Ce 21 janvier 2025, des éleveurs de trois communes de la Baie du Mont Saint Michel ont découvert des agneaux et des brebis blessés ou tués. Un des agriculteurs avait observé un animal ressemblant étrangement à un loup. La caméra de surveillance d’un autre a filmé le prédateur qui a dévoré un de ses agneaux. Tous s’inquiètent et s’interrogent. S’agit-il d’un loup ? Que fait-il là ? Et risque-t-il d’attaquer à nouveau ?
En arrivant dans les prés-salés au petit matin ce mardi 21 janvier, Raphaël Morin a tout de suite vu qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas. "Les brebis étaient à la barrière, sans leurs agneaux."
Et soudain, dans les herbus, il a vu un animal devant lui. "Il avançait, il sentait…Il avait une démarche de loup." Raphaël Morin l’a observé pendant près d’un quart d’heure à la jumelle et a vite appelé un de ses collègues :"Il y a un loup, viens vite !"

"Il y a un loup, viens vite !"
Quand il est arrivé, l’animal s’était enfui… Mais dans les prés, Raphaël Morin a découvert deux agneaux tués et consommés, trois brebis blessées, et quatre agneaux qui s’étaient ensevelis dans la vase et qui sont morts de froid. Au total, six animaux morts et sept blessés.
L'éleveur pense que l’animal a attaqué par deux fois. "Il a encerclé les moutons, on voit ses traces", explique-t-il. Il a fait un moulage en plâtre des empreintes laissées dans la vase.
Il ignore encore s’il s’agit d’un loup. Les agents de l’Office Français de la Biodiversité sont venus effectuer des prélèvements. Pour l’heure, il n’a aucune certitude…
Deux autres élevages touchés la même nuit
Mais un peu plus tôt dans la nuit, deux autres troupeaux ont été attaqués, à quelques kilomètres de Céaux, où est installé Raphaël Morin. Et dans les deux cas, les éleveurs ont fait les mêmes macabres découvertes. À Marcilly, cinq brebis ont été attaquées. Au Mesnil-Ozenne, un agneau a été mangé
Gilbert Datin, avait installé une caméra de surveillance dans sa bergerie. Aux alentours de 3h30 du matin, l'appareil a filmé l’animal qui a dévoré l'agneau. Là aussi, les images sont analysées par l’Office Français de la Biodiversité.
Des éleveurs inquiets
Raphaël Morin se dit un peu en colère, et beaucoup dans l’incompréhension. Il s’interroge sur la présence de cet animal. "Si c’est un loup, que fait-il là ? On est dans une zone où il y a beaucoup d’habitations, un réseau routier, et puis on est dans une baie, très humide."
Mais surtout, l’éleveur aimerait savoir, "on fait comment maintenant ?"
"Il va falloir qu’on comprenne pourquoi il est là, prévient-il, qu’on comprenne ce qu’il fait là, s’il va rester ou pas. Parce qu’il va y avoir d’autres attaques, c’est sûr. Mais on fait comment pour savoir où il est ? Parce que nous, si on sait qu’il y a un loup à proximité, on peut mettre en place des mesures préventives sur l’élevage, augmenter la surveillance."
L’éleveur ne croit guère mesures adoptées dans d’autres régions de France. En montagne, et de l’autre côté du Couesnon, en Bretagne, certains les éleveurs ont l’aide de chiens Patou qui protègent les troupeaux. "On nous dit qu’il faudra peut-être clôturer les brebis, mais aujourd’hui on n’a pas le droit de le faire. Et si on installe des barrières, cela aura un impact sur les paysages, sur notre travail. On nous dit qu’il faut rentrer les animaux, mais on nous dit aussi qu’on n’a pas le droit de construire de bergeries…"
Quelles solutions ?
En 2021 et 2023, Yannick Frain, éleveur et président de l’AOP prés-salés du Mont-Saint-Michel a vécu deux attaques de son troupeau. "C’étaient des chiens, précise-t-il, mais nous sommes stressés, inquiets… " En 2021, il a eu 11 animaux blessés, 17 en 2023. "Et quand il faut aller chercher les bêtes, se souvient-il, on est tout seul. C’est comme si on nous arrachait nos enfants."
Alors, dès l’annonce de ces nouvelles attaques, il a pris des mesures radicales :"nous avons carrément et volontairement décidé de laisser les animaux dans les pâtures plutôt que de les mettre au bord de la mer sur les prés-salés. On ne sait pas si c’est un loup, s’il va revenir, mais on préfère être prudent. Comme ça, en cas de besoin, ce sera plus facile de faire de la surveillance et de rentrer le troupeau rapidement. Et bien sûr, tous les soirs, on va rentrer les moutons dans la bergerie."
Les éleveurs attendent des réponses et de l’aide."Nous sommes déjà peu nombreux, s’inquiète Yannick Frain, si demain, on ne nous donne pas un petit coup de main, il n’y aura plus d’éleveurs dans la baie du Mont-Saint-Michel."
(Avec Valérie Chopin)