Le parquet général de Rennes a formé un pourvoi en cassation pour une question de procédure après la décision de la cour d'appel de renvoyer en correctionnelle un policier mis en cause dans l'enquête sur un étudiant éborgné par un tir de LBD à Rennes en 2016.
Nouvel épisode dans l'affaire de l'étudiant éborgné à Rennes par un tir de LBD.
Le 26 novembre dernier, le parquet général annonçait que l'un des deux policiers mis en cause dans l'enquête sur Jean-François Martin, était renvoyé devant le tribunal correctionnel "pour le délit de blessures involontaires ayant entraîné une ITT de plus de trois mois".
Par respect de la procédure pénale
Cette décision de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes est aujourd'hui contestée par le parquet général qui a donc formé un pourvoi.
"Le juge d'instruction avait initialement rendu une ordonnance de non-lieu au titre de la légitime défense", rappelle, ce vendredi 10 décembre, le parquet général.
"La chambre de l'instruction, en appel, a quant à elle décidé de renvoyer le policier concerné devant le tribunal correctionnel alors qu'il ne bénéficiait que du seul statut de témoin assisté, poursuit le parquet général. Procéduralement, cette décision est impossible, il était nécessaire que la chambre de l'instruction mette ou fasse mettre d'abord l'intéressé en examen."
De son côté, Arié Alimi, l'avocat de Jean-François Martin, y voit un problème plus politique que judiciaire : "C'est une course contre la montre pour éviter que ce policier ne se retrouve devant les tribunaux. Le parquet général est dans son rôle, il est là pour protéger la police."
Indécent pour la victime
"Je trouve ça indécent que le procureur se mobilise dans cette direction quand on voit ce qu’il y a dans le dossier !" s’indigne Jean-François Martin, victime du tir de LBD.
"Le pourvoi en cassation du parquet général de Rennes n'est pas suspensif. Il n'empêche pas le tribunal correctionnel de se réunir", explique l'avocat, qui espère voir ce policier devant le tribunal correctionnel.
"Violences policières" en question
Jean-François Martin, étudiant en géographie alors âgé de 20 ans, avait été blessé lors d'une manifestation le 28 avril 2016 par un tir de LBD40 (lanceur de balles de défense). Il avait perdu l'usage de son œil gauche qui avait dû être énucléé. Il avait fait appel de l'ordonnance de non-lieu.
Deux policiers avaient fait usage de leur arme au moment des faits et avaient été placés sous le statut de témoin assisté pour "violences volontaires ayant entraîné une infirmité ou une mutilation permanente par personne dépositaire de l'autorité publique".
En janvier 2020, le Défenseur des droits avait réclamé des poursuites disciplinaires contre les deux policiers "pour usage disproportionné de la force".