Le tribunal de commerce de Rennes a donné son feu vert pour la reprise de la Fonderie de Bretagne par le fonds d’investissement allemand, Callista Private Equity. C’était le seul candidat à la reprise de l’entreprise dont Renault souhaitait se séparer.
"C’était Callista ou rien, alors forcément, c’est mieux Callista ! Le seul avenir qui nous est imposé, pas proposé, c'est Callista. "L’enthousiasme de Maël Le Goff, le délégué CGT de la Fonderie de Bretagne, est à la hauteur de ses craintes pour l’avenir. La reprise de la Fonderie par le fonds d’investissement allemand, Callista Private Equity sera effective la semaine prochaine, sans doute le 2 novembre.
"Comme des vieilles chaussettes"
"On doit rencontrer la direction le 3 ou le 4 novembre, on verra, mais de toute façon, c’est une décision qui est subie par les salariés, commente le délégué amer. Renault a décidé d’externaliser sa production, et de la délocaliser. On nous a laissé tomber comme des vieilles chaussettes. Les salariés sont écœurés de la façon dont ils ont été traités après tout ce qu’ils ont donné. Il faut passer à autre chose. Pour l’instant, on attend de voir."
"Callista ou rien"
"C’était Callista ou rien, il n’y avait pas d’autres alternatives", tempère Fabrice Vély, le maire de Caudan où est installée la Fonderie. "Au début, d’autres repreneurs s’étaient présentés, mais ils n’étaient pas tous sérieux. Là, nous avons 290 emplois sauvés. Certes, reconnait l’élu, nous n’avons pas de garantie éternelle, mais il y a quelques mois, il était question de fermer la boutique."
La Fonderie de Bretagne est installée près de Lorient depuis 1966. Elle fabrique des pièces pour l’industrie automobile. Elle a compté jusqu’à 1.600 salariés dans les années 1980.
Après bien des déboires, les effectifs sont aujourd’hui divisés par cinq. Mais la Fonderie fait partie du paysage, "elle est au cœur du territoire, poursuit Fabrice Vély. Il y a une vraie volonté de garder des industries en France. Il faut retrouver la confiance. Les gens ne s’intéressent pas forcément à une entreprise quand l’histoire qu’elle raconte n’est pas rose. "
Callista s'est engagé à ne procéder à aucun licenciement jusqu'en 2026.
200 millions d’euros
La maire veut y croire. "Il y a un challenge à relever. Renault va mettre quelques 200 millions d’euros pour éponger la dette et moderniser le site. Il faut changer le four, réduire les consommations en énergie pour préparer l'avenir."
"On parle de réindustrialiser la France, mais ce ne sont que de belles paroles, s’inquiète Maël Le Goff. Callista nous reprend mais n’apporte pas d’argent. Ça veut dire quoi ? "
L’été dernier, devant les portes de la Fonderie, certains salariés s’interrogeaient sur l’arrivée de Callista et évoquaient la possibilité que Renault sous-traite la fermeture.
"Sur les 11 dossiers de reprise de Callista, 9 se sont soldés par des échecs, des entreprises qui ont fermé, lance le délégué CGT. C’est difficile d’être optimiste".
Trouver des nouveaux clients
Aujourd’hui, 90% de la production de la Fonderie est destinée à Renault, 10% à BMW. En 2025, le groupe automobile français a annoncé qu’il ne représenterait plus que 50% de l’activité.
"Callista va devoir trouver de nouveaux clients, mais personne ne nous attend, Peugeot a sa propre fabrication. Certaines fonderies ont fermé, mais c’est un marché qui est rude" prévient Maël Le Goff.
"Cette diversification est souhaitée par tout le monde, rassure le maire de Caudan. L’usine a déjà montré qu’elle savait faire des choses. On me dit que de nouveaux clients se présentent. Nous ne sommes pas encore au stade des commandes mais ils demandent des chiffrages."
"Ces derniers temps, l’usine tourne à 60% de ses capacités, rappelle Maël Le Goff, et cette histoire, c’est un peu un chat qui se mord la queue. Moins on produit, moins on est compétitifs, moins on est compétitifs, moins on a de clients et moins on produit, etc etc…"
Tourner la page Renault
"Renault nous a fait beaucoup de mal , conclut le délégué syndical. La trace qu’il laisse, c’est une plaie béante. En un an, 70 salariés sont partis. Ce n’est pas facile de croire en l’avenir." Pour beaucoup à la Fonderie, Renault c'était le grand frère, mais il s'en va.
"Il faut tourner cette page, répète le maire, ce qui rassurait avec Renault, c’est qu’il y avait de l’argent derrière, mais Renault ne voulait plus de la Fonderie. Ce qu’il faut maintenant, c’est des décisions industrielles, pas des décisions politiques."
"Nous les élus, nous serons là pour vérifier que les promesses sont tenues. Nous serons les vigies. La fonderie continue, le suivi de la Fonderie continue aussi."