CAdEO. C'est le nom du centre d'accueil d'évaluation et d'orientation qui a vu le jour en décembre 2023 à Ajaccio. Un interlocuteur nécessaire pour celles et ceux qui souffrent d'un problème de santé mentale et qui ne savent pas à qui s'adresser. En quelques mois, ce centre, lié à l'hôpital de Castelluccio, a déjà fait ses preuves.
Le 12 décembre dernier, le CAdEO d'Ajaccio ouvrait ses portes. La structure, qui se situe dans les mêmes locaux que le Centre Médico-Psychologique Sud, dans le centre-ville, a accueilli depuis cette date plus de 500 personnes. En France, seules deux CAdEO existent, à Ajaccio et à Lyon, où l'initiative a vu le jour en juin 2020.
Le docteur Jean-François Antonetti, chef du service, nous en dit plus :
Pourquoi avoir ouvert un CAdEO à Ajaccio ?
L'objectif principal de ce centre, c'est de recevoir des personnes qui souffrent de problèmes de santé mentale, et qui estiment qu'ils ont besoin d'un suivi. On les oriente pour qu'ils aient un accès aux soins plus rapide, mais qui corresponde également le mieux possible à leur problématique.
Les gens ne connaissent pas toujours la différence entre un psychanalyste et un psychiatre
Docteur Antonetti
En quoi est-ce nécessaire ?
Les gens, souvent, sont un peu perdus lorsqu'ils n'ont jamais eu affaire à un professionnel de santé mentale. La variété est large, et ils ne savent pas toujours à quoi correspond telle ou telle spécialité, ou même la différence entre un psychiatre, un psychologue et un psychanalyste.
Ça se passe comment, chez CAdEO ?
Un psychiatre rencontre le patient, il s'entretient avec lui, s'enquiert des difficultés qu'il rencontre, cible une problématique, envisage les hypothèses, et lui fait des propositions, afin de l'orienter au mieux. On lui présente une liste de spécialistes qui nous semblent correspondre au problème, on fait un courrier à l'attention de celui qui est choisi, dans le public ou en libéral. Et si cela ne convient pas, le patient peut revenir pour une réorientation.
Comment vous consulte-t-on ?
Pour l'instant, il faut s'adresser au secrétariat de Castelluccio et de ses antennes, qui dirigeront vers nous les gens qui veulent nous solliciter.
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Après une dizaine de mois d'activité, quel premier bilan pouvez-vous tirer ?
C'est encore récent, vous venez de le dire, et il faudra voir sur le long terme, mais on est plutôt contents. Les chiffres sont globalement bons. Une fois qu'ils sont passés par CAdEO, les patients ont des rendez-vous plus rapidement, et c'est beaucoup dû au fait que l'on fournisse aux spécialistes des indications plus personnalisées. Et que l'on évite les mauvais choix, qui peuvent faire perdre beaucoup de temps.
[En moins de dix mois, la structure affirme que le temps pour accéder à une consultation psychiatrique n’est plus que d’une à deux semaines, alors qu’il était d’environ 2 mois à Ajaccio auparavant - NDLR].
On permet aux gens d'entrevoir des solutions
Docteur Antonetti
Qu'entendez-vous par mauvais choix ?
Il y a par exemple beaucoup de personnes qui, face à des difficultés complexes, qui engendrent beaucoup de souffrance, pensent que la réponse ne peut être que médicale. Mais ce n'est pas le cas. Il y a des situations où les réponses psychologiques sont plus efficaces. Alors on passe du temps avec eux, on leur explique, on leur permet d'entrevoir les solutions, et on cible mieux la suite du parcours.
Est-ce que les habitantes et habitants de Haute-Corse peuvent venir vous voir ?
Le problème, c'est qu'on ne connaît pas vraiment le réseau local dans le Nord. Si le patient vient de Bastia, ce sera plus compliqué de l'orienter. On peut le faire, bien sûr, mais ce sera beaucoup moins individualisé que pour les gens d'Ajaccio et de la région.
Comment avez-vous réagi à la décision du Premier ministre de faire de la santé mentale une grande cause nationale ?
Ça a été une bonne surprise. Beaucoup de professionnels ont reçu cette nouvelle avec satisfaction et espoir, mais maintenant, attendons de voir comment cette annonce va se traduire de manière concrète.
Quelles seraient les priorités, selon vous ?
Bien sûr, comme tout le monde dans la profession, j'aurais tendance à vous parler de l'augmentation des moyens. Mais au-delà de ça, je pense que l'on souffre d'un manque de formation. Celle-ci, contrairement à la plupart de nos voisins, est parfois délaissée, dès l’université. Il manque des heures de formation, pendant l'internat, pendant l'externat... Ce serait intéressant de travailler dans ce sens-là, ça permettrait une montée en gamme des connaissances.