Un Brestois de 31 ans comparaît libre au procès d'Assises, dit "Gomorra", relatif aux fusillades dans le milieu du crime organisé nantais, en avril 2019. Son ADN a été retrouvé sur un étui de kalachnikov, sur les lieux d'une fusillade. Inculpé d'aucun crime, il doit répondre de délits connexes.
Depuis l'ouverture de ce procès d'ampleur, mardi 14 janvier 2025, un Brestois de 31 ans et son avocat peinent à comprendre pourquoi le premier comparait aux côtés de membres de la criminalité organisée nantaise pour répondre de son implication dans les fusillades survenues dans le quartier sensible de Bellevue, à Nantes, en avril 2019.
Alors, Me Pierre-Hector Rustique a toujours la même question à la bouche, devant chaque personne entendue par la cour d'assises. "Est-ce que vous avez déjà vu cet homme ?", lui demande-t-il. Et inlassablement, son client se lève et son avocat se voit systématiquement répondre un "non".
En réalité, le trentenaire ne se voit plus reprocher aucun crime depuis que la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes a fait le tri dans ce dossier. Mais il doit toujours répondre de délits connexes à ces "tentatives de meurtre en bande organisée".
"Vous vous êtes trompés de porte ?"
Son ADN a en fait été découvert sur un étui percuté de kalachnikov retrouvé place Mendès-France, à Nantes, sur les lieux d'une fusillade. De même, ses propos tenus lors de sonorisations interrogent. D'autres protagonistes en lien avec les armes de ce dossier ont pourtant fait l'objet de poursuites devant un simple tribunal correctionnel.
Son profil tranche ainsi avec ses co-accusés devant la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine : le jeune homme, désormais libre, travaille en contrat à durée indéterminée (CDI) depuis plusieurs années dans un garage automobile. Son employeur a d'ailleurs décidé de lui garder la place durant son incarcération puisqu'il lui donne toute "satisfaction".
"J'ai été braqué dans tous les sens, les flashs, les lasers, les mitraillettes. On me parlait tentative de meurtre, trafic d'armes", s'est souvenu le principal intéressé le lundi 20 janvier 2025. "C'est une blague, vous vous êtes trompés de porte ?", avait-il donc demandé aux policiers venus l'interpeller.
"La détention, ça m'a anéanti"
Le trentenaire, père de trois enfants, a ainsi découvert l'univers carcéral et semble y avoir laissé quelques plumes. "La détention, ça m'a anéanti, je ne pouvais plus dormir", a expliqué celui qui est passé "neuf fois" devant la juge d'instruction pour solliciter sa remise en liberté, en vain. "Je n'ai pas voulu expliquer à mes enfants que la justice mettait des innocents en prison : je ne veux pas qu'ils aient la haine envers la justice, j'ai préféré dire que je travaillais là-bas et que j'y étais bloqué pendant le Covid", a-t-il aussi détaillé devant la cour d'assises.
Sa patronne le soutient activement
Depuis sa sortie de prison, le Brestois a donc retrouvé son poste "aussitôt" et cumule aujourd'hui ce job avec "un deuxième contrat de travail" dans une poissonnerie. "Aujourd'hui j'ai deux boulots, je roule avec une 406 qui a vingt ans (...) et je suis fiché à la Banque de France", a soufflé ce père de famille devant les juges ce lundi 20 février 2025.
"J'ai reçu des courriers de mon salarié, il semblait effondré...", a pris soin d'écrire sa patronne à la justice. "Pour moi, il allait forcément sortir bientôt." Elle avait donc pris attache avec Me Pierre-Hector Rustique pour "savoir ce qu'il en était", ce qui a manifestement accéléré sa sortie de prison.
Depuis 2019, la vie de ce jeune père de famille est toutefois suspendue au verdict qui est attendu ce vendredi 24 janvier 2025 à la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine. Son casier judiciaire ne fait état que d'une "mention ancienne" pour conduite sous stupéfiants, pour laquelle il avait écopé d'une simple amende.
"Je n'augmenterai pas son salaire tant que je ne serai pas sûre qu'il va être acquitté", avait aussi dit la patronne du garage automobile brestois. Son salarié, qui encourt théoriquement jusqu'à dix ans de prison, sera fixé sur son sort ce vendredi 24 janvier 2025.