10.000 personnes, selon les organisateurs, ont défilé à Bastia (Haute-Corse) samedi 9 février, à l'appel d'un collectif de la société civile corse contre l'abrogation par le Conseil constitutionnel de l'exonération dans l'île des droits de succession sur les biens immobiliers.
La manifestation a réuni la quasi-totalité de la classe politique insulaire, selon les organisateurs, ainsi que des institutions, organisations professionnelles ou associations, dans une foule composée de personnes allant de 10 à 80 ans qui ne cachaient pas leur crainte "de voir les Corses dépossédés de leurs terre".
"Le but est d'envoyer un signal fort à l'État pour qu'il prenne en compte les conséquences dramatiques de la suppression de l'arrêté Miot", explique Edmond Simeoni, figure historique insulaire qui fait partie du Collectif de la société civile à l'origine de la démarche.
"Les Corses ne cherchent pas à échapper à l'impôt mais ils souhaitent la fin du désordre juridique qui pénalise le patrimoine insulaire", ajoute une manifestante marchant derrière la banderole "Pour un statut fiscal dérogatoire", déjà utilisée en 1992 lors d'une autre manifestation du même type.
L'indivision au coeur du problème
Selon le notaire Alain Spadoni sur l'île "l'indivision est 40 fois plus importante que la moyenne des régions françaises". "Dans ces conditions, les Corses devront vendre leurs biens pour s'acquitter de droits successoraux faramineux, entraînant un processus de dépossession qui renforcera la spéculation foncière et immobilière au moment où la valeur des biens connaît une flambée sans précédent", précisait récemment le notaire.
En octobre dernier, l'Assemblée nationale avait prorogé de cinq ans ce système dérogatoire mis en place en 1801 par le conseiller André-François Miot pour compenser les handicaps de l'insularité.
Le Collectif de la société civile rappelle que "la prorogation de cinq ans devait justement permettre au Girtec (Groupement d'intérêt public pour la reconstitution des titres de propriété de Corse, NDLR) de poursuivre son travail de reconstitution après avoir déjà traité 6.000 dossiers depuis 2009, avec maintenant une moyenne de 500 par an", explique Me Spadoni.
Certains manifestants ont critiqué l'argument du Conseil constitutionnel stipulant que ce régime dérogatoire méconnaissait le principe d'égalité devant la loi, citant d'autres dispositions fiscales en rupture avec l'égalité de droit comme le régime fiscal du denier du culte en Alsace-Moselle ou les exonérations dans les DOM-TOM.
Une entrevue au Premier Ministre
Le gouvernement a créé un groupe de travail sur la fiscalité en Corse qui a déjà proposé de porter de 6 à 24 mois le délai pour déposer les déclarations de succession concernant les décès postérieurs au 1er janvier 2013.
De leur côté, les élus de l'Assemblée de Corse ont adopté la semaine dernière une délibération afin de demander rapidement une entrevue au Premier Ministre.