par ses avocats : "J'ai confiance en la justice", dit-elle.
  • 13 mai - Premier conseil municipal d'Avallon depuis la mise en examen de Jamilah Habsaoui. La maire se "met en retrait" de ses fonctions mais ne démissionne pas.
  • 14 mai - Après six semaines de détention, Jamilah Habsaoui sort de prison. Elle est placée sous contrôle judiciaire, avec interdiction de paraître dans l'Yonne. Selon son avocat, maître Florian Grigis, elle se sent "soulagée, très soulagée".
  • 4 juin - France 3 apprend que les lingots d'or (en réalité, 18 faux et 2 vrais) et l'argent ont été saisis chez l'un des frères de Jamilah Habsaoui.
  • 30 septembre - Le contrôle judiciaire de Jamilah Habsaoui est assoupli. Elle a l'autorisation de revenir dans l'Yonne.
  • 11 octobre - De retour en poste, Jamilah Habsaoui sort de son silence à travers une vidéo de 2 minutes, filmée à la mairie d'Avallon.
  • 14 octobre - Jamilah Habsaoui préside son premier conseil municipal depuis le début de l'affaire.
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