Huîtres plates, coquilles Saint-Jacques, pétoncles ont longtemps peuplé les fonds de la rade de Brest. C'était il y a quelque 150 ans. Depuis, ces ressources marines se sont effondrées. Comment explique-t-on le phénomène ? C'est tout l'objet de l'étude d'un chercheur brestois qui tente aussi d'apporter des réponses pour l'avenir.
Lieu de vie et d'activité de pêche, la rade de Brest a toujours nourri les hommes. Dans le passé, bien plus qu'aujourd'hui. "On est partis du constat, qu'aujourd'hui, il n'y avait plus beaucoup de bateaux en rade de Brest, explique ainsi Lucas Bosseboeuf, chercheur en écologie, une trentaine alors qu'avant, il y en avait plus d'une centaine, poursuit le doctorant. Ça signifie que maintenant, il n'y a plus beaucoup de ressources dans la rade."
Apporter un éclairage historique sur un sujet scientifique
Que ce soient les huîtres, les pétoncles, les coquilles Saint-Jacques ou encore le maërl, entre le 18ᵉ et le milieu du 20ᵉ siècle, les ressources se sont effondrées. Mais comment explique-t-on ce phénomène ? Sur ce sujet scientifique, le jeune chercheur a voulu apporter un éclairage historique.
Et, pour lui, les raisons sont multiples : "Les sources de pollutions sont envisagées, je pense aux mines de plomb et d'argent notamment qui sont situées à Huelgoat et Poullaouen, qui ont réellement affecté la rade de Brest, à partir de l'Aulne et du fond de la rade, indique-t-il. Et puis il y a des épizooties aussi, c'est-à-dire des maladies qui affectent les gisements d'huîtres plates, en particulier dans les années 1920."
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Absence totale de gestion de la ressource avant les années 70
Au début du 20ᵉ siècle, la marine devient à vapeur, puis à moteur, la pêche s'industrialise. Sur des images datant de 1965, on constate que des dizaines de bateaux draguent la rade. À l'époque déjà, les pêcheurs trouvaient leurs prises trop faibles. Il faut dire qu'il n'y avait aucune gestion de la ressource avant les années 1970.
"Nous, on attribue l'effondrement des ressources marines à l'activité de pêche. Mais je précise que ça n'est pas forcément de la responsabilité des pêcheurs, tempère le chercheur. Nous, on met en lumière qu'il n'y a pas eu de gestion des pêches de la part de la Marine pendant extrêmement longtemps."
La thèse, historique, ne veut pas accabler les pêcheurs, mais apporter un éclairage pour la gestion à venir des ressources.
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Repenser l'écosystème avant les moments de pression humaine
"Reconstituer la rade de Brest, est-ce que c'est y mettre plein de coquilles Saint-Jacques, parce qu'on pense que c'était comme ça avant ? S’interroge Yves-Marie Paulet, océanographe et directeur de thèse du doctorant. Ou est-ce que c'est penser plusieurs espèces à la fois ? Je parle de l'huître plate, mais aussi du pétoncle, de la praire, etc., poursuit le scientifique. C'est repenser un écosystème, avant ces moments très intenses de pression humaine dessus."
Pour diversifier ses sources historiques et étendre ses travaux, le chercheur fait appel à la population. Un site participatif sur l'histoire de la rade a été lancé.
(Avec Sarra Ben Chérifa)