"François Hollande tente d'affirmer un leadership sur la famille socialiste. C'est un problème" : après la censure refusée par les socialistes, est-ce la fin du NFP ?

Le Nouveau Front populaire navigue en eaux troubles depuis le refus du PS de voter la motion de censure déposée par La France insoumise, le 16 janvier. En Centre-Val de Loire, s'ils reconnaissent les divergences entre les partis, les députés de gauche préfèrent penser que l'union survivra.

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Le débat revient presque toutes les semaines : le Nouveau Front populaire est-il au bord de la rupture ? L'union de la gauche va-t-elle s'effondrer ? Cette fois-ci, il ne semble pas y avoir d'exagération à dire que "ça ne va pas bien", comme le concède Charles Fournier.

Député écologiste de Tours, il a voté, jeudi 16 janvier, la motion de censure déposée par La France insoumise, tout comme son collègue écologiste du Loiret, Emmanuel Duplessy. Et ce malgré des négociations les semaines précédentes, pour tenter d'obtenir des concessions de la part de François Bayrou et de son gouvernement. Les communistes aussi ont participé aux discussions, et ont voté la censure (à l'instar du député du Cher, Nicolas Sansu). Les socialistes aussi ont participé aux discussions, et, pour la grande majorité (58 sur 66) n'ont pas voté la censure. Finalement, la motion n'a pas été adoptée, et le gouvernement n'a pas vacillé.

Une "trahison" de la part du PS, a fustigé le chef de file des insoumis, Jean-Luc Mélenchon, ce dimanche. "Le mouvement unitaire, c'est nous", a-t-il poursuivi, invité de l'émission "Le Grand Jury RTL/Le Figaro", ajoutant que, pour lui, "le Parti socialiste n'est plus un partenaire". Seulement "un allié, et encore de circonstance". Face à lui, François Hollande s'est félicité, dans La Tribune, que le PS ait assumé une volonté de "compromis", critiquant "la posture de LFI dont la seule perspective est de bloquer la vie institutionnelle et de provoquer une élection présidentielle".

"On ne peut pas acter à chaque fois la mort du NFP"

Bref, l'union n'avait pas été aussi désunie depuis longtemps. De là à acter le retour des deux gauches irréconciliables ? En Centre-Val de Loire, les parlementaires NFP n'y croient pas. "Les brouilles sont beaucoup au niveau des appareils, assure Charles Fournier. Il y a encore plein de gens qui s'apprécient, et peuvent encore travailler ensemble." Pour lui, la séquence "caricature les liens au sein du NFP". Car, s'il "ne partage pas la position du PS de ne pas avoir voté la censure", il dit "respecter leur choix" :

Dans les compromis faits par François Bayrou, les socialistes ont dû voir le verre à moitié plein. Moi, je l'ai vu quasi vide. Mais il n'ont pas encore voté le budget, donc je n'y vois pas encore une trahison.

Charles Fournier, député Les Écologistes d'Indre-et-Loire

Conscient des grandes tensions qui fracturent plus que jamais le NFP, le député écologiste soutient que l'union de la gauche est "un impératif", sans lequel "il n'y aura pas d'issue favorable" aux élections. Il regrette ainsi "qu'une certaine partie du PS joue à faire de LFI la part noire du NFP", tout autant qu'il "ne partage pas non plus les invectives de LFI qui se sent trahie".

Des désaccords, il y en aura d'autres. On ne peut pas acter à chaque fois la mort du Nouveau Front populaire.

Charles Fournier, député Les Écologistes d'Indre-et-Loire

Laurent Baumel, député socialiste d'Indre-et-Loire, semble partager cette analyse. S'il ne nie pas que "cette divergence a des conséquences sur notre unité", il rappelle que "le Nouveau Front populaire n'est pas un parti", mais "une coalition" pleine de diversités d'opinions.

Plus d'accords que de désaccords

Et selon lui, ces diversités se situent sur la stratégie plus que sur le fond. "Ce n'est pas parce qu'on a des divergences stratégiques sur la censure et sur la suite de la législature que les convergences de fond sur l'écologie, le social et l'économie disparaissent", soutient-il. "Le programme du NFP existe toujours, c'est encore la ligne de fond", abonde Charles Fournier.

D'ailleurs, au sein du groupe socialiste, huit députés ont voté la motion censure déposée par LFI. Laurent Baumel a bien suivi la consigne de groupe, mais soutient avoir "plutôt plaidé pour la censure" auprès de ses collègues. Une ligne qu'il défend après avoir constaté que les concessions faites par François Bayrou n'étaient peut-être pas "suffisantes".

Depuis, le député craint "que le PS soit à nouveau l'objet de méfiance", et ne trouve "pas évident" de devoir justifier à des électeurs de gauche de ne pas avoir censuré un gouvernement dans lequel Bruno Retailleau est ministre. Ceci dit, le député observe que "de nombreux électeurs nous adressent une demande de stabilité", et affirme "comprendre la décision de ne pas censurer".

Vers un Parti socialiste "hollandisé" ?

Également membre de la direction du PS et proche d'Olivier Faure, le premier secrétaire, Laurent Baumel voit d'un mauvais œil la récupération de cette divergence PS-LFI par François Hollande. L'ancien président de la République se targue en effet d'avoir été l'un des artisans de cet accord avec François Bayrou, et semble vouloir reprendre la main à Olivier Faure, dont il critique régulièrement la stratégie d'alliance avec La France insoumise.

François Hollande tente d'affirmer un leadership sur la famille socialiste. C'est un problème. Cela fait huit ans que je travaille autour d'Olivier Faure pour essayer de nous débarrasser de l'image laissée par le quinquennat Hollande. Alors dire qu'il donne la ligne, qu'il fixe la stratégie, c'est faux, et c'est un problème.

Laurent Baumel, député socialiste d'Indre-et-Loire

Car, "si demain, le PS est perçu comme de nouveau "hollandisé", il sera plus compliqué de bâtir une stratégie d'union de la gauche, même sans Mélenchon". Et ça, Laurent Baumel est bien placé pour le savoir, lui qui fut négociateur pour le PS lors des discussions ayant abouti aux créations de la Nupes en 2022, puis du NFP en 2024. Alors qu'un nouveau congrès du PS, lors duquel le parti se choisira un premier secrétaire, le député d'Indre-et-Loire promet de "ne pas rester inerte". De maintenir à la tête du parti "une nouvelle génération qui a exercé son droit d'inventaire".

Ces divisions au sein du Parti socialiste, deuxième groupe du NFP par le nombre de députés, inquiète Charles Fournier. "Pas habitué à commenter ce qui se passe chez les autres partis", il dit espérer que "la vision unitaire triomphe". "Allions nos forces. Si on ne le fait pas, ça nous sera très reproché."

Le difficile jeu d'équilibre du Parti socialiste

Reste à savoir ce que ce NFP fissuré deviendra dans les prochaines semaines, et notamment pendant les discussions en vue du budget. Sur le sujet des retraites, Jean-Luc Mélenchon qualifie de "combine pourrie" les concessions acceptées par le PS. Soit l'ouverture de nouvelles discussions avec certains syndicats et partenaires sociaux. "Nous avons été mandatés pour abroger la retraite à 64 ans, point", a lancé sur RTL et Le Figaro le leader insoumis. Voyant dans ces futures discussions de "l'esbroufe". "Jamais le Medef n'acceptera."

Laurent Baumel est bien conscient du défi posé au Parti socialiste. "Soit on met la barre des exigences très haut, on n'obtient rien et on censure. Soit on la met très basse, on ne vote pas la censure, mais ce sera perçu..." Il ne termine pas sa phrase. Les divergences sont peut-être désormais aussi fortes entre le PS et La France insoumise qu'entre les deux franges du PS. "Je suis inquiet", concède le député.

Laurent Baumel et Charles Fournier promettent, en tout cas, de repartir au travail en vue du budget. "Nous ferons des propositions, comme nous l'avons toujours fait, soutien l'élu écologiste. Sans naïveté, et en sachant qu'on va tenter de nous la faire à l'envers." Mais "dans un esprit de discussions".

L'examen de la prochaine loi de finances a repris son cours, le Sénat devant se prononcer sur le texte ce jeudi 23 janvier. Avant un retour du projet de loi à l'Assemblée nationale.

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