La date du déconfinement approche et avec elle, la nécessité de porter un masque, au moins dans les transports en commun. Des villes ont anticipé des commandes massives et organisent la distribution. D'autres refusent d'endosser une responsabilité et une charge financière supplémentaires.
540 000 masques en tissus, rien de moins, voilà la commande passée par la Ville de Rennes, associée à 91 autres communes d'Ille-et-Vilaine. "La philosophie, c'est un masque gratuit pour chaque Rennais", indique Mathilde Legeais, responsable du service de presse Ville de Rennes / Rennes Métropole.
Ils seront distribués du 8 au 17 mai, jours fériés et week-end inclus.
Lourde logistique
15 lieux de distribution sont prévus. Probablement des gymnases, mais la collectivité n'en diffuse pas la liste pour le moment.
"Chaque foyer va recevoir un courrier pour connaître son lieu et l'heure du retrait", poursuit Mathilde Legeais.
Et toutes les personnes d’un même immeuble ne seront pas invitées le même jour afin d'éviter les contacts. Le nombre de pièces délivrées sera bien sûr fonction de la composition familiale. Il y a des modèles adultes et enfants.
Il faudra produire des justificatifs d'adresse et de composition du foyer.
Appel aux agents volontaires
L'opération nécessitera beaucoup de personnels. Alors un appel au volontariat a été lancé auprès des agents pour participer bénévolement.
"Nous avons besoin de 4 200 demi-journées, on en a déjà recueillies 2 250 en 24 heures", précise Mathilde Legeais.
Les agents seront répartis dans les différents centres de distribution.
Est-ce du ressort des villes ?
La réponse est "non" pour une quinzaine de maires du pays de Lorient (Brandérion, Calan, Caudan, Cléguer, Gâvres, Gestel, Groix, Hennebont, Inguiniel, Inzinzac-Lochrist, Languidic, Plouay, Quéven). Ils l'ont écrit dans une tribune.
La question du coût
Bien sûr, ces maires morbihannais vont fournir des masques à leur personnel, bien sûr ils respectent tout à fait le choix de certaines villes voisines d'équiper en plus les habitants, mais ils relèvent que la facture sera élevée. A Rennes, par exemple, c'est 4,55 €HT l'unité, dont 50% seront payés par Rennes Métropole.
A Cléguer, le maire a fait son calcul. A 3,20 € (prix du modèle retenu), "ça me fait 11 200 euros pour 3500 habitants", indique Alain Nicolazo. Sans compter qu'on peut aussi estimer qu'il en "faudrait 5 par semaine et par personne".
Est-ce aux mairies de fournir une protection sanitaire ?
Donner un masque le 11 mai, très bien, mais ils ont une durée de vie limitée, alors les signataires se demandent pourquoi procurer un produit qu'ils ne pourront sûrement pas renouveler.
Il en va aussi de l'engagement de la responsabilité des maires en cas de défectuosité des produits.
"La question que nous posons est simple", poursuit le maire de Cléguer : "est ce aux mairies de fournir une protection sanitaire ?""Est-ce une mission nouvelle des communes ? On n'a pas la réponse de l'Etat."
Et les élus ne veulent pas non plus concurrencer les pharmacies ou les commerces qui vendront des masques.
Bientôt comme une brosse à dent
Alain Nicolazo et ses co-signataires partent du principe que les employeurs vont équiper leurs salariés et que les habitants "vont changer de paradigme". "Quand on avait une gastro, on disait aux collègues "je ne t'embrasse pas", désormais on mettra un masque. C'est un objet qui va rentrer dans la vie courante. Chacun devra se prendre en charge et bientôt on l'achètera comme on achète une brosse à dent".
D'ici là, il faudra que les circuits de distribution grand-public se structurent. Rennes et d'autres villes ont donc choisi d'amorcer la pompe afin de s'assurer que chacun sorte équipé d'un masque de qualité le 11 mai.
Des masques fabriqués dans l'Ouest
540 000 masques commandés.250 000 pour Rennes, le reste équipera 35 communes de Rennes Métropole et 56 autres communes brétilliennes.
4,55 €HT à l'unité.
Gratuits, réutilisables car lavables à 60°C.
Certification à l'état neuf par la Direction générale de l'armement (DGA).
Dans un premier temps, la Ville de Rennes s'est rapprochée de l'entreprise TDV Industries, installée à Laval, spécialisée dans la production de tissus pour vêtements professionnels, civils et militaires. C'est avec ce nouveau prestataire, connu pour avoir développé l'usage du coton biologique et équitable, que la Ville de Rennes s'est engagée pour tenter de structurer une filière bretonne de confection de masques en tissu, à partir des modèles mis en ligne par les CHU de Grenoble et de Lille.
Sept confectionneurs, coordonnés par le réseau des Ateliers FIM basés en Ille-et-Vilaine (Fougères et Liffré), en Mayenne (Ernée) et dans la Sarthe (Brûlon), ont accepté de réorienter leur activité. En un temps record, ils ont organisé l'adaptation de leurs outils de production (achat de 7 millions de mètres de fil à coudre et de centaines de milliers de ganses), grâce à l'implication de leurs salariés et aux dizaines de recrutements effectués pour l'occasion.