Streaming sportif : amendes requises contre cinq hommes pour des sites illégaux

"Robins des bois" ou escrocs ? Des amendes de 5 000 à 100 000 euros ont été requises contre cinq hommes jugés devant le tribunal correctionnel de Rennes pour avoir monté des sites internet diffusant illégalement des rencontres sportives en direct. Canal Plus réclame près de 30 millions d'euros.

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"Bienvenue à tous sur le meilleur site de streaming gratuit", annonçait la page d'accueil d'un des 30 sites internet, diffusant des matchs de football, de basket ou de rugby, réservés normalement aux abonnés de chaînes payantes. De 2014 à 2017, les neuf sites les plus fréquentés de cette "galaxie" ont attiré pas moins de 7,5 millions de visiteurs uniques, selon une estimation citée à l'audience. 

On ne parle pas de deux ou trois captations de programmes entre copains, a lancé d'un ton inquisiteur le président du tribunal François Lavallière.

Grâce à un logiciel spécial, les prévenus capturaient le flux vidéo de leur abonnement Canal Plus, beIN Sports ou RMC Sports, pour ensuite le retransmettre vers un serveur. Pour les chaînes étrangères, des liens vers des sites de contenus illégaux étaient mis en ligne, selon les éléments de l'enquête cités à l'audience. Les visiteurs des sites étaient ensuite "bombardés" de publicités, qui auraient rapporté près de 230 000 euros, versés par 50 régies publicitaires entre 2014 et 2018.

"Tous les revenus que vous voyez là, ce n'est pas que du streaming", s'est défendu Olivier O., 46 ans, créateur des sites, assurant qu'une partie des fonds venait de sites légaux. "J'arrivais pas à faire la différence entre les deux, j'étais pas assez ordré", a-t-il avancé.

Durant la période des faits, Olivier O., qui est aussi poursuivi pour blanchiment, ouvre des comptes en Suisse et aux Iles Vierges, voyage aux Seychelles, au Sénégal, en Guadeloupe et à l'île Maurice. Il achète une maison et un "ensemble immobilier" près de son domicile. Quelque 280 000 euros ont été saisis dans le cadre de l'enquête (maison, voiture et comptes bancaires). 

Assurant n'avoir que des connaissances "modestes" en informatique, cet ancien vendeur de photocopieurs s'était lancé en 2011 dans le streaming, aidé par un de ses anciens collègues de travail Yannick T., informaticien de 42 ans.

Hormis les deux Bretons, les autres prévenus ne s'étaient contactés que par des forums de discussion. "On est avant tout des passionnés", s'est justifié Olivier O., plein d'aplomb à la barre. "Je suis un passionné de foot mais je ne le regarde même pas à la télé. A la radio, c'est dix fois mieux", a-t-il précisé.
 

"Pas interdit"


Une passion qui n'est pourtant pas partagée par Yannick T., rémunéré 55 000 euros entre 2014 et 2018 pour diffuser des matchs et administrer les sites.

Pour moi, c'était pas interdit, s'est-il justifié, blafard, à la barre. J'avais pas conscience. 

Les autres prévenus étaient peu ou pas payés pour leur travail de diffuseur ou de modérateur du site. Ainsi, le Girondin Jean-Éric M., 56 ans, qui dit avoir agi "dans l'esprit Robin des Bois" car "il y avait plein de gens qui n'avaient pas les moyens de payer des abonnements".  

D'où sa "colère" lorsqu'il a appris les sommes touchées par Olivier O. qui lui "tenait un discours misérabiliste", disant qu'il gagnait seulement "de quoi payer les serveurs". Franck C., 48 ans, originaire de Roubaix (Nord), dit lui avoir été pris pour un "nigaud".

Le procureur Arnaud Marie a requis 100 000 euros d'amende contre le créateur des sites Olivier O. et 20 000 euros contre Yannick T. Il n'a réclamé qu'une amende de 5 000 euros à l'encontre des trois autres prévenus.

"Ce n'est pas une petite affaire, un petit site internet", a lancé Me Richard Willemant, avocat de Canal Plus, évoquant un dossier "à un point crucial dans la lutte contre le piratage du streaming sportif".

Me Hélène Laudic-Baron, avocate de la défense, a elle fustigé des "fantasmes". "On n'a plutôt affaire à une équipe de pieds nickelés qu'à une bande organisée", a-t-elle tranché.

Canal Plus réclame 29,9 millions d'euros de dommages et intérêts aux prévenus, dont la plupart ont des revenus modestes. Les sociétés SFR et beIN Sports se sont également portées parties civiles.

Selon un rapport parlementaire, le streaming en direct des retransmissions sportives représente entre 10% et 20% des audiences réalisées à la télévision.

Le jugement doit être rendu le 28 avril à 9 h.
 
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