Ajaccio : 5 ans de prison pour stupéfiants en comparution immédiate

Trois jours après avoir écopé de six ans de prison à Bastia, François Cay a été condamné à 5 ans d’emprisonnement par le tribunal d'Ajaccio dans une autre affaire de stupéfiants. Jugé en comparution immédiate ce vendredi, il avait été arrêté lundi dernier en possession de 10 kilos de cannabis.

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"Vous êtes condamné à cinq ans de prison avec maintien en détention et à une amende 15.000 euros."  

Derrière la vitre de son box, François Cay assiste impassible au jugement prononcé à son encontre par le président du tribunal correctionnel d’Ajaccio.

Ce vendredi 15 avril, l’homme de 37 ans aux cheveux poivre et sel a été jugé en comparution immédiate pour "transport, détention et acquisition non autorisés de stupéfiants".

Lundi 11 avril, il avait été arrêté lors d’un contrôle routier à Ajaccio, alors qu’il circulait en voiture avenue du Maréchal Juin, à l’entrée de la résidence Monte è Mare. Ce jour-là, sur réquisition du procureur de la République, les policiers effectuent des contrôles au Jardin de l'Empereur et aux Salines afin de rechercher des armes ou des stupéfiants. Ils peuvent donc ouvrir les coffres des véhicules.

Alertés "par une forte odeur", selon leur procès verbal, ils fouillent celui de François Cay et trouvent un sac de sport contenant 10,3 kilos de cannabis.

"Dès que M. Cay sort du véhicule, il indique spontanément ne pas être le propriétaire de la voiture, expose le président du tribunal. Lors de la fouille du coffre, que M. Cay ouvre spontanément, survient une forte odeur caractéristique du cannabis. Spontanément, M. Cay déclare qu’il détient des produits stupéfiants. Il y a en effet un sac de sport. M. Cay précise qu’il s’agit de cannabis et qu’il devait y en avoir pour dix kilos."

Sur le siège passager avant du véhicule - que le prévenu indique "avoir loué" -, les policiers trouvent également 6.000 euros en espèces dans une sacoche, ainsi que deux téléphones portables. "Pour l’un des deux, vous avez refusé donner le code d’accès", relève le président. Ce qui vaut à François Cay d’être également poursuivi pour "refus de remettre aux autorités judiciaires ou de mettre en oeuvre la convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie".

 

Condamné le 12 avril à Bastia

 

Placé sous mandat de dépôt depuis son arrestation, le trentenaire titulaire d'un BEP comptabilité comparaît seul dans le box. Entouré de deux policiers et vêtu d'un polo rose, il écoute le président rappeler son casier judiciaire.

"Vous avez été condamné le 27 février 2014 par le tribunal de Marseille à trois ans d’emprisonnement, dont un avec sursis, pour transport et détention de stupéfiants. Vous êtes donc en récidive légale. Vous avez été placé en libération conditionnelle en mai 2016."

Ce mardi 12 avril, au lendemain de son interpellation à Ajaccio, le tribunal de Bastia a également rendu son délibéré dans une autre affaire le concernant pour un trafic de stupéfiants entre la Corse et le Continent.

"Alors que vous étiez en garde à vue, souligne le président, vous avez été condamné à 6 ans d’emprisonnement pour trafic de stupéfiants ainsi qu’à une amende de 60.000 euros avec un mandat de dépôt à effet différé."  

 

"Odeur caractéristique"

 

Dans la foulée, le président revient sur l’arrestation de François Cay lundi dernier à Ajaccio et sur le cannabis retrouvé dans le véhicule qu’il conduisait. Sur le contenu du sac, le prévenu qui habite dans une chambre d'hôtel à Biguglia indique "avoir rendu service, sans savoir ce qu’il y avait dedans". Et d'ajouter, en baissant son masque : "Je devais descendre à Ajaccio pour faire du shopping."

"Vous ne vous êtes pas posé de questions sur le sac mais vous dites que pendant le trajet, à mi-chemin, vous avez senti la même odeur caractéristique que celle qu’on sentie les policiers. Et à ce moment-là, vous n’avez pas fait demi-tour ?", demande le président.

  • "J’étais à mi-chemin, je me suis dit tant qu’à faire, maintenant que je suis là", répond François Cay.
  • (Président) "À ce moment-là, vous savez que vous transportez du cannabis ?"
  • (F. Cay) "J’avais compris."
  • (Président) "Vous continuez alors que vous savez ce à quoi vous vous exposez ; vous devenez consciemment une "mule", et vous continuez votre route. Vous ne nous dites pas grand-chose, notamment sur qui vous a remis le sac et à qui vous deviez le donner."

 

Téléphones

Le président s'attarde également sur les deux téléphones portables retrouvés dans la voiture.

"Vous n’avez causé aucune difficulté pour donner le code du premier. Pour le second, vous avez d'abord eu cette explication significative : "c’est pour mon usage personnel"." "Il est à un collègue qui l’a oublié dans la voiture", rétorque le prévenu.

"Vous avez dit aux enquêteurs que vous étiez à Bastia depuis trois jours. Or, votre téléphone était là, à Ajaccio, le 9 avril, le 6, le 3. Depuis janvier, vous avez fait 15 allers-retours Ajaccio-Bastia."

Concernant les 6.000 euros retrouvés, François Cay, qui perçoit chaque mois 900 euros d'allocation aux adultes handicapés (AAH), explique "qu’un ami lui a prêté cet argent depuis une semaine pour une opération chirurgicale début mai à Nîmes".

Son avocate, Maître Laëtitia Padovani, lui demande alors "s’il a des rentrées d’argent à venir" : "Oui, la vente d’un appartement à Paris qui doit me rapporter 60.000 euros. C’est avec ça que je vais rembourser l’ami qui m’a prêté l’argent."

"Ce n’était pas un contrôle routier"

 

Le président poursuit et évoque le point de livraison du sac de sport qui, selon le prévenu, se situait "devant le cimetière des Sanguinaires".  "Vous dites vous être trompé en vous engageant à tort sur l’avenue du Maréchal Juin et vous être mis à l’entrée de cette résidence pour faire demi-tour. Les policiers ne vous ont pas vu faire une manoeuvre de demi-tour. Il vous ont interpellé devant la barrière de la résidence."

"Ce n’était pas un contrôle routier, conteste François Cay. Les policiers ont débarqué de tous les côtés armés. Ils m’ont sorti de la voiture, m’ont pointé avec leurs armes et m’ont mis les menottes sans discuter. Ce n’était donc pas trop un contrôle routier, c’était une arrestation."

"C’était un contrôle pour voir s’il n’y avait pas des infractions, notamment sur les stupéfiants, rétorque le président. Ce n’est pas une infraction à la circulation routière qui vous est reprochée, loin de là, c’est beaucoup plus grave."

En début d’audience, la défense de François Cay a d’ailleurs déposé des conclusions de nullité concernant les modalités de ce "contrôle sur réquisition du procureur de la République".  Le procureur a demandé le rejet de ces conclusions de nullité. "Je constate que ce qui y est soulevé n'est pas dans l'état du droit actuel."

"Il vit pour le trafic"

 

Dans son réquisitoire, le procureur a d’abord souligné l’augmentation des saisies de drogue. "Elles montent en flèche, les trafiquants se gavent", avance-t-il avant de revenir sur l’arrestation de François Cay : "Une interpellation musclée avec "menottage" et braquage ? Au contraire, c’est l’inverse. C’est un contrôle qui a entraîné, tout d’abord, un contrôle de monsieur Cay, puis une fouille, puis son interpellation. Ni plus, ni moins. Et dans ce procès-verbal d’interpellation, ce monsieur va dire très rapidement qu’il y a pour une dizaine de kilos de shit dans le coffre. Monsieur Cay refusera après de signer ce pv. Mais cela n’enlève rien à sa portée. En regardant dans le détail, vous constaterez, en fait, qu’il était au courant qu’il y avait dans ce sac des stupéfiants en forte quantité." 

Tout en ayant rappelé que le prévenu était "convoqué en juillet prochain à Ajaccio pour une autre affaire de stupéfiants, puis en appel aux assises » (il avait été acquitté lors du procès de l’assassinat contre Jean-Michel German), le représentant du ministère public a conclu son réquisitoire ainsi : "M. Cay n’a pas la volonté de se réintégrer. Il préfère faire de ce mode vie délinquantiel son mode de vie parce que c’est plus juteux. Ce qui l’intéresse, c’est l’argent facile et de vivre au-dessus des lois. Quand vous faites la chronologie de son casier judiciaire, il vit pour le trafic. Je vous demande d’être intraitable avec lui."

Le procureur a demandé à son encontre 6 ans d’emprisonnement, son maintien en détention et 15.000 euros d’amende. Il a en revanche demandé la relaxe concernant l'infraction sur le refus de donner le code de l'un des deux téléphones portables.

"Il s’est fait duper"

Du côté de la défense, la plaidoirie - préparée à quatre mains et assurée par l'élève magistrate Elisa Burgues en stage d'étude chez M. Padovani -, met en avant le fait que "François Cay nie de manière constante être au courant du contenu du sac au moment de sa réception".

"Il dit avoir voulu rendre bêtement service et s’être fait duper, poursuit-elle. Il reconnait en effet par la suite avoir senti une odeur suspecte et donc s’être douté que le contenu du sac était litigieux. Il explique qu’il n’avait pas le choix que de vouloir se débarrasser du contenu du sac en le remettant comme on le lui avait demandé."

 

"Si vous entrez en voie de condamnation, je vous demanderai d’individualiser sa peine en prenant en compte ses pathologies et le fait qu’il y a un doute sur sa véritable intention dans cette affaire."

La défense de François Cay

 

 

Pour la défense, d’autres éléments peuvent "faire douter de l’intention délictueuse de François Cay",  notamment sur le fait "qu’il n’a pas reçu de contrepartie financière".  Pour les 6000 euros retrouvés en espèces, Elisa Burgues mentionne qu’ils "doivent servir à son déplacement à l’hôpital de Nîmes où il doit subir un opération chirurgicale très importante".

"Il a plusieurs pathologies, ajoute-t-elle : diabète, apnée du sommeil sévère et il souffre d’une obésité que l’on peut qualifier de morbide. D’où l’urgence de cette opération prévue le 2 mai pour laquelle il a un certificat médical." 

Après avoir demandé la relaxe de François Cay, Elisa Burgues conclut :  "si vous entrez en voie de condamnation, je vous demanderai d’individualiser sa peine en prenant en compte ses pathologies et le fait qu’il y a un doute sur sa véritable intention dans cette affaire. Et donc de le ramener à une peine plus proportionnée que celle demandée par le parquet. Afin de lui permettre de se rendre à son opération dans quinze jours, je vous demanderai donc un mandat de dépôt à effet différé."

Si, en début de semaine, le tribunal de Bastia avait accepté de différer son placement en détention, cela n’a pas été le cas ce vendredi à Ajaccio où le prévenu a été condamné à 5 ans de prison avec maintien en détention et 15.000 euros d'amende. Pour le tribunal, "le caractère urgent de son opération chirurgicale n'est pas médicalement avéré".

François Cay dispose de dix jours pour faire appel de ce jugement.

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