L'association Arts et Cultures organise une free-party ce samedi à Commana, dans le Finistère. Bien qu'elles existent depuis plus de 20 ans, les "fêtes libres" continuent à alimenter une certaine méfiance. C'est pourquoi les organisateurs veulent se structurer, pour mieux déconstruire les clichés.
C'est l'agriculteur en personne qui leur a proposé d'utiliser son champ pour organiser la fête de ce week-end. L'argent récupéré par la location compte, bien sûr, mais c'est aussi l'envie de rencontrer des jeunes qui a motivé son offre. A la veille de l'ouverture des portes, il prépare d'ailleurs un cochon grillé pour l'équipe qui s'active à la préparation du site.On est bien loin de l'image accolée habituellement au monde de la teuf. La drogue circulerait en masse, l'organisation serait chaotique ... Vincent Tanguy, porte-parole de Free-party Finistère ne nie pas qu'il puisse y avoir des drogues, comme il y en a dans n'importe quel club branché. Et c'est justement pour cela que la légalité et la sécurité sont aussi importants à ses yeux. "Le monde des free-party arrivera à se démarginaliser lorsque les aspects sanitaires seront systématiquement pris en compte. Pour cela nous avons besoin de travailler avec la préfecture", explique-t-il. Lui-même est aide-soignant. Il s'implique, sur son temps libre, pour continuer à structurer le milieu et parvenir, enfin, à briser l'image stigmatisante qui colle aux free-party.
Sous les projecteurs
Né dans les années 1990, le mouvement prend de l'essor à la fin de la décennie. La fréquentation explose, des problèmes de gestion de la foule apparaissent et certaines fêtes connaissent des débordements. Les médias s'y intéressent, les autorités réagissent. En 2001, le gouvernement Jospin fait passer la Loi sur la sécurité intérieure, qui comprend un amendement imposant une déclaration préalable en préfecture, sous peine de saisie du matériel.Depuis, pour continuer à faire la fête de façon alternative, les organisateurs ont compris qu'il fallait travailler en coopération avec les autorités. En revanche, les autorités n'ont pas toujours compris qu'il fallait travailler en coopération avec les organisateurs.
Le matériel confisqué
Fin juin, le Multison 29 de Botmeur, rendez-vous annuel de la scène départementale, en a fait les frais. Le site a déjà accueilli quatre teufs légales, mais jamais de Multison. Après avoir déposé un dossier complet, les organisateurs font face à plusieurs refus de la préfecture, "pour des motifs jamais évoqués jusqu'à présent" - le site serait trop loin du CHU, trop difficile d'accès."Nous organisons des soirées depuis des années. Nous savons ce qu'il faut faire : accord du propriétaire, aménagement du site, secours, médecins, ambulances, nettoyage ... Tout était prêt et nous prenions en charge tous les frais", explique Vincent Tanguy.
Malgré tout, la préfecture ne fournit pas d'autorisation. Les organisateurs, qui ne comprennent pas ce refus, décident de ne pas l'annuler, en dépit de l'illégalité. Le dimanche en fin d'après-midi, alors que tout s'est bien passé, les gendarmes mobiles débarquent et saisissent le matériel. "C'est une punition. Le procureur a tout saisi alors que tout était fait comme pour une soirée légale", estime-t-il. L'association attend encore sa convocation devant le procureur pour, peut-être, récupérer le matériel.
Ne pas rester sourds
Pendant l'été, le dialogue s'est rétabli avec les autorités. Une réunion interministérielle, à laquelle a participé Vincent, ainsi qu'une rencontre à la préfecture ont contribué à assouplir les relations. Pour la fête de ce week-end, la préfecture a fini par accorder l'autorisation d'organiser une manifestation avec une affluence de plus de 500 personnes. L'entrée sera payante : minimum 5€, pour payer les futurs frais juridiques et les amendes liés aux saisies du multison de Botmeur. Cette fois encore, ils prennent en charge toutes les dépenses - location du terrain, secours, ambulances, médecin, nettoyage ...Les autorités, rarement sourdes pour entendre le bruit des enceintes, commencent peut-être à écouter les revendications pacifistes et festives des amateurs de musique techno.