Story, une pomme conçue pour réduire le recours aux pesticides

Dans le cadre du projet "Cap zéro phyto", l'Inrae des Pays de la Loire, l'Institut Agro Rennes-Angers et l'Université d'Angers ont sélectionné une nouvelle variété de pommes, résistante à certaines maladies et ainsi moins gourmande en pesticides. Mais la génétique ne fait pas tout : des coups de pouce en lumière ou la proximité d'autres plantes concourent à améliorer les défenses du pommier.

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Elle ressemble à la pomme de Blanche-Neige, mais sans le poison : dans ses vergers expérimentaux de Beaucouzé, près d'Angers, l'Institut de recherche agronomique Inrae invente les fruits de demain, résistants aux maladies et qui grandiront sans pesticides, ou presque.

La France produit 1,5 million de tonnes de pommes chaque année, troisième producteur européen derrière la Pologne et l'Italie. 

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C'est sur ce campus du Maine-et-Loire qu'est née Story, une pomme d'un rouge profond, croquante, très sucrée, à l'issue de vingt ans de recherches.
Cette pomme de conte de fées "possède un gène de résistance à la tavelure", ce qui permet de réduire de 30% à 40% les traitements pesticides contre cette maladie causée par un champignon, explique le chercheur de l'Inrae François Laurens, qui a dirigé l'équipe ayant conçu Story.

Sur les pommiers, 35 traitements aux pesticides par an en moyenne


Avec l'oïdium, la tavelure est la principale affection fongique du pommier. C'est contre ce champignon que s'effectue plus de la moitié des nombreux traitements aux pesticides, 35 en moyenne par an. Le fruit préféré des Français reste l'un des plus traités.
La maladie de la tavelure cause des lésions brunes sur les feuilles, altérant la photosynthèse, et donc la capacité des plantes à se nourrir, et des taches sur les fruits les rendant impossibles à commercialiser.

Moins de pesticides, plus d'immunité

C'est notamment contre cette menace majeure pour la pomme que l'Institut de recherche en horticulture et semences (IRHS), sous la tutelle de l'Inrae, de l'institut Agro Rennes-Angers et de l'université d'Angers, a lancé un vaste programme de recherche : le projet "Cap Zéro Phyto".
Zéro pesticide, ou presque, c'est faire mieux que pour la pomme Story. "Il n'y aura pas de solution unique, nous travaillons dans plusieurs directions en même temps", souligne Emmanuelle Chevassus-Lozza, présidente du centre Inrae des Pays de la Loire.
De la sélection des plants à l'arbre greffé, le projet "Cap Zéro Phyto" propose des "combinaisons de cinq leviers principaux destinés à augmenter l'immunité du pommier contre ses bioagresseurs", indique la chercheuse Marie-Noëlle Brisset, traversant les serres qui abritent des milliers de plantules vert tendre.

Cinq leviers contre les maladies


Parmi ces leviers, détaille-t-elle, figurent "la génétique", au travers de la sélection variétale conventionnelle, des produits "stimulateurs de défense des plantes", des "flashs d'UV-C", un rayonnement spécifique d'UV qui stimule les défenses naturelles des plantes, notamment utilisé sur la vigne contre le mildiou.
Elle évoque aussi "les restrictions d'azote" et "les plantes de service". Ces dernières peuvent par exemple avoir un effet répulsif sur les insectes nuisibles, comme la menthe, ou favoriser la fixation de l'azote, comme la féverole.

100 000 pépins et 20 ans de recherche

Dans un premier temps, ces différentes solutions sont expérimentées sur de très jeunes plants de pommiers élevés par milliers sous serre. Puis les solutions les plus prometteuses sont testées sur des arbres dans de grands pots. 
Vient enfin l'épreuve du champ, où de jeunes arbres ont été plantés dans plusieurs vergers dédiés à l'étude de chaque levier ou des leviers en combinaisons.
Cette recherche de la pomme de demain passe par la création de nouvelles variétés : la candidate idéale est "facile à produire avec un rendement élevé et régulier", "se conserve bien" et "répond au goût des consommateurs, qui finalement ont le dernier mot", rappelle François Laurens.
Pour parvenir à ce résultat pour la variété Story, le chercheur a travaillé avec des biologistes et généticiens de l'Inrae, mais aussi avec la société Novadi, regroupant notamment des pépiniéristes, qui se sont chargés de l'hybridation et d'une partie de la sélection : "Cela a permis de gagner au moins cinq ans".
Or le temps est un facteur-clé quand le dérèglement climatique favorise champignons et bactéries qui attaquent sans relâche les défenses des plantes. 

Le pommier est né il y a 10 000 ans dans une région qui correspond au Kazakhstan actuel : il est arrivé avec son cortège de bioagresseurs, mais pas toujours avec leurs prédateurs.

Arnaud Lemarquand

Directeur Inrae de l'unité expérimentale horticole

Il faut attendre le 16e siècle pour voir les prémices de la culture du pommier domestique en Bretagne. Particulièrement adaptée au climat, doux et humide, la culture de la pomme prolifère alors, pour devenir l’un des piliers de l’agriculture bretonne.

Selon l'Inrae, il faut en moyenne 20 ans et 100 000 pépins, pour mettre au point une nouvelle pomme.
Sofia BOUDERBALA / AFP

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