Nouvelle journée de mobilisation ce jeudi contre la réforme des retraites, avec des manifestations à Saint-Brieuc, Vannes ou Rennes, alors que le texte est actuellement examiné à l'Assemblée nationale, dans un climat de grande tension, qui n'a pas permis l'avancement du travail des députés.
"Et la retraite elle est à nous ! on s'est battu pour la gagner, on se bat pour la garder !" Le slogan est scandé dans les rangs du défilé rennais, qui a réuni près de 3000 manifestants, selon les syndicats, 1 500 selon la préfecture. Nouvelle journée de mobilisation interprofessionnelle contre la réforme des retraites ce jeudi, avec des manifestations annoncées partout dans la région, à Rennes donc, mais aussi à Brest, Morlaix, Quimper, Lorient, Vannes, Saint-Brieuc, ou encore Saint-Malo. Les syndicats ne désarment pas en cette période de vacances scolaires et alors que le texte est examiné à l'Assemblée nationale. La dernière journée de mobilisation, le jeudi 6 février avait rassemblé 4 000 personnes à Rennes et quelque 2 000 à Brest.
Plusieurs centaines de manifestants dans les rues de #Rennes pour la 10eme journée nationale de mobilisation contre la #reformedesretraites pic.twitter.com/dzy5YHxxr4
— France 3 Bretagne (@france3Bretagne) February 20, 2020
Un cortège, qui a Rennes a été émaillé de feux de poubelles allumés par les manifestants, de l'utilisation de gaz lacrymogène et de canon à eau du côté des forces de l'ordre.
A Saint-Brieuc, le cortège parti en début d'après-midi du Parc des promenades a rassemblé plusieurs centaines de manifestants, entre 400 et 500 personnes. Un défilé qui s'est déroulé dans le calme et qui s'est arrêté devant la permanence du député Bruno Joncour, avant de se disperser vers 15h.
Pour ce qui est du texte, ce mercredi soir, l'examen de la réforme des retraites a viré au quasi-blocage à l'Assemblée nationale au troisième jour des débats. Les rappels au règlement et suspensions se sont succédé dans une grande tension, empêchant l'avancée des travaux sur les milliers d'amendements.
Le chant des gilets jaunes "on est là"
Dès l'ouverture de la séance, le ton a été donné avec des rappels au règlement de LR réclamant des éclairages sur le financement de la réforme, et de la gauche dénonçant les règles en vigueur pour l'examen des 41.000 amendements. Plusieurs suspensions de séance ont eu lieu, entrecoupées de l'examen d'une poignée d'amendements, rappelant la paralysie de juillet 2018 lors de l'examen du projet de révision constitutionnelle, victime collatérale de l'affaire Benalla. Lors d'une des multiples pauses, à la veille d'une nouvelle journée interprofessionnelle de mobilisation, plusieurs insoumis et communistes ont entonné le chant des gilets jaunes "on est là".
"Un concours Lépine de l'obstruction désolant"
"Quelle image donnons-nous de nos travaux? C'est de l'antiparlementarisme de base", s'est offusqué le co-rapporteur Nicolas Turquois (MoDem), applaudi par la majorité,
debout, tandis que le secrétaire d'Etat Laurent Pietraszewski plaidait pour en revenir au débat. Sur Twitter, des élus disaient leur "honte" que l'Assemblée "se transforme en
cirque" ou déploraient "un concours Lépine de l'obstruction désolant". "Attention, vous jouez avec le feu", a aussi lancé le chef de file des députés LREM Gilles Le Gendre à l'opposition. "La question n'est plus celle du débat sur les retraites mais celle de la défense des institutions", s'est-il égosillé, dans une intervention conclue par une standing
ovation des "marcheurs" et une énième suspension de séance.
Les débats patinent depuis lundi
Depuis lundi, les débats patinent sur cette réforme visant à créer un système "universel" de retraites par points. Après de longues discussions sur le titre même du projet de loi, les députés n'ont entamé qu'en soirée l'examen de l'article 1er, consacré aux "principes généraux". Avec Annie Genevard (LR) au perchoir, la tension est un peu retombée, dans un hémicycle toujours assez fourni. Droite et gauche ont contesté que les objectifs de la réforme soient l'"équité", la "solidarité" ou encore la "liberté de choix pour les assurés", comme mis en avant dans le projet de loi dans un pur "geste littéraire", loin "de la réalité", selon les mots d'Eric Woerth (LR).
Alors que la co-rapporteure Corinne Vignon s'est prévalue du soutien à la réforme des Français rencontrés par les "marcheurs", le communiste Sébastien Jumel a demandé qui elle avait pu rencontrer dans ces "réunions Tupperware", s'attirant claquements de pupitre et accusations de sexisme par la majorité, avec une nouvelle suspension de séance à la clé.
Le spectre du 49-3
Dans l'espoir que le calendrier puisse tenir, les députés siègeront au moins jusqu'au 6 mars, avec des travaux ce week-end. Le spectre de l'utilisation du "49-3", arme de la Constitution qui permet au gouvernement d'abréger les débats et de faire adopter un projet de loi sans vote, plane. "On va vers l'inconnu total", admet une source gouvernementale, qui dit assister "à ce triste spectacle bras ballants".
Le recours au "49-3", serait-il une défaite? "Pas du tout", répond Florian Bachelier (LREM): "Il ne faut pas que la majorité s'enferme dans le piège tendu par l'extrême gauche" et "chacun prendra ses responsabilités". Lundi soir, un "marcheur" prédisait: "soit c'est pénible mais on y arrive (...), soit ils font du Benalla et ça bloque complètement..."