TÉMOIGNAGE - 50 ans de la loi Veil sur l’IVG : “On doit se cacher, on se sent coupable d’avoir commis comme un crime”

Le 17 janvier 1975, la loi Veil qui consacre le droit de recourir à l'interruption volontaire de grossesse (IVG) entre en vigueur. 50 ans plus tard, le taux de recours à l’IVG est toujours en hausse avec des chiffres légèrement supérieurs à la moyenne en Corse. Mais pour les femmes qui décident d’interrompre leur grossesse, la décision n’est jamais facile. Témoignage.

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Parler pour “peut-être apporter quelque chose à une femme” qui lira. C’est en ce sens que Nina* accepte de confier son histoire.  

Il y a quelques mois, en pleine séparation, la jeune femme remarque un retard de règles. Après un rendez-vous chez sa sage-femme et une prise de sang, elle apprend être enceinte.  

À 40 ans passés, je ne me voyais pas repartir sur une grossesse qui était un accident. Et je n’étais plus avec mon compagnon, donc je me serais retrouvée seule avec un enfant. Cela a été difficile, mais j’ai pris la décision d’avoir recours à une IVG [interruption volontaire de grossesse NDLR.]” 

Une interruption médicamenteuse est organisée. Une “épreuve” à laquelle la jeune femme fait face seule. “J’étais dans tous mes états. Mais j’ai eu la chance de tomber sur une sage-femme au top. Elle m’a dit que ce n’était pas grave. J’avais prévenu mon ancien compagnon, mais il m’a laissé me débrouiller toute seule. Et cette professionnelle était très à l’écoute et elle a été avec moi jusqu’à la fin.” 

“Coupable d’avoir fait quelque chose de grave” 

Un “acte compliqué” auquel Nina avait recours pour la première fois. “J’ai toujours fait attention et je pensais que jamais je ne serai concernée par ça. Comme quoi, ça peut arriver à tout le monde.” 

Néanmoins, dans son quotidien, la jeune femme s’aperçoit n’est pas partagé par tous. “Certaines personnes à qui j’en ai parlé m’ont dit : “C’est grave.” Pour moi, les circonstances n’étaient pas réunies pour élever un enfant dans les bonnes conditions, mais je me sens coupable d’avoir fait quelque chose de grave. Le regard des gens pousse à se cacher, on se sent coupable d’avoir commis comme un crime.” 

Elle l’assure, “aucune femme n’avorte avec le sourire”. “Parfois, on entend que certaines femmes utilisent l’avortement comme un moyen de contraception, je pense vraiment que ce n’est pas le cas. Je ne crois pas que ce soit de gaieté de cœur, en tout cas, ça ne l’a pas été pour moi.” 

Avoir le droit de “disposer comme on veut de son corps” 

Certaine d’avoir pris la “meilleure décision”, Nina reste toute de même “fragile vis-à-vis de ça” et compte entamer un suivi dans les mois à venir. Elle souligne cependant “la chance d’être dans un pays où on a le droit de disposer comme on veut de son corps.” “C’est important pour moi de savoir que les femmes ont ce droit parce qu’on a toutes une histoire différente et il y a des périodes dans la vie qui ne sont pas propices à une grossesse.” 

Avec son histoire pour exemple, Nina espère faire entendre un message, celui que “toutes les femmes sont concernées par l’IVG”. “Il ne faut pas dire, ça ne m’arrivera pas. Je pensais que ça ne m’arriverait pas.“ 

Le reportage de Sybille Broomberg et Enzo Giugliano :

durée de la vidéo : 00h03mn28s
Témoignage d'une femme ayant recouru à l'IVG ; Mandy Frayssinet, Sage-femme Espace de Santé Ômaia ©France Télévisions

En Corse, en 2023, 1.290 femmes ont interrompu une grossesse volontairement.  

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