Ce jeudi 17 août, un rassemblement est organisé dans le quartier des Cannes, à Ajaccio, où deux agents municipaux ont été menacés de mort par « des dealers » selon la municipalité. Un rassemblement auquel participe l’ensemble des partis nationalistes.
Des centaines de personnes se sont rassemblées, ce jeudi 17 août, à partir de 17 heures ,devant l'école élémentaire des Cannes à Ajaccio.
Toutes sont mobilisées à l'appel lancé par des partis nationalistes -PNC, Corsica Libera, Core in Fronte, Femu a Corsica qui n'a pas appelé au rassemblement a indiqué qu'une délégation du mouvement serait présente - quelques jours après que deux agents municipaux ont été menacés de mort par des "dealers" selon la municipalité d'Ajaccio. L'urgence de cet événement est de s’opposer à la drogue et ceux qui en tirent profit.
Malgré cette forte mobilisation qui se déroule dans le calme et, pour l'heure, sans prise de parole, peu de participants souhaitent s'exprimer. Une habitante du quartier évoque "un ras-le-bol" et un "sentiment d'insécurité" grandissant.
Près de deux heures après le début de la manifestation la foule s'est en grande partie dispersée. Les quelques personnes restantes ont scandé "Arabi fora" ("Les arabes dehors"). Un tag relatant les mêmes propos a été tracé sur un des murs du quartier.
"Non à l'instrumentalisation raciste et xénophobe du combat contre la drogue"
Dans un tweet, rédigé au lendemain de ce rassemblement, Gilles Simeoni, président du conseil exécutif de Corse, estime : "Non à la drogue. Non à ceux qui la vendent ou en tirent profit, quelle que soit leur origine ou leur condition sociale. Non aussi, au nom des valeurs universelles du peuple corse et de son Histoire, à l'instrumentalisation raciste et xénophobe du combat contre la drogue."
Dans un communiqué, la Ligue des droits de l'Homme, section Corse, déclare : "« Arabi fora » exprime sans ambiguïté aucune, la mise au ban d’une partie de la population que certains considèrent étrangère au corps social corse voire comme un « ennemi intérieur ». Quartiers populaires, centres ville et zones rurales, aujourd’hui pourtant, aucun territoire insulaire n’est épargné."
L'association appelle dans le même temps "à la vigilance de tous les démocrates élus, partis, syndicats, associations et à la dénonciation du lien raciste entre « drogue » et « arabes »." Et en appelle également "à ne pas confondre les personnes victimes d’addiction avec les réseaux criminels dont l’objectif est de profiter de ces personnes à des fins d’enrichissement personnel."
Des « tentatives d’intimidation inacceptables »
Tous les partis nationalistes appelant à la mobilisation ont notifié leur position dans des communiqués de presse distincs. Ainsi, pour le parti de la majorité territoriale, Femu a Corsica, un des risques majeurs serait de voir naître des « réactions d’autodéfense ou de vendetta directe ou transversale ». Ainsi, il écrit dans un communiqué : « Notre responsabilité est de dire clairement que ces réactions ne peuvent être une réponse dans une société démocratique. » Selon Femu a Corsica : « Dans une société de proximité comme la nôtre, la mobilisation collective doit permettre d’isoler socialement ceux qui bénéficient, d’une façon ou d’une autre, de l’économie de la drogue. »
Le PNC, Partitu di a Nazione Corsa, considère quant à lui : « Ces tentatives d’intimidations sont pour nous inacceptables. […] [Elles] nous rappellent à quel point la situation en Corse est devenue préoccupante. Nous n’accepterons pas que notre pays, ses grandes villes et villages, prennent une trajectoire de banlieue, avec des codes sociaux aux antipodes des nôtres. »
Retour en images sur cette mobilisation (S.Poli ; M.Fiamma) :
« Les zones de non-droit »
Corsica Libera écrit : « Les nombreuses attitudes « banlieusardes » de ces derniers temps sont le signe incontestable d’une dérive communautariste favorisée par un phénomène de colonisation de peuplement. […] Les politiques de ghettoïsation et les zones de non-droit où des groupes de dealers feraient leur loi ne seront jamais concevables sur notre terre.»
De son côté, Core in Fronte estime: « Nous irons signifier à ceux qui veulent faire des quartiers, de nos villes, des zones de non-droit que nous refusons leurs logiques. La drogue est un fléau en Corse. Elle ne fait qu'enrichir les trafiquants et les mafieux qui tuent notre jeunesse. » La veille de la mobilisation, le parti politique a organisé une campagne d'affichage "A Droga Fora" pointant du doigt dealers et trafiquants "qu'ils soient Corses ou étrangers".
Participation de l’Associu Palatinu
Créée fin 2021, l’Associu Palatinu qui promeut l’histoire de la Corse, son patrimoine et un nationalisme corse identitaire a également appelé à la mobilisation. Dans une publication Twitter, l’association écrit : « Il s’agit de refuser, dans le calme et la fermeté, toutes les logiques de conquête territoriale afin de réaffirmer que jamais aucune loi communautaire ne s’imposera au détriment des Corses. »
Dans une conférence de presse, organisée ce jeudi dans le cadre d'une saisie de drogue record dans l'île, le procureur de la République d'Ajaccio a appelé à éviter les amalgames. Il a ainsi déclaré : « Il est factuellement erroné et sociétalement dangereux d’imputer ces trafics à une communauté en particulier. Parmi les personnes placées en garde à vue, se trouvent également des personnes d’origine corse. » Dans ce dossier, sept personnes ont été interpellées et placées en garde à vue.
La mairie d’Ajaccio qui a porté plainte mercredi participe également à la manifestation.